Un créancier professionnel ne peut pas se prévaloir d'un cautionnement donné par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, lui permette de faire face à son obligation (C. consom. ex-art. L 341-4 ; désormais art. L 332-1, numérotation issue de l’ord. 2016-301 du 14-3-2016).
Une banque consent à une SARL exploitant un débit de boissons un créditcautionné par un brasseur. Par acte séparé, le gérant de la société se constitue caution solidaire de celle-ci envers le brasseur. Après la mise en liquidation judiciaire de la société, le brasseur, qui a désintéressé la banque, poursuit le gérant.
Jugé que le gérant pouvait utilement faire valoir que son engagement était disproportionné par rapport à ses biens et revenus :
- il était tenu envers le brasseur en cas de défaillance de la société débitrice principale ; le recours de la caution (le brasseur) contre la sous-caution (le gérant) était donc fondé sur la convention conclue entre elles et non sur la représentation mutuelle entre coobligés, qui ne peut pas jouer entre la caution et la sous-caution puisque celle-ci n'est pas débiteur du créancier principal ;
- le brasseur qui s’était porté caution n'était certes pas un établissement dispensateur de crédit mais son engagement était intervenu dans le cadre de son activité professionnelle de brasseur et de fournisseur du fonds de commerce de débit de boissons, de sorte qu’à l'égard de ses cocontractants il avait bien la qualité de créancier professionnel ;
- l’article L 341-4 précité, qui ne distingue pas entre cautions profanes et cautions averties, s’applique au dirigeant caution personne physique.
Le sous-cautionnement d’un montant de 58 000 € était bien disproportionné : à la date de la souscription de son engagement, la sous-caution, qui avait un revenu net mensuel de 1 080 € en sa qualité d'employé administratif, devait rembourser un crédit personnel de 15 000 € avec une mensualité de 300 € ; elle était locataire de son logement ; enfin, elle ne disposait d'aucun patrimoine immobilier et il n'était pas établi qu'elle disposait d’une épargne.
Sophie FENDT