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Accueil/ Actualités - La Quotidienne/ Particuliers/ Héritage, donations et successions

Nullité du testament-partage portant sur des biens communs ou des propres du conjoint

Si les ascendants peuvent partager, par anticipation, leur succession, cette faculté est limitée aux biens dont chacun d’eux a la propriété et la libre disposition et ne peut être étendue aux biens communs ni aux biens propres de leur époux.

Cass. 1e civ. 5-12-2018 n° 17-17.493 F-PB


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Des époux décèdent à quelques années d’intervalle, laissant quatre enfants. L’époux avait établi trois testaments olographes, son épouse, quatre, les trois derniers portant les mêmes dates que ceux de son mari et comportant un contenu identique. Ces différents testaments organisent entre les enfants le partage des biens propres et communs des époux. En outre, deux des enfants se voient léguer la quotité disponible par le dernier testament de chacun des parents. Assignés en justice en délivrance des legs, les deux autres enfants invoquent la nullité de tous les testaments au motif qu’ils incluent des biens communs et, pour ceux du père, des biens propres de son épouse, ce qu’aucun des époux n’avait le droit de faire.

Tant en première instance qu’en appel, les différents testaments sont jugés constituer des testaments-partages frappés de nullité, un testament-partage ne pouvant porter ni sur des biens communs ni sur des propres du conjoint du testateur. Devant la Cour de cassation, le frère et la sœur qui demandaient la délivrance des legs de la quotité disponible font d’abord valoir que la volonté manifeste de leurs parents de les avantager exclut la qualification de testament-partage. Mais les Hauts Magistrats s’en remettent au pouvoir souverain des juges du fond pour interpréter la volonté des testateurs, estimant notamment que la cour d’appel a pu déduire des éléments de l’affaire que le partage d’ascendants opéré par les défunts sur la totalité de leurs patrimoines propre et commun, fût-il en dernier lieu assorti de libéralités en faveur de deux de leurs enfants, résultait de testaments-partages.

Le frère et la sœur contestent ensuite la nullité du testament-partage portant sur des biens de communauté, notamment au motif que l’article 1423 du Code civil valide le legs de bien commun. L’argument est rejeté aux termes d’un attendu de principe particulièrement net, relevant « que si les ascendants peuvent partager, par anticipation, leur succession, cette faculté est limitée aux biens dont chacun d’eux a la propriété et la libre disposition et ne peut être étendue aux biens communs ni aux biens propres de leur époux ; qu’ensuite, les dispositions de l’article 1423 du Code civil ne peuvent s’appliquer qu’aux légataires et non aux héritiers, dont les parts doivent être déterminées au moment même du décès de l’ascendant et ne sauraient être subordonnées au résultat futur et incertain du partage ultérieur de la communauté. »

Dès lors, ayant retenu que les testaments s’analysaient en des testaments-partages et constaté que ceux-ci portaient sur la totalité des biens dépendant de la communauté, outre, s’agissant des testaments du mari, sur des biens immobiliers appartenant en propre à son épouse, la cour d’appel en a exactement déduit que ces actes étaient entachés de nullité en leur totalité.

A noter : Confirmation de jurisprudence : le testament-partage d’un époux commun en biens ne peut porter, sous peine de nullité, ni sur des biens de communauté (Cass. 1e civ. 16-5-2000 n° 97-20.839 et Cass. 1e civ. 6-3-2001 n° 99-11.308 : RTD civ. 2001 p. 648 obs. B. Vareille), ni sur des biens appartenant en propre à son conjoint (Cass. 1e civ. 3-2-2010 n° 08-18.196 FS-PB : RTD civ. 2010 p. 607 obs. M. Grimaldi).

En pratique : Afin d’assurer néanmoins l’efficacité de telles dispositions, il est suggéré de les assortir d’une clause pénale fulminée contre l’héritier qui les attaquerait, s’agissant d’une irrégularité qui ne porte atteinte qu’à des intérêts privés (Dalloz Action Droit patrimonial de la famille 2018/2019, dir. M. Grimladi, v. « Conditions de la libéralité-partage » par M. Grimaldi, n° 411.93).

Signalons par ailleurs que des biens communs peuvent être sereinement inclus par les époux dans une donation-partage conjonctive, ou même par un seul des époux dans une donation-partage ordinaire à condition que le conjoint intervienne à l’acte pour donner son consentement (sur les précautions à prendre dans ce dernier cas, voir Mémento Successions Libéralités à paraître).

Emmanuel DE LOTH

Pour en savoir plus sur cette question voir Mémento Patrimoine n° 27941

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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