Une personne physique consent à une société un prêt de 900 000 € remboursable en une seule échéance six mois plus tard. Le prêt est garanti par une hypothèque de second rang sur une parcelle de terre appartenant à l'emprunteur. Le même jour, l'emprunteur et le prêteur signent une promesse synallagmatique de vente portant sur cette même parcelle au prix de 900 000 €, une clause prévoyant que la promesse sera nulle et non avenue si l'emprunteur rembourse le prêt à son échéance et paie également une certaine somme à titre d'indemnité libératoire.
Le prêt n'est pas remboursé et le prêteur poursuit la société pour que soit jugée parfaite la vente de la parcelle.
Sa demande est rejetée, et la promesse de vente est déclarée nulle : le prêt et la promesse étaient liés et concouraient à une même opération, permettant au prêteur de s'assurer d'une sûreté efficace destinée à contourner les règles de la saisie immobilière ; la promesse de vente s'analysait en une clause devoie parée de nature à contourner le cours normal des procédures d'exécution et non pas en un pacte commissoire puisqu'elle ne satisfaisait pas aux conditions des articles 2459 et 2460 du Code civil ; la seule existence dans la promesse de vente de conditions suspensives de droit commun était inopérante à combattre cette analyse.
A noter : Le créancier hypothécaire impayé peut (C. civ. art. 2458) :
- faire procéder à une saisie immobilière de l'immeuble. Dans ce cas il doit respecter les règles fixées en la matière par le Code des procédures civiles d'exécution, toute clause lui permettant de vendre l'immeuble en dehors de cette procédure - clause dite « de voie parée » - étant nulle ;
- se faire attribuer l'immeuble en gage. La demande d'attribution doit en principe être portée devant le juge, à moins que les parties n'aient convenu dans la convention d'hypothèque que le créancier deviendrait propriétaire de l'immeuble hypothéqué en cas de non-paiement de la dette garantie. Un tel pacte commissoire ne peut être mis en oeuvre qu'à certaines conditions, et notamment après que l'immeuble a été estimé par un expert désigné à l'amiable ou judiciairement (C. civ. art. 2459 et 2460).
En l'espèce, l'hypothèque avait été prise alors que le Trésor public bénéficiait d'une hypothèque antérieure (de premier rang) sur le même bien immobilier. La promesse de venteconclue en dehors de la convention d'hypothèque et pour un prix déterminé, ne pouvait pas être analysée en un pacte commissoire.
Organisant une vente amiable à l'initiative du créancier, de nature à faire échec aux règles d'ordre public de la saisie immobilière, la clause doit s'analyser comme une clause de voie parée nulle en vertu de l'article 2458, estime la Cour de cassation.
Maya VANDEVELDE
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 56503