Conditions de circulation des véhicules autonomes
1. Les règles régissant les conditions de circulation des véhicules autonomes sont actuellement disséminées dans plusieurs textes : la loi 2015-992 du 17 août 2015 ; l’ordonnance 2016-1057 du 3 août 2016 ; le décret 2018-211 du 28 mars 2018 ; un arrêté du 17 avril 2018.
Ces textes autorisent la circulation sur des voies publiques de véhicules à délégation totale ou partielle de conduite, à des fins expérimentales, c’est-à-dire en vue de réaliser des essais techniques ou d’évaluer les performances de ces véhicules. L’expérimentation est subordonnée à une autorisation préalable, délivrée par le ministre chargé des transports, ainsi que par diverses autres autorités (gestionnaire de la voirie, autorité compétente en matière de la police de la circulation, etc.) (Loi 2016-1057 art. 1et 2).
Nous présentons ci-après les dispositions modifiées par la loi Pacte. Pour un exposé plus complet des conditions de circulation des véhicules autonomes et des questions induites par ces expérimentations, voir P. Glaser, « Intelligence artificielle et responsabilité : un système juridique inadapté ? » : BRDA 19/18 inf. 22 et M.-J. Loyer-Lemercier, « Droit et assurance : risques et enjeux des véhicules autonomes » : BRDA 2/19 inf. 25.
2. Lors de l'activation des fonctions de délégation de conduite, une personne assure, en qualité de conducteur, la conduite du véhicule. Ce conducteur doit pouvoir à tout instant prendre le contrôle du véhicule, notamment en cas d’urgence ou lorsque le véhicule sort des conditions d’utilisation définies pour l’expérimentation. Lorsque l’autorisation d’expérimentation permet au conducteur de se trouver physiquement à l’extérieur du véhicule, il doit être en mesure d’en prendre le contrôle à tout moment (Décret 2018-211 art. 12).
3. La loi Pacte complète ces dispositions sans les bouleverser. Elle pose d’abord, symboliquement, le principe de l’autorisation de circulation sur la voie publique des véhicules autonomes, et rappelle que cette circulation est néanmoins subordonnée à la délivrance d’une autorisation spéciale destinée à assurer la sécurité du déroulement de l’expérimentation. Par ailleurs, la délivrance de cette autorisation sera subordonnée à la condition que le système de délégation de conduite puisse être à tout moment neutralisé ou désactivé par le conducteur (Ord. 2016-1057 art. 1 modifié ; Loi art. 125, I-1°).
4. La loi précise également, en leur donnant une assise légale, les conditions de circulation en l’absence de conducteur à bord du véhicule et le rôle de ce dernier. Dans ce cas, il faut qu’un conducteur situé à l’extérieur du véhicule soit prêt à tout moment à prendre le contrôle du véhicule, ce qui suppose une supervision permanente du véhicule et de l’environnement de conduite. Lorsqu’il reprend le contrôle, le conducteur doit être capable d’effectuer les manœuvres nécessaires à la mise en sécurité du véhicule, de ses occupants et des usagers de la route (Ord. 2016-1057 art. 1 modifié ; Loi art. 125, I-1°).
5. Jusqu’à présent, seuls les véhicules autonomes affectés à un transport public de personnes pouvaient être autorisés à circuler sur les voies réservées aux transports collectifs. Désormais tous les véhicules et non plus seulement ceux de transport public de personnes peuvent circuler sur ces voies, sous réserve de l’avis conforme de l’autorité de police de la circulation concernée et de l’autorité organisatrice des transports (Ord. 2016-1057 art. 1-1 nouveau ; Loi Pacte art. 125, I-2° ; Loi 2015-992 art. 37, IX-al. 1 in fine supprimé ; Loi Pacte art. 125, II).
La notion de véhicule affecté à un transport public de personnes est par ailleurs étendue pour comprendre désormais tous les véhicules utilisés pour effectuer ou mettre en place un tel service.
Responsabilité pénale en cas d’accident impliquant un véhicule autonome
6. La loi Pacte clarifie le régime de responsabilité pénale applicable en cas d’accident intervenu pendant les expérimentations de véhicules autonomes.
7. Le conducteur d’un véhicule est en principe responsable pénalement des infractions qu’il commet dans la conduite de ce véhicule (C. de la route art. 121-1). La mise en circulation de véhicules à délégation totale ou partielle de conduite a cependant bousculé la notion de conducteur, de sorte que la détermination du responsable n’est désormais plus aussi évidente.
8. La loi Pacte règle cette question, en déchargeant le conducteur d’un tel véhicule de sa responsabilité pénale pendant les périodes où le système de délégation de conduite a été activé conformément à ses conditions d’utilisation, qu’il est en fonctionnement et qu’il informe le conducteur en temps réel être en état d’observer les conditions de circulation et d’exécuter sans délai toute manœuvre en ses lieu et place (Ord. 2016-1057 art. 2-1, al. 1 nouveau ; Loi Pacte art. 125, I-3°).
Dans ce cas, la responsabilité du conducteur est transférée au titulaire de l’autorisation d’expérimentation. C’est ce dernier qui devra payer le montant des amendes lorsque la conduite du véhicule contrevient à des règles dont le non-respect constitue une contravention. Si par ailleurs cette conduite a provoqué un accident entraînant un dommage corporel, ce titulaire sera pénalement responsable des délits d’atteinte involontaire à la vie ou à l’intégrité de la personne lorsqu’il est établi une faute dans la mise en œuvre du système de délégation de conduite (Ord. 2016-1057 art. 2-2 nouveau ; Loi Pacte art. 125, I-3°).
Information du public
9. Un décret, qui doit préciser les conditions de délivrance de l'autorisation d’expérimentation et les modalités de sa mise en œuvre en application de l’article 3 de l’ordonnance 2016-1057 (décret non publié à ce jour), devra également prévoir les modalités d’information du public sur la circulation à des fins expérimentales de véhicules à délégation partielle ou totale de conduite (Loi Pacte art. 125, I-4°).
Maya VANDEVELDE
Pour en savoir plus : consultez notre dossier complet sur la loi Pacte dans le BRDA 10/19