Les gains nets de cession de titres ou droits de PME européennes réalisés par les dirigeants désireux de prendre leur retraite sont, sous certaines conditions, réduits d'un abattement (CGI art. 150-0 D ter). Le bénéfice de l'abattement est notamment subordonné à la double condition que le cédant cesse toute fonction dans la société dont il cède les titres et qu'il fasse valoir ses droits à la retraite « dans les deux ans suivant ou précédant la cession ».
Se prononçant pour la première fois sur cette double condition, le Conseil d'État juge qu'il résulte de ces dispositions légales que la cessation de fonction et le départ à la retraite doivent intervenir au cours de la période de quatre ans allant de deux ans avant à deux ans après la cession. Il précise que ces dispositions n'imposent ni que la cessation de fonction intervienne avant la mise à la retraite ou inversement, ni que ces deux événements interviennent tous deux soit avant, soit après la cession, ni qu'ils se succèdent dans un délai plus rapproché que la période de quatre années.
En l'espèce, le contribuable avait fait valoir ses droits à la retraite le 1er janvier 2009 et vendu la totalité de ses titres de la société le 8 décembre 2010. À partir du 3 janvier 2011, il avait exercé les fonctions de directeur puis de directeur commercial de la société cédée en vertu d'une convention de prêt de main-d'œuvre signée entre cette société et une société du groupe ayant acquis ses titres, dont il était devenu salarié à cette même date. Il avait continué d'exercer ses fonctions jusqu'à la fin de l'année 2012. L'administration avait remis en cause le bénéfice de l'abattement pour durée de détention dont il s'était prévalu au titre de l'année 2011 au motif que plus de deux ans s'étaient écoulés entre son admission à la retraite et la cessation de ses fonctions au sein de la société.
Il résulte des principes énoncés par le Conseil d'Etat qu'en pratique :
- il convient de se placer à la date de la cession pour apprécier si la double condition (cessation de fonction et départ à la retraite) est remplie ;
- la cessation de fonction et le départ à la retraite peuvent légalement intervenir l'un avant la cession, l'autre après, et non pas uniquement soit avant soit après la cession ;
- la cessation de fonction et le départ à la retraite peuvent intervenir à tout moment au cours de la période précitée, y compris le jour de la cession ;
- il peut s'écouler jusqu'à quatre ans entre ces deux événements (la cession se situant dans ce cas au milieu des deux).
A noter : Cette décision, rendue pour l'application du régime en vigueur jusqu'en 2013 (abattement d'un tiers par année de détention à compter de la cinquième), est transposable pour l'application du régime en vigueur de 2014 à 2017 (abattement fixe et abattement proportionnel renforcé) et pour l'application du régime actuel (abattement fixe).
Elle infirme la doctrine administrative aux termes de laquelle la cessation de fonction et le départ à la retraite doivent intervenir tous les deux soit dans les deux années suivant la cession, soit dans les deux années précédant la cession ou éventuellement l'un avant et l'autre après la cession sous réserve qu'il ne s'écoule pas un délai supérieur à deux ans entre les deux événements (Inst. 7-4-2009, 5 C-2-09 nos 10 s. et BOI-RPPM-PVBMI-20-30-30-40 nos 290 s.).
Pour en savoir plus sur l'abattement dirigeant : voir Mémento Fiscal nos 33106 s.