Les statuts d’une société par actions simplifiée (SAS) peuvent prévoir qu’un associé peut être tenu de céder ses actions dans les conditions qu’ils déterminent (C. com. art. L 227-16, al. 1). Une telle clause ne peut être adoptée ou modifiée que par une décision prise collectivement par les associés dans les conditions et formes prévues par les statuts (C. com. art. L 227-19, al. 2 modifié par loi 2019-744 du 19-7-2019).
Dans une décision très attendue, le Conseil constitutionnel vient de déclarer ces dispositions conformes au droit de propriété, protégé par la Constitution.
On le rappelle, le Conseil était saisi de plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité portant sur leur conformité avec les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, qui protègent le droit de propriété (BRDA 21/22 inf. 2).
Aux termes de ce dernier texte, la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.
Pour le Conseil constitutionnel, les articles L 227-16 et L 227-19, al. 2 du Code de commerce ont pour seul objet de permettre à une SAS d'exclure un associé en application d'une clause statutaire ; s'il en résulte qu'un associé peut être contraint de céder ses actions, ces dispositions n'entraînent donc pas une privation de propriété au sens de l'article 17 de la Déclaration de 1789.
En l'absence d'une telle privation, les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi (Déclaration des droits de l’Homme de 1789 art. 2).
Le Conseil constitutionnel relève que le législateur a poursuivi un objectif d’intérêt général. En permettant à une SAS de contraindre un associé à céder ses actions, il a entendu garantir la cohésion de l'actionnariat de la société et assurer ainsi la poursuite de son activité. En outre, il ressort des travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 2019 que, en prévoyant que l'adoption ou la modification d'une clause d'exclusion puisse être décidée sans recueillir l'unanimité des associés, le législateur a également entendu éviter les situations de blocage pouvant résulter de l'opposition de l'associé concerné à une telle clause.
Par ailleurs, juge le Conseil, les articles L 227-16, al. 1 et L 227-19, al. 2 (en ce qu'il vise les clauses d'exclusion) ne portent pas d’atteinte disproportionnée au droit de propriété pour les raisons suivantes :
il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que la décision d'exclure un associé ne peut être prise qu'à la suite d'une procédure prévue par les statuts. Elle doit reposer sur un motif stipulé par ces derniers, conforme à l'intérêt social et à l'ordre public, et ne pas être abusive ;
l'exclusion de l'associé donne lieu au rachat de ses actions à un prix de cession fixé conformément aux modalités prévues par les statuts de la société, s’il en existe, ou, dans le cas contraire, soit par un accord entre les parties, soit par un expert désigné dans les conditions prévues à l'article 1843-4 du Code civil (C. com. art. L 227-18) ;
la décision d'exclusion peut être contestée par l'associé devant le juge, auquel il revient alors de s'assurer de la réalité et de la gravité du motif retenu. L'associé peut également contester le prix de cession de ses actions.
Documents et liens associés
Cons. const. 9-12-2022 n° 2022-1029 QPC
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