A l'occasion des élections municipales de 2014, une institution culturelle régionale diffuse auprès des abonnés à ses spectacles un mail en réponse à une tribune polémique parue dans la presse.
Saisie par plusieurs plaintes, la Cnil relève que le message en question est de nature politique, alors que le traitement des adresses électroniques des abonnés n’a été autorisé que pour la gestion de leurs abonnements et l’envoi d’informations culturelles. Les règles applicables à la collecte des données à caractère personnel ont donc été méconnues (Loi du 6-1-1978 art. 6, 2°). Par une délibération du 12 février 2015, la Cnil prononce un avertissement à l’égard du responsable du traitement (art. 45, I) et décide, « compte tenu des circonstances de l’espèce », de rendre publique sa décision sur son site internet et celui de Légifrance (art. 46). Cette décision de publication ne s’accompagne d’aucune autre précision.
Après avoir considéré que la publication de la mesure est justifiée « dans son principe » car elle renforce le « caractère dissuasif » de l’avertissement, le Conseil d’Etat estime qu’en ne fixant pas la durée pendant laquelle la sanction resterait mise en ligne, la Cnil a infligé une sanction complémentaire « sans borne temporelle », laquelle est « excessive ». En conséquence, il annule partiellement la délibération de la Cnil.
A noter : La Cnil a la faculté de rendre publiques ou non les sanctions qu’elle prononce. Si elle opte pour la publication, sa décision constitue une sanction complémentaire, distincte de la mesure principale, sans qu’il soit nécessaire de la motiver de manière spécifique (CE 12-3-2014 n° 354629 : RJDA 10/14 n° 817). Le Conseil d’Etat avait jugé de même à propos des sanctions infligées aux professionnels par l’Autorité des marchés financiers (AMF) (CE 9-11-2007 n° 298911 : RJDA 7/08 n° 811).
Dans nombre d’hypothèses, la publicité qui entoure la sanction principale est susceptible d’entraîner pour la personne concernée des effets aussi graves, sinon plus importants, que la sanction elle-même, notamment lorsque celle-ci constitue un avertissement. L’arrêt commenté en déduit que, même si la loi du 6 janvier 1978 ne le prévoit pas, la sanction complémentaire de la publication est soumise au principe de proportionnalité. De sorte que sa légalité s’apprécie par rapport au support de diffusion retenu et de la durée pendant laquelle la publication est accessible de « façon libre et continue ». L’arrêt précité de 2007, relatif aux sanctions de l’AMF, avait déjà formulé la même exigence de proportionnalité, mais sans prendre parti sur la question de la durée de la publication. La solution ci-dessus est transposable à ces sanctions.
Pour en savoir plus sur le pouvoir de sanction administrative de la Cnil : voir Mémento Concurrence consommation nos 33090 s.