Apologie publique d’actes de terrorisme
La Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu violation de l’article 10 de la Convention (liberté d’expression) en ce qui concerne la lourdeur de la sanction pénale infligée au requérant, condamné pour complicité d’apologie publique d’actes de terrorisme (CEDH 23-6-2022 n° 28000/19, Rouillan c/ France).
L’auteur, ancien membre du groupe Action directe, avait été condamné à 18 mois d’emprisonnement, dont 10 avec sursis probatoire, en raison de propos tenus lors d’une émission de radio dans laquelle il avait déclaré trouver « très courageux » les auteurs des attentats terroristes commis à Paris et en Seine-Saint-Denis en 2015. Sur le fond, la Cour approuve cette condamnation. Elle rappelle cependant que le prononcé d’une condamnation pénale constitue l’une des formes les plus graves d’ingérence dans le droit à la liberté d’expression et qu’en l’espèce, les motifs retenus par les juridictions internes ne suffisent pas à la mettre en mesure de considérer qu’une telle peine était, alors même qu’il a été sursis à son exécution pour une durée de 10 mois, proportionnée au but légitime poursuivi.
Fraude fiscale
Les délits de fraude fiscale par dissimulation de sommes sujettes à l'impôt (CGI art. 1741) et d'omission d'écritures en comptabilité (CGI art. 1743), qui répriment des faits nécessairement distincts, peuvent faire l’objet d’une déclaration de culpabilité concomitante sans méconnaître le principe ne bis in idem (Cass. crim. 22-6-2022 n° 21-83.360 F-B).
Responsabilité pénale des personnes morales
Est justifiée la condamnation d’une société B dont une société A, présidente de B, est précisément identifiée comme étant sa représentante légale et l’organe ayant commis l’infraction pour le compte de B. Mais alors A ne saurait, sans contradiction, être également condamnée au motif que B a commis l’infraction au nom et pour le compte de A (Cass. crim. 21-6-2022 n° 20-86.857 FS-B).
Délit de blessures involontaires
Le délit de blessures involontaires ayant entraîné une ITT inférieure ou égale à trois mois (C. pén. art. 220-20) suppose chez son auteur le manquement délibéré à une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement. Une faute caractérisée constitutive de manquements à des obligations générales de prudence et de sécurité est insuffisante à caractériser l’élément moral de l’infraction (Cass. crim. 21-6-2022 n° 21-85.691 FS-B).
Banqueroute
La chambre criminelle énonce qu’en cas de poursuites pour banqueroute, les créanciers et actionnaires de la société débitrice ne peuvent se constituer partie civile qu'à la condition d'invoquer un préjudice distinct du montant de leur créance déclarée dans la procédure collective ouverte contre leur débiteur (Cass. crim. 22-6-2022 n° 21-83.036 F-B).
Contrat d’emploi pénitentiaire
Le décret 2022-917 du 21 juin 2022 portant diverses dispositions relatives au contrat d'emploi pénitentiaire substitue, dans le Code du travail, cette nouvelle dénomination à celle d’engagement unilatéral créé par la loi pénitentiaire 2009-1436 du 24 novembre 2009. Il tire ainsi les conséquences du cadre de travail mis en place par la loi 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire et décliné par le décret 2022-655 du 25 avril relatif au travail des personnes détenues et modifiant le Code pénitentiaire.
Les dispositions régissant le travail des personnes incarcérées se trouvent donc désormais codifiées aux articles L 412-1 et s., R 412-1 et s. du Code pénitentiaire et dans la cinquième partie du Code du travail relative notamment à l'insertion par l'activité économique et à l'orientation des travailleurs handicapés.
Saisies
Deux décisions rendues le même jour apportent des précisions en matière de saisies pénales.
Dans la première, la Cour de cassation décide que la chambre de l'instruction, saisie d'un appel formé à l'encontre d'une ordonnance de saisie spéciale d'un bien appartenant à une personne mise en examen incapable de se défendre personnellement en raison d’une altération de ses facultés, doit s’assurer que les conditions légales de la saisie sont réunies (Cass. crim. 22-6-2022 n° 21-86.620 FS-B).
Dans la seconde, elle se prononce sur la proportionnalité d’une saisie en valeur d’un bien alors que son propriétaire, auteur d’un recel, n’avait tiré profit qu’en partie du produit de l’infraction. Elle y précise que l'attribution du marché public ne constituant pas un élément constitutif du délit d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, le marché proprement dit ne peut être considéré comme l'objet de cette infraction. L'avantage économique qui constitue le produit de l’infraction est équivalent au prix total du marché en cause duquel doivent être impérativement déduites les charges et dépenses directement imputables à l'exécution de ce marché comme, par exemple, le coût des salaires et des fournitures, et auquel il est possible d’ajouter les gains découlant du marché (économies d’impôts, valorisation de la trésorerie, maintien des emplois, etc.). Le produit de l'infraction ainsi calculé constitue l'objet du délit de recel aggravé. Toutefois, le juge qui ordonne la saisie en valeur d'un bien appartenant à l'auteur d’une telle infraction alors qu’il n’en a pas bénéficié en totalité, doit apprécier, lorsque cette garantie est invoquée, le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé pour la partie du produit dont il n'aura pas tiré profit (Cass. crim. 22-6-2021 n° 21-83.671 FS-B).
Pour aller plus loin : voir la revue AJ pénal