Durée du travail
La rémunération au forfait ne peut résulter que d'un accord entre les parties et la convention de forfait doit déterminer le nombre d'heures correspondant à la rémunération convenue, celle-ci devant être au moins aussi avantageuse pour le salarié que celle qu'il percevrait en l'absence de convention, compte tenu des majorations pour heures supplémentaires. Une cour d’appel ne saurait donc débouter le salarié de ses demandes en paiement de diverses sommes au titre des heures supplémentaires, des contreparties en repos obligatoires, des congés payés afférents, à titre de dommages-intérêts pour non-respect des temps de travail et pour travail dissimulé alors qu’elle a relevé que le salarié verse aux débats des bulletins de salaire qui mentionnent un volume horaire de 198,67 heures mensuelles, soit 47 heures supplémentaires (Cass. soc. 30-3-2022 n° 20-18.651 FS-B).
Selon l'article L 3121-4 du Code du travail, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif mais, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit financière. La cour d'appel a, d'abord, énoncé, à bon droit, que la circonstance que certains salariés des sociétés de l'UES ne travaillent pas habituellement au sein de leur agence de rattachement ne dispense pas leur employeur de respecter ces dispositions à leur égard. Elle a, ensuite, appréciant la situation d'un salarié itinérant, défini le lieu habituel de travail comme étant le lieu où se situe son agence de rattachement si tant est que celle-ci se situe à une distance raisonnable de son domicile, de façon à ce que le temps de trajet ainsi déterminé soit équivalent au temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail d'un salarié dans la région considérée. Dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve, elle a estimé que les compensations accordées par la société étaient déconnectées de ces temps normaux de trajet, la « franchise », c'est-à-dire le temps de déplacement excédentaire non indemnisé, de près de 2 heures étant trop importante. Elle a pu en déduire que les contreparties sous forme financière au temps de déplacement professionnel dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, fixées unilatéralement par les sociétés employeurs, méconnaissaient, en raison de leur caractère dérisoire, les dispositions de l'article L 3121-4 du Code du travail et ordonner à ces sociétés de mettre en place un système de contreparties déterminées, région par région, en fonction du temps normal de trajet entre le domicile du salarié et le lieu habituel de travail qu'elle avait défini (Cass. soc. 30-3-2022 n° 20-15.022 FS-B).
L'avenant aux accords collectifs portant sur la réduction de la durée du travail au sein des sociétés Esso SAF/ESSO Raffinage et Exxonmobil Chemical France, du 17 juin 2014, prévoit une réduction du nombre de jours de réduction du temps de travail (JRTT) du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2018 et que celui du personnel en système 3X8 continus appartenant à ERASAS Raffinerie de [Localité 3] est ramené de 13 à 10 jours. Les JRTT ayant pour objet de compenser les heures accomplies au-delà de la durée légale ou conventionnelle de travail, c'est par une exacte application des dispositions conventionnelles que la cour d'appel a décidé que le nombre de JRTT devait être réduit à proportion des absences non assimilables à du temps de travail effectif. Ayant constaté que le salarié avait été absent pour cause de maladie, elle en a déduit à bon droit qu'il ne pouvait prétendre à l'intégralité des jours de RTT prévus par l'accord collectif du 17 juin 2014 (Cass. soc. 30-3-2022 n° 21-10.917 F-D).
Lorsqu'une convention de forfait en heures est déclarée inopposable, le décompte et le paiement des heures supplémentaires doit s'effectuer selon le droit commun, au regard de la durée légale de 35 heures hebdomadaires ou de la durée considérée comme équivalente (nombreux arrêts rendus le 30-3-2022 dont Cass. soc. 30-3-2022 n°s 20-19.849 F-D, 20-19.895 F-D, 20-19.902 F-D, 20-19.906 F-D, 20-19.915 F-D, 20-19.921 F-D et 20-19.929 F-D).
Paie
Ayant relevé que l'obligation à la charge exclusive de l'employeur de cotiser en matière de prévoyance à hauteur de 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond fixé pour les cotisations de sécurité sociale avait été reprise telle quelle par l'accord national interprofessionnel (ANI) relatif à la prévoyance des cadres du 17 novembre 2017, étendu par arrêté du 27 juillet 2018, que les partenaires sociaux avaient conclu dans le cadre de la fusion de l'Agirc et de l'Arrco et constaté que ni cette convention collective ni l'ANI qui la substituait n'excluaient les frais de santé des avantages de prévoyance financés par l'employeur, seule étant prévue une affectation prioritaire de la cotisation à la couverture décès, la cour d'appel en a exactement déduit que, pour vérifier si l'employeur respectait son obligation de cotiser en matière de prévoyance à hauteur de 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond fixé pour les cotisations de sécurité sociale, il devait être tenu compte de la cotisation patronale versée pour le financement de la garantie frais de santé (Cass. soc. 30-3-2022 n° 20-15.022 FS-B).
Il résulte de l'article 3.14 de la convention collective nationale des activités du déchet du 11 mai 2000, que conformément aux dispositions légales, les entreprises définiront, en tenant compte le cas échéant de leurs particularités, des majorations de salaire pour les travaux pénibles ou dangereux, lesquelles s'ajouteront, le cas échéant, à celles prévues par la présente convention collective. Après avoir relevé que le caractère dangereux des produits collectés - aiguilles, seringues, lancettes, cathéters, pansements, gants souillés, poches de sang vides, déchets anatomiques humains, déchets présentant un risque infectieux - n'était pas contesté, la cour d'appel, qui a constaté que les mesures de prévention mises en place par l'employeur ne supprimaient pas le danger, a pu décider que l'activité de collecte, de manipulation et de transport des contenants de ces produits était une activité à risque spécifique, et que les salariés qui y étaient affectés effectuaient un travail dangereux, leur ouvrant droit à la majoration de salaire prévue par la convention collective en contrepartie du travail effectué, majoration, dont elle a, après avoir constaté la carence de l'employeur, et exerçant son office, fixé le montant au vu des éléments fournis par les parties (Cass. soc. 30-3-2022 n° 20-18.537 FS-B).
Rupture du contrat
Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif (Cass. soc. 30-3-2022 n° 20-14.556 FS-D).
Ne constitue pas une clause de non-concurrence la clause faisant interdiction aux salariés, au cours des missions qui leur sont confiées, de solliciter ou de répondre à un client en vue de négocier une éventuelle embauche, ces stipulations s'appliquant uniquement au cours de la relation de travail (nombreux arrêts rendus le 30-3-2022 dont Cass. soc. 30-3-2022 n°s 20-19.831 F-D, 20-19.838 F-D et 20-19.833 F-D).
Représentation du personnel
Si un syndicat peut agir en justice pour faire constater une irrégularité commise par l'employeur affectant le paiement de cotisations de retraite complémentaire d'une catégorie de salariés et demander l'allocation de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif, il ne peut prétendre obtenir la condamnation de l'employeur à régulariser la situation des salariés concernés (Cass. soc. 30-3-2022 n° 20-15.022 FS-B).
Contrôle - contentieux
Dès lors que le salarié contestait l'avis du médecin du travail et que le conseil de prud'hommes, qui avait ordonné l'expertise sollicitée mais également dit n'y avoir pas lieu à référé pour les autres demandes, s'était dessaisi du dossier sans trancher cette contestation ni surseoir à statuer, le salarié avait intérêt à interjeter appel (Cass. soc. 30-3-2022 n° 20-18.150 FS-D).
Une cour d'appel ne peut pas déclarer prescrite l'action de salariés en retenant que le préjudice allégué du fait de l'application d'une clause de loyauté qui serait nulle s'est manifesté au titulaire du droit lors de la signature de son contrat de travail, date à laquelle il a eu connaissance de la clause litigieuse, et non pas à la fin de la relation contractuelle, alors que le dommage causé par la stipulation d'une clause de loyauté illicite ne se réalise pas au moment de la stipulation de la clause mais se révèle au moment de sa mise en oeuvre (nombreux arrêts rendus le 30-3-2022 dont Cass. soc. 30-3-2022 n°s 20-19.840 F-D, 20-19.841 F-D et 20-19.843 F-D).