Des époux signent un contrat de réservation d’un bien immobilier en l’état futur d’achèvement. Pour ouvrir le droit de rétractation, il est procédé à la notification du contrat préliminaire par lettre recommandée avec accusé de réception en un seul exemplaire adressé à « Monsieur et Madame ». Les époux ne se rétractent pas et signent l’acte authentique de vente.
Dans un litige les opposant au vendeur, les acquéreurs invoquent l’irrégularité de la notification : le contrat de réservation aurait dû être notifié à chacun d’eux ou, à défaut, l’avis de réception de la lettre unique aurait dû être signé par les deux époux. L’acte authentique de vente ayant été signé alors que le délai de rétractation n’a pas commencé à courir, il doit être annulé.
La cour d’appel écarte leurs demandes au motif, notamment, que le non-respect du formalisme légal, qui n’a pour but que de protéger le consommateur, n’a causé aucun grief aux époux qui ont bien été informés de la faculté de rétractation qui leur était ouverte et n’ont pas entendu en faire usage.
La Cour de cassation rejette le pourvoi des époux. Par un motif de pur droit, substitué à ceux de la cour d’appel, les Hauts Magistrats relèvent que la signature par les acquéreurs de l’acte authentique de vente sans réserve vaut renonciation à se prévaloir de l’irrégularité de la notification du droit de rétractation prévue à l’article L 271-1 du Code de la construction et de l’habitation.
A noter : l’acquéreur non professionnel d’un bien immobilier à usage d’habitation peut se rétracter dans un délai de 10 jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’avant-contrat (CCH art. L 271-1, al. 1).
En cas de pluralité d’acquéreurs, même solidaires, la notification doit être faite à chacun d’eux. Elle peut néanmoins être adressée par lettre recommandée unique adressée à l’un et l’autre des acquéreurs, à condition que l’accusé de réception porte les deux signatures ou que le signataire unique soit muni d’un pouvoir à l’effet de représenter son coacquéreur (Cass. 3e civ. 9-6-2010 no 09-15.361 : RJDA 11/10 n° 1059).
Au cas particulier, ces procédés n’ont pas été utilisés. La notification de l’avant-contrat était irrégulière, sans conteste. Dès lors, que faire pour sauver la vente ?
Tant que l’acte authentique n’a pas été passé, une notification irrégulière de l’avant-contrat peut toujours être couverte par une nouvelle notification respectant cette fois les formes requises. Et si ce sauvetage n’a pas été effectué, tout n’est pas perdu puisqu’en signant l’acte authentique de vente sans émettre de réserve, l’acquéreur renonce à se prévaloir de l’irrégularité de la purge du droit de rétractation (Cass. 3e civ. 8-7-2014 n° 13-19.330 : Sol. Not. 10/14 inf. 202). La décision commentée confirme cette solution en lui offrant, cette fois, les honneurs du Bulletin.
En pratique, une question reste toutefois posée : cette jurisprudence sera-t-elle maintenue en cas d’omission pure et simple de toute notification ?
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus : voir Mémento Vente immobilière nos 45250 s.