1. Dans le nouvel impôt sur la fortune immobilière (IFI), le principe de taxation sur une base nette de dettes est conservé, mais la définition des dettes déductibles est aménagée afin de l’adapter au champ d’application plus restreint de l’impôt. Certaines restrictions à la déduction des dettes sont par ailleurs introduites, limitant les possibilités de déduction.
A noter : les dettes dont il est ici question sont celles contractées par le redevable (ou les membres de son foyer fiscal). Celles qui sont contractées par la société dans laquelle il détient des titres sont éventuellement prises en compte pour la détermination de la valeur imposable des titres en question.
Redéfinition des dettes déductibles
2. Aux termes de l’article 974, I du CGI, pour être déductibles, les dettes doivent, comme pour l'ISF, être afférentes à des actifs imposables, exister au 1er janvier de l’année d’imposition et être contractées et effectivement supportées par le redevable (ou un membre de son foyer fiscal : conjoint, partenaire de Pacs, concubin notoire et enfants mineurs). La loi fixe désormais une liste des dettes déductibles. Il s’agit des dettes afférentes :
– aux dépenses d’acquisition des biens ou droits immobiliers imposables ;
– aux dépenses de réparation et d’entretien. En cas de location de l’immeuble, il s’agit des dépenses effectivement supportées par le propriétaire ou supportées pour le compte du locataire par le propriétaire dont celui-ci n’a pu obtenir le remboursement au 31 décembre de l’année de départ du locataire ;
– aux dépenses d’amélioration, de construction, de reconstruction ou d’agrandissement ;
– aux impositions dues à raison des propriétés immobilières ;
– aux dépenses d’acquisition des parts ou actions, au prorata de la valeur des actifs immobiliers imposables.
Sont en particulier déductibles les emprunts bancaires, les sommes restant dues aux prestataires de services ou aux entrepreneurs de travaux ainsi que le capital constitutif de la rente viagère en cas d’acquisition moyennant le paiement d’une rente viagère.
S’agissant des impôts, seuls ceux qui sont dus à raison de la propriété des biens (c’est-à-dire en pratique les taxes foncières, éventuellement la taxe sur les locaux vacants, la taxe sur les bureaux en Ile-de-France et l’IFI lui-même) restent déductibles. Les impôts qui incombent à l’occupant (comme la taxe d’habitation), de même que les impositions dues à raison des revenus générés par les biens (revenus fonciers et BIC ainsi que les prélèvements sociaux) ne le sont plus.
Les redevables qui ont acquis un immeuble par suite d’une donation ou d’une succession devraient pouvoir également déduire les droits de donation ou de succession en instance de paiement au 1er janvier.
3. L’article 974, II du CGI fixe une règle spéciale de déduction – qui n’avait pas d’équivalent dans le cadre de l’ISF – pour les prêts avec remboursement « in fine » contractés pour l’acquisition d’un bien ou droit immobilier imposable. Ces dettes ne sont que partiellement déductibles. Les annuités théoriques sont déterminées en divisant le montant de l’emprunt par le nombre d’années total de l’emprunt. Seule la somme des annuités correspondant au nombre d’années restant à courir jusqu’au terme prévu est déductible.
Exemple : un redevable a financé l’acquisition d’un immeuble par un emprunt « in fine » d’un montant de 250 000 € d’une durée de 10 ans à rembourser le 1er janvier 2024.
La dette qui pourra être portée au passif déductible de l’IFI 2018 s’élève donc à : 250 000 € - (250 000 € X 4/10) = 150 000 €.
4. Un traitement particulier est également réservé par l’article 974, II du CGI aux prêts ne prévoyant pas de terme pour le remboursement du capital contractés pour l’achat d’un bien ou droit immobilier imposable. Ces dettes sont déductibles chaque année à hauteur du montant total de l’emprunt diminué d’une somme égale à un vingtième de ce montant par année écoulée depuis le versement du prêt.
A noter : ces règles particulières de déduction s’appliquent dès le 1er janvier 2018 et donc aux contrats en cours à cette date. Mais elles ne s’appliquent ni pour des prêts contractés postérieurement à l’acquisition du bien pour financer des travaux ni pour des prêts contractés pour l’acquisition de titres de sociétés.
Exclusion de certains prêts
5. Ne sont, en principe, pas déductibles :
– les prêts contractés directement, ou indirectement par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs sociétés ou organismes interposés, auprès du redevable ou d’un membre de son foyer fiscal (CGI art. 974, III-1o) ;
– les prêts contractés directement, ou indirectement par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs sociétés ou organismes interposés, auprès d’un membre du groupe familial du redevable (autre qu’un membre du foyer fiscal : ascendants, descendants majeurs et frères et soeurs du couple) (CGI art. 974, III-2o) ;
– les prêts contractés par le redevable ou un membre de son foyer fiscal auprès d’une société contrôlée (CGI art. 974, III-3o).
A noter : le contrôle de la société (entendu dans le sens de l’article 150-0 B ter, III-2o du CGI) s’apprécie au regard des droits détenus, directement ou par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs sociétés ou organismes interposés, par le prêteur et les membres de son groupe familial.
6. Dans les deux derniers cas, si le redevable justifie du caractère normal des conditions du prêt, notamment du respect des échéances, du montant et du caractère effectif des remboursements, il échappe à la clause anti-abus et peut donc normalement déduire les dettes correspondantes.
Plafond de déduction pour les gros patrimoines
7. A noter : aux termes de l’article 974, IV du CGI, lorsque la valeur vénale du patrimoine taxable est supérieure à 5 millions d’euros et que le montant des dettes excède 60% de cette valeur, la fraction des dettes excédant cette limite n’est déductible qu’à hauteur de 50% de cet excédent.
Le patrimoine taxable s’entend de l’ensemble de l’immobilier imposable, y compris les titres de sociétés. Il s’apprécie avant imputation des dettes afférentes à ces biens. Les dettes à retenir dans le calcul sont celles dont la déduction est admise en application de l’article 974, I, II et III du CGI.
Exemple : un redevable est propriétaire de biens immobiliers taxables d’une valeur brute de 8 M€, il a contracté des dettes pour leur acquisition d’un montant de 5 M€, représentant donc plus de 60% de la valeur des biens (4,8 M€). L’excédent de 200 000 € n’est déductible qu’à hauteur de 50 %, soit 100 000 €. Le montant des dettes déductibles se trouve alors limité à 4,9 M€.
Le plafond de déduction ne s’applique pas – les dettes sont donc pleinement déductibles – si le redevable justifie que les dettes n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal.
Marie-Béatrice CHICHA
Pour en savoir plus sur l'IFI : voir le Feuillet rapide fiscal-social 1/18 et Solution Notaire Hebdo 1/18