Une société par actions simplifiée (SAS) inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur un bien d'une société civile immobilière (SCI) en garantie d'une créance qui serait née d'un contrat conclu entre elles. La SCI demande la levée de cette hypothèque, soutenant que la SAS ne disposait pas de la personnalité morale lors de la conclusion du contrat litigieux, car l’Insee ne lui avait pas encore attribué un numéro « système d'identification du répertoire des entreprises » (Siren).
La Cour de cassation invalide ce raisonnement. Les sociétés autres que celles en participation jouissent de la personnalité morale à compter de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS). Il en résulte que l'attribution du numéro Siren, qui n'est destiné qu'à l'identification de la société auprès des administrations, ne conditionne pas l'acquisition de sa personnalité juridique.
A noter :
L'immatriculation de la société au RCS donne lieu à l'attribution d'un numéro Siren, numéro unique composé de neuf chiffres. Ce numéro reste attaché à la société même si celle-ci change de dénomination, d'activité ou de siège. Il constitue ainsi la seule donnée intangible permettant aux tiers d'identifier avec certitude la personne morale avec laquelle ils ont été en relation précédemment sous un autre nom ou sous une autre forme. C'est pourquoi un grand nombre de documents (factures, notes de commande, tarifs, documents publicitaires, correspondances et récépissés) émanant d'une société doivent mentionner son numéro Siren sous peine d'une amende de 3 750 € (C. com. art. R 123-237 ; C. pén. art. 131-13 et 131-41).
C'est également l'immatriculation qui fait naître la personnalité morale de la société (C. civ. art. 1842, al. 1 ; C. com. art. L 210-6, al. 1) et donc sa capacité à contracter, même, comme le précise l'arrêt commenté, lorsque aucun numéro Siren ne lui a été encore attribué.
Si le numéro Siren ne conditionne pas l'acquisition de la personnalité morale, il peut néanmoins en constituer la preuve, et la société doit être particulièrement vigilante lorsqu'elle retranscrit le sien, notamment sur des contrats ou des actes de procédure. A ainsi été déclarée nulle l'assignation délivrée par une société désignée non pas sous son numéro d'identification mais sous celui d'une société radiée du RCS ayant les mêmes dénomination, capital et siège qu'elle, sans que la société ne puisse soutenir avoir commis une erreur matérielle (CA Paris 10-9-2008 n° 07-16067 : RJDA 7/09 n° 644). De même, il a été jugé que l'existence juridique et la capacité à contracter d'une société demandant la réalisation forcée de la vente d'un immeuble n'étaient pas démontrées, dès lors que l'offre d'achat du bien litigieux mentionnait un numéro Siren sous lequel aucune société n'était inscrite, numéro qui avait été repris dans tous les actes de la procédure (Cass. com. 3-4-2012 n° 11-14.097 F-D : RJDA 7/12 n° 676). A l'inverse, le fait pour une société d'un groupe de mentionner dans un acte de procédure le numéro d'identification d'une autre société du groupe a été considéré comme une simple erreur matérielle car la société au nom de laquelle l'acte avait été établi y avait indiqué son siège et son établissement secondaire, ce qui suffisait à établir que l'acte émanait bien d'elle (Cass. soc. 12-1-2010 n° 08-45.346 : RJDA 5/10 n° 509).
Documents et liens associés :
Cass. com. 29-11-2023 n° 22-16.463 F-B
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