La filiale d'un important groupe gazier souscrit à l'augmentation de capital d'une société du secteur de l'énergie et en devient l'actionnaire majoritaire. Un pacte d'actionnaires conclu entre cette filiale et les anciens actionnaires majoritaires de la société (devenus minoritaires depuis l'augmentation) prévoit la mise en place d'un comité de direction dont ceux-ci font partie (pour l'un, en sa qualité de président de la société, pour les autres, en leur qualité de directeurs salariés) et d'un comité de surveillance composé de représentants du groupe et chargé de contrôler la direction.
Le président ayant été révoqué et les directeurs licenciés, ils agissent en responsabilité contre la filiale et sa société mère pour non-respect du pacte, faisant valoir que leurs représentants étaient intervenus de manière individuelle auprès du comité de direction, au mépris du caractère collégial du comité de surveillance auquel ces représentants appartenaient, et que le pacte n'avait pas été exécuté de bonne foi, le groupe ayant depuis l'origine poursuivi le but de discréditer et d'évincer le président et les directeurs.
L'action est rejetée : aux termes du pacte, le comité de direction était l'organe de collaboration et de discussion entre les dirigeants de la société et le comité de surveillance était le lieu de concertation avec les membres du comité de direction, ce comité de surveillance ayant pour mission de contrôler la direction mais également de valider les grandes orientations stratégiques, de statuer sur les décisions importantes prises au niveau de la société et de faciliter l'intégration de celle-ci au sein du groupe ; les courriels produits par le président et les directeurs pour établir qu'ils avaient perdu tout pouvoir de direction montraient qu'il existait une communication continue entre eux et la société mère du groupe, matérialisée par des propositions de part et d'autre, des rendez-vous, des commentaires sur différentes approches, des interrogations sur les stratégies, parfois des désaccords ; aucun de ces courriels ne révélait une prise en main du groupe sur la direction opérationnelle de la société, mais plutôt des orientations données par celle-ci qui n'excédaient pas les pouvoirs du comité de surveillance tels que définis par le pacte d'actionnaires.
A noter : En l'espèce, il semble que les échanges de mails en cause n'aboutissaient pas à dépasser les attributions du comité de surveillance (contrôle de la direction, validation des orientations stratégiques et des décisions importantes, intégration de la société au sein du groupe) et n'empiétaient pas sur les pouvoirs du comité de direction. En outre, aucune clause du pacte ne faisait du comité de surveillance l'interlocuteur exclusif de la direction ; il n'était donc pas interdit à l'actionnaire majoritaire de communiquer avec les dirigeants de manière informelle, d'où la solution ci-dessus.
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Sociétés commerciales n° 69120