L’ordonnance 2019-740 du 17 juillet 2019 (BRDA 18/19 inf. 19), entrée en vigueur le 19 juillet 2019, a mis en place une sanction civile unique en cas de défaut de mention ou de mention erronée du taux effectif global (TEG) applicable à tout crédit, qu’il soit consenti à un consommateur ou à un professionnel : le prêteur peut être déchu du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice de l’emprunteur (C. consom. art. L 341-1, al. 2 et L 341-25, al. 2 pour l’information précontractuelle de l’emprunteur consommateur sur le TEG et art. L 341-4, L 341-34 et L 341-54 pour la mention du TEG devant figurer dans l’offre de crédit à un consommateur ; C. consom. art. L 341-48-1 et C. mon. fin. art. L 313-4 pour la mention du TEG devant figurer dans tout écrit constatant un prêt). Avant cette ordonnance et dans le silence des textes, la Cour de cassation sanctionnait l'inexactitude ou l’omission du TEG dans le contrat de crédit par l'annulation de la clause d'intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l'intérêt légal (Cass. 1e civ. 24-6-1981 no 80-12.903 : Bull. civ. I no 234 ; Cass. com. 29-11-2017 n° 16-17.802 F-D : RJDA 4/18 n° 349 ; Cass. 1e civ. 5-6-2019 n° 18-16.360 FS-D).
Si l’ordonnance précitée s’applique seulement aux contrats souscrits après son entrée en vigueur, vient d’affirmer la chambre commerciale de la Cour de cassation, il est désormais nécessaire de retenir la même sanction en cas d'omission du TEG dans l'écrit constatant un contrat de crédit conclu avant le 19 juillet 2019, comme en cas d'erreur affectant la mention de ce taux dans un tel écrit, comme l’a déjà fait la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. 1e civ. 10-6-2020 n° 18-24.287 FS-PBRI : BRDA 15-16/20 inf. 23).
Par suite, la chambre commerciale a censuré l’arrêt d’une cour d’appel qui avait annulé la clause d’intérêt conventionnel d'un prêt conclu en 2012 en raison de l’inexactitude du TEG et lui avait substitué le taux d’intérêt légal.
A noter : Par cet arrêt, la chambre commerciale de la Cour de cassation procède à un revirement de jurisprudence et s’aligne sur la solution retenue par la première chambre civile. En conséquence, la sanction de l’omission du TEG ou de l’indication d’un TEG erroné dans un contrat de prêt est la même que ce dernier ait été conclu avant ou après le 19 juillet 2019, peu important que le litige relève de l’une ou de l’autre des chambres précitées de la Cour de cassation.
La chambre commerciale de la Cour de cassation relève ici le caractère inadéquat de l’annulation de la clause d’intérêt conventionnel et de la substitution à celui-ci du taux d’intérêt légal. Cette sanction, qui n'est susceptible d'aucune modération par le juge, ne permet pas de prendre en considération le préjudice subi par l'emprunteur, privé d'une chance de souscrire le contrat de crédit en connaissance du TEG de celui-ci, et ce, en dépit de la jurisprudence selon laquelle cette sanction n'est pas encourue lorsque le TEG est en réalité inférieur à celui mentionné (Cass. 1e civ. 12-10-2016 n° 15-25.034 F-PB : RJDA 2/17 n° 109 ; Cass. com. 22-11-2017 n° 16-15.756 F-D) ou lorsque l'erreur affectant le TEG mentionné est inférieure à un dixième de point de pourcentage (Cass. 1e civ. 26-11-2014 n° 13-23.033 F-D ; Cass. com. 18-5-2017 n° 16-11.147 F-PBI : RJDA 12/17 n° 833). En outre, cette sanction se révèle sans commune mesure avec le préjudice subi par l'emprunteur lorsque le taux légal est en baisse, tandis qu'à l'inverse, en cas de hausse de ce taux, elle peut se trouver privée de tout effet. On peut ajouter que l’automaticité de la sanction méconnaît le principe de proportionnalité résultant du droit de l’Union européenne (BRDA 15-16/20 inf. 23 n° 7).
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n°s 41035 et 40581