INFRACTIONS
Exercice illégal de la médecine
Tant la cryolipolyse (même à visée seulement esthétique) que le micro-needling (bien que non expressément visé par le texte) constituent des actes médicaux entrant dans les prévisions de l'arrêté du 6 janvier 1962 qui en réserve la pratique aux médecins. Se rend complice d’exercice illégal de la médecine le médecin qui vend à des centres esthétiques les instruments nécessaires à la réalisation de tels actes, dispense des actions de formation auprès des praticiens et apporte son expertise de professionnel pour le suivi de clientes présentant des dommages dans un but uniquement commercial (Cass. crim 31-1-2023 n° 22-83.399 F-B).
Diffamation
Relèvent de la liberté d'expression, garantie par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, les propos - certes attentatoires à l’honneur et à la considération - tenus par un membre de la liste d’opposition au maire qui, dans le contexte d’élections municipales et s’agissant d’un projet de lotissement polémique, s’interroge publiquement, à l’occasion d’un reportage télévisé, sur l’implication de l’adjoint au maire de la commune chargé de l’urbanisme sachant que celui-ci est propriétaire d’une partie des terrains concernés (Cass. crim. 24-1-2023 n° 22-82.722 F-D).
Violences intrafamiliales
Une proposition de loi examinée en première lecture à l’Assemblée nationale souhaite renforcer l’automatisation de la suspension ou du retrait de l’autorité parentale du parent violent en cas de violences intrafamiliales (Proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales, texte n° 658 rectifié). Il s’agirait, d’une part, d’étendre la suspension automatique de l’autorité parentale, pendant le temps de la procédure pénale, aux délits les plus graves, ainsi qu’aux crimes contre l’enfant lui-même. D’autre part, le texte propose de rendre automatique le retrait de l’autorité parentale en cas de condamnation du parent pour viol ou agression sexuelle contre l’enfant ou pour violences volontaires sur l’autre parent.
A noter également, sur le même sujet, l’examen en première lecture à l’Assemblée le 9 février d’une proposition de loi visant à renforcer l’ordonnance de protection, et celui, en deuxième lecture au Sénat le 16 février, de la proposition de loi créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales (Texte 244).
Non-transmission de l'identité du conducteur du véhicule
La règle non bis in idem ne s’applique pas lorsque le responsable légal de la personne morale détenant le véhicule est à la fois déclaré redevable d’une amende pour excès de vitesse et coupable de la contravention de non- transmission de l’identité du conducteur (Cass. crim. 24-1-2023 n° 22-83.011 F-D). En effet, les faits de non-transmission de l'identité et de l'adresse du conducteur sont distincts des faits d'excès de vitesse ayant donné naissance à l'obligation de dénonciation. De plus, la mise à la charge du représentant légal d'une personne morale d'une amende ne met pas en jeu la responsabilité pénale de celui-ci et ne constitue pas, non plus, une sanction ayant le caractère d'une punition.
PEINES ET EXECUTION DES PEINES
Confiscation
Le juge peut ordonner l’une des mesures de confiscation prévues par la loi, sans que le fondement de cette peine doive être au préalable débattu de manière contradictoire, aucun texte ne prévoyant un tel débat contradictoire. C’est ainsi que la cour d’appel a confirmé la confiscation ordonnée par le tribunal sur un fondement textuel différent de celui retenu par les premiers juges, sans avoir préalablement sollicité les observations des parties (Cass. crim. 1-2-2023 n° 22-81.085 FS-B).
Code pénitentiaire
Un arrêté du 23 janvier (publié au journal officiel du 29 janvier) détermine la table des matières des annexes au Code pénitentiaire. Parmi ces volumineuses annexes, se trouvent à la fois des textes nouvellement publiés, tels que la liste des établissements pénitentiaires classées par catégorie (Annexes 1 à 5, attachées aux article D. 112-18 et suivants du code pénitentiaire) ou encore l’arrêté du 23 janvier fixant le siège des services pénitentiaires d’insertion et de probation (Annexe 8, attachée à l’article D. 112-35 du code pénitentiaire), et des textes plus anciens, rattachés au nouveau code (Arrêté 23-1-2023 NOR : JUSK2220140A : JO 29 janvier). Parmi ces anciens textes, on peut noter les arrêtés du 4 octobre 2010 et du 29 décembre 2016 relatifs à l’accessibilité des établissements pénitentiaires aux personnes handicapées, ou encore deux arrêtés relatifs aux ressorts territoriaux des unités hospitalières spécialement aménagées et des unités hospitalières interrégionales sécurisées. Au total, quinze annexes au Code pénitentiaire sont ainsi créées.
PROCEDURE PENALE
Prescription des contraventions
En matière de contravention de voirie routière, les auteurs ou les personnes civilement responsables peuvent être condamnés à la réparation du dommage causé quel que soit le temps écoulé depuis le fait constitutif de la contravention (C. voirie routière, art. L 116-6). Pour autant, cette dernière se prescrit selon les dispositions de l’article 9 du Code de procédure pénale, c’est-à-dire une année révolue à compter du jour de commission (Crim. 31-1-2023 n° 22-83.368 F-B).
Restitution de biens saisis
La chambre criminelle décide pour la première fois que lorsqu’une affaire est classée sans suite, la restitution d’un bien saisi demandée en vertu de l’article 41-4 du Code de procédure pénale ne peut pas être refusée au motif qu’il serait l’instrument ou le produit d’une infraction (Cass. crim. 1-2-2023 n° 22-80.461). Dans cette situation, la restitution ne peut être refusée que si elle est de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens ou lorsqu’une disposition particulière prévoit la destruction du bien.
Appel contre une ordonnance de saisie spéciale
La chambre de l'instruction, saisie de l'appel formé contre une ordonnance de saisie spéciale rendue dans le cadre d'une enquête préliminaire pour des crimes commis à l'étranger et dont les éventuelles poursuites sont conditionnées par la résidence en France de la seule personne mise en cause, est tenue d'examiner les éléments que celle-ci lui soumet en invoquant l'immunité pénale liée aux fonctions qu'elle occupait à la date des faits et à la nature des actes qui lui sont reprochés (Cass. crim. 1-2-2023 n° 22-82.235 F-B). En effet, la règle de l’unique objet n’est pas applicable dans ce cas.
Droit d’appel et pouvoir spécial
La Cour européenne des droits de l’homme condamne la France pour violation de l’article 6 § 1 de la Convention. Elle juge qu’une atteinte disproportionnée au droit d’accès à un tribunal de la requérante a été portée (CEDH 2-2-2023 n° 74530/17, aff. Rocchia c/ France). Cette dernière avait été condamnée à deux ans d‘emprisonnement. Son époux avait fait appel en son nom mais ce recours avait déclaré irrecevable au motif qu’il n’avait pas produit de pouvoir spécial, alors même qu’il résultait des mentions de l’acte d’appel qu’il disposait d’une procuration.
Rapport annuel de la CEDH
La Cour européenne des droits de l’Homme a publié son rapport annuel pour l’année 2022. Sur les 45 500 requêtes attribuées, 39 750 ont été jugées et 35 402 ont donné lieu à une décision d’irrecevabilité ou de radiation.
Sur un total de 1163 arrêts rendus, 25 concernaient la France dans lesquels la Cour a conclu 19 fois à la violation d’au moins un article. Sont concernés en majorité l’article 6 relatif au droit à un procès équitable (4 violations) et l’article 3 relatif aux traitements inhumains et dégradants (3 violations).
DROIT PENAL DES AFFAIRES
Banqueroute
L’omission, manifestement délibérée, de s’acquitter des cotisations sociales dues peut constituer le délit de banqueroute. En effet, en vertu de l’article L 654-2, 3°, du Code de commerce, ce délit peut consister pour l’auteur à augmenter frauduleusement le passif de son entreprise, ce texte n’excluant aucune modalité d’augmentation (Cass. crim. 1-2-2023 n° 22-82.368 F-B).
DROIT PENAL INTERNATIONNAL
Mandat d’arrêt européen
Dans le cadre d’une question préjudicielle introduite par la Cour suprême espagnole, portant sur l’interprétation de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, telle que modifiée par la décision‑cadre 2009/299/JAI du Conseil du 26 février 2009, la Cour de justice de l’Union européenne est venue apporter d’intéressantes précisions en matière de refus d’exécution de mandat, notamment dans l’hypothèse où serait allégué le risque, à la suite de la remise à l’État membre d’émission, d’être jugé par une juridiction dépourvue de compétence à cette fin (CJUE 31-1-2023 aff. C-158/21).
Pour aller plus loin : voir la revue AJ pénal