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Des échanges de mails peuvent prouver l'existence d'un bail commercial verbal

L'existence d'un bail commercial verbal peut être démontrée par les échanges de mails qui ont eu lieu entre le bailleur et le locataire et qui caractérisent un accord des parties sur les éléments essentiels du contrat et un commencement d'exécution du bail.

CA Paris 4-4-2024 n° 22/10921, Sasu La Familiale c/ Etablissement public Assistance Publique - Hôpitaux de Paris


Par Vanessa VELIN
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©Getty Images

Ayant informé son bailleur qu'il recherche une surface supplémentaire de stockage et qu'un local voisin lui conviendrait, le locataire de locaux commerciaux reçoit un mail du responsable immobilier tertiaire du bailleur contenant la proposition suivante : « Vous récupérez ce hangar d'une surface d'environ 15 m² à titre gratuit, seules les charges vous seront facturées. Je vous laisse me confirmer que vous récupérez cette surface. Je verrai de mon côté comment officialiser cette attribution sans nécessairement vous faire signer un contrat ». Par retour de mail, le locataire lui répond qu'il « accepte volontiers », lui demande s'il « souhaite officialiser [la] proposition par une lettre » et précise qu'il fera les travaux nécessaires pour réhabiliter le hangar. Le lendemain, le responsable immobilier lui répond qu'il « prépare un avenant d'adjonction de surface » qu'il lui transmettra « pour signature rapidement » et l'autorise d'ores et déjà à commencer les travaux et à installer un verrou sur la porte du local. Après avoir occupé le hangar pendant quatorze mois, le locataire est informé par le responsable immobilier que « ce local n'est plus proposé à la location de façon isolée ».

La cour d'appel de Paris a déduit de ces éléments que la proposition formulée par le responsable immobilier du bailleur tendant à conclure un avenant d'adjonction de surface au bail commercial initial, à titre gratuit sauf paiement des charges par le locataire, avait été acceptée sans ambiguïté ni réserve par le locataire tant sur la chose louée que sur le prix, ce qui caractérisait une rencontre des volontés sur les éléments essentiels du contrat de bail commercial conclu verbalement, sans écrit. En outre, un accord était également intervenu entre les parties sur la durée de ce bail verbal : en effet, si aucune mention explicite afférente à cette durée n'apparaissait dans les mails échangés par les parties, le responsable immobilier avait précisé préparer « un avenant d'adjonction de surface » et avait ainsi implicitement mais nécessairement entendu calquer la durée du bail verbal sur celle du bail commercial initial entre les parties, la seule modification portant sur l'assiette du bail. 

La cour a par ailleurs relevé que ce bail verbal portant extension de l'assiette du bail initial avait reçu un début d'exécution, le locataire ayant occupé les locaux litigieux, en contrepartie notamment de la réalisation de travaux d'aménagement.

Par suite, après avoir relevé que les échanges entre les parties n'évoquaient pas la nécessité d'un contrat écrit au titre de la validité de l'engagement, mais seulement à titre probatoire, la cour d'appel a considéré que le contrat de bail verbal avait été régulièrement conclu et elle a rejeté la demande d'expulsion formée par le bailleur.

A noter :

Le contrat de bail peut être verbal (C. civ. art. 1714), même lorsqu'il est soumis au statut des baux commerciaux (Cass. 3e civ. 12-12-1990 n° 89-11.534 D : RJDA 2/91 n° 91). L'existence d'un bail verbal peut être prouvée par tous moyens dès lors que celui-ci a reçu un commencement d'exécution (C. civ. art. 1715). La seule occupation des lieux est insuffisante à démontrer un tel commencement d'exécution car ce dernier suppose de la part de celui qui s'en prévaut, non seulement l'exercice des droits, mais aussi l'accomplissement des obligations nées du bail (Cass. 3e civ. 5-1-1978 n° 76-11.010 : Bull. civ. III n° 10), notamment le paiement du loyer (Cass. 3e civ. 29-4-1970 n° 68-14.497 : Bull. civ. III n° 289) ou, comme dans la présente affaire, la réalisation de travaux d'aménagement.

Rappelons que la conclusion d'un bail commercial suppose l'accord des parties sur la chose et le prix (C. civ. art. 1709) ainsi que sur la durée du bail (Cass. 3e civ. 5-12-2001 n° 00-14.294 FS-D : AJDI 2002 p. 129 note M.-P. Dumont). 

Documents et liens associés : 

CA Paris 4-4-2024 n° 22/10921

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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