Droit pénal général
Action publique : application dans le temps du délai butoir de prescription des délits occultes ou dissimulés
La prescription de l’action publique d'une infraction occulte ou dissimulée, régulièrement interrompue avant le 1er mars 2017 (date d’entrée en vigueur de la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 ayant introduit un délai de prescription maximum de douze années révolues à compter du jour ou le délit a été commis) par des actes réalisés même plus de douze ans après la commission des faits, n’est pas acquise. (Crim. 13-11-2023, n° 22-81.985 F-B)
Droit pénal spécial
CJIP en droit pénal environnemental
Le Président du tribunal judiciaire de Besançon a validé, le 14 décembre 2023, deux conventions judiciaires d’intérêt public.
Par la première, initialement soumise à proposition le 4 décembre, SNCF Réseau s’engage à s’acquitter d’une amende de 90 000 euros, de dommages-intérêts de plus de 15 000 euros et de mesures de remise en état. La société anonyme était mise en cause pour la commission de trois infractions environnementales dans le Doubs (construction ou aménagement de terrain par personne morale dans une zone interdite par un plan de prévention des risques naturels, destruction non autorisée de l’habitat d’une espèce animale protégée non domestique, et exercice sans autorisation par personne morale d’une activité nuisible à l’eau ou au milieu aquatique). (TJ Besançon, 14-12-2023, Ord. validation, n° Parquet 23/341/048)
L’autre convention prévoit le même type d’obligations, dont une amende de 80 000 euros, à l’encontre de la Société BAP (Bourbon Automotive Plastics), à l’origine d’une pollution des eaux aux métaux lourds. La CJIP avait été signée le 13 novembre dernier. (TJ Besançon, 14-12-2023, Ord. validation, n° Parquet 22/278/01)
Justice
Travail en détention : publication d’un décret
Diverses mesures règlementaires relatives au travail en détention sont prises. Ainsi, procéder, durant une activité, à des agissements de harcèlement moral ou de harcèlement sexuel constitue désormais une faute disciplinaire du premier degré (C. pénit., art. R. 232-4). Le CJPM est également complété dans sa partie règlementaire par une section concernant le travail des mineurs détenus. (Décr. n° 2023-1169 du 12-12-2023 portant diverses mesures relatives aux activités de travail des personnes détenues)
Procédure pénale
Action civile : pas de provision accordée à la partie civile sans déclaration préalable de responsabilité civile du prévenu
Si le juge pénal peut, lorsqu'il statue sur l'action civile sans pouvoir se prononcer en l'état sur la demande en dommages-intérêts, accorder à la partie civile une provision, exécutoire nonobstant opposition ou appel, ceci n’est possible que s’il a déclaré le prévenu civilement responsable d'un préjudice dont il a reconnu le principe. (Crim. 12-12-2023, n° 22-84.854 F-B)
Instruction : le délai de vingt jours pour statuer sur une demande de mise en liberté ne peut être prolongé
La chambre de l'instruction qui statue sur une demande de mise en liberté formée par un accusé doit se prononcer dans le délai de vingt jours, faute de quoi il est mis fin à la détention provisoire, l'intéressé, s'il n'est pas détenu pour autre cause, étant mis d'office en liberté. Ce délai ne peut être prolongé, même lorsque cette juridiction ordonne une expertise afin de déterminer si l'état de santé de la personne détenue est compatible avec son maintien en détention. (Crim. 12-12-2023, n°23-85.651 F-B)
Instruction : le gel de biens mobiliers ordonnée par le juge d’instruction s’analyse en une saisie pénale et sa contestation en suit le régime
La décision de gel constitue une notion autonome du droit de l'Union européenne qui correspond, dans l'ordre juridique interne, à une décision de saisie pénale destinée à garantir l'exécution de la confiscation du bien objet de la mesure. En conséquence, la régularité de la décision de gel ordonnée par le juge d’instruction portant sur un bien meuble corporel confiscable comme étant susceptible d'être l'instrument des faits objet de l'information ne peut être contestée par la voie de l'appel. (Crim. 13-12-2023, n° 22-87.237 F-B)
Douanes : pas d’information préalable du procureur pour les surveillances réalisées dans les limites de la compétence territoriale
Les dispositions de l'article 67 bis, I, du code des douanes, qui prévoient l’information préalable du procureur de la République pour les surveillances réalisées à compter du 30 juin 2021, ne s'appliquent que si les agents des douanes ont agi en dehors des limites de leur compétence territoriale, peu important la nature des opérations de surveillance réalisées. (Crim. 13-12-2023, n° 23-83.893 F-B)
Contrôles d’identité : rapport de la Cour des comptes
La Cour des comptes a rendu un rapport sur les contrôles d’identité (Rapp. remis le 6 déc. 2023) . Elle avait été saisie par la Défenseure des droits au regard de l'actualité des débats sur le sujet. Claire Hédon mettait en avant l'absence de traçabilité des contrôles, l’existence de contrôles au faciès et une absence de contrôle effectif de l'autorité judiciaire. Ces carences sont pour l’essentiel confirmées par la Cour des comptes. Elle note que les contrôles d’identité sont une pratique très courante et pourtant diluée dans un cadre juridique extrêmement complexe. Sur le plan opérationnel, les pratiques sont très diverses, peu encadrées par la hiérarchie directe, et les agents sont insuffisamment formés. Le contrôle du procureur de la République est encore jugé peu effectif. (Rapp. Cour des comptes, Les contrôles d’identité. Une pratique généralisée aux finalités à préciser, 06-12-2023)
Peine et exécution des peines
Fraude fiscale : ne bis in idem et exigences posées par la CJUE
Les exigences posées par la Cour de justice de l'Union européenne en matière de cumul de sanctions pénales et fiscales, à savoir, d’une part, la prévisibilité d’un tel cumul, d’autre part, la proportionnalité de la charge finale résultant de l'ensemble des sanctions prononcées à la gravité de l'infraction, ne s'imposent pas lorsque le prévenu est poursuivi uniquement pour des faits de fraude fiscale concernant des impôts qui ne sont pas soumis au droit de l'Union (en l’espèce, impôt sur le revenu et impôt de solidarité sur la fortune). (Crim. 13-12-2023, n° 22-81.985 F-B)
Sécurité intérieure et cybersécurité
Publication du rapport « Vécu et ressenti en matière de sécurité : victimation, délinquance et sentiment d’insécurité »
Le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) a publié son rapport annuel de statistiques intitulé « Vécu et ressenti en matière de sécurité : victimation, délinquance et sentiment d’insécurité » pour l’année 2022. Le rapport se subdivise en quatre thématiques que sont les atteintes aux personnes, les atteintes aux biens, les fiches thématiques et le sentiment d’insécurité et préoccupation sécuritaire. Les trois premières parties rassemblent plusieurs infractions comme les violences physiques, sexuelles, les discriminations, les actes de vandalisme, les vols de vélo ou encore les violences conjugales, tandis que la dernière partie correspond aux opinions sur l’insécurité. Ainsi, ces subdivisions sont illustrées de manière très détaillée par des statistiques concernant, par exemple, les caractéristiques sociologiques des auteurs et des victimes d’infractions, le contexte de l’infraction, ou encore les caractéristiques générales de commission et de condamnation des infractions et le ressenti en matière de sécurité sur des publics différents.
UE : publication d’un règlement en matière de cybersécurité
Des mesures visant à parvenir à un niveau élevé commun de cybersécurité au sein des entités de l’Union sont établies. Elles s’appliquent également au conseil interinstitutionnel de cybersécurité (créé par l’art. 10 du règlement) et au CERT-UE (équipe d’intervention d’urgence informatique). (Règl. [UE/Euratom] 2023/2841 du parlement européen et du Conseil du 13-12-23 établissant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans les institutions, organes et organismes de l’Union)
Pour aller plus loin : voir la revue AJ pénal