Un homme consent à l’adoption simple de la fille de son épouse, alors majeure. Par actes notariés, les époux font donation à leur fille de plusieurs biens immobiliers. Deux ans plus tard, l’homme introduit une requête en divorce. Il assigne à cette occasion la fille adoptive en révocation de son adoption simple et en annulation des donations qu’il a consenties. Le motif de ses deux actions est le même : son insanité d’esprit au moment de l’adoption et des donations. La cour d’appel retient l’argument et révoque l’adoption.
La Cour de cassation casse la décision. Elle rappelle tout d’abord que :
- l’adoption est prononcée à la requête de l’adoptant par le tribunal judiciaire (tribunal de grande instance avant le 1er janvier 2020) qui vérifie dans un délai de six mois à compter de sa saisine si les conditions de la loi sont remplies et si l’adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant (C. civ. art. 353, al. 1 ) ;
- s’il est justifié de motifs graves, l’adoption simple peut être révoquée, lorsque l’adopté est majeur, à la demande de ce dernier ou de l’adoptant (C. civ. art. 370, al.1).
Il résulte de ces dispositions que l’intégrité du consentement de l’adoptant, en tant que condition légale à l’adoption, est vérifiée au moment où le tribunal se prononce sur celle-ci. La remise en cause directe du consentement à l’adoption ne peut se faire que par l’exercice des voies de recours contre le jugement et non à l’occasion d’une action en révocation de l’adoption. Cette dernière suppose en effet que soit rapportée la preuve d’un motif grave, résidant dans une cause survenue après le jugement d’adoption et non, comme en l’espèce, au moment du jugement.
À noter : Contrairement à l'adoption plénière, l'adoption simple peut faire l'objet d'une révocation pour motifs graves. Les juges du fond ont un pouvoir souverain d'appréciation de la gravité du motif. Jugé ainsi que constituent des motifs suffisamment graves :
- le comportement de l'adopté qui avait proféré à l'adresse de son père adoptif les injures les plus grossières, avait commis des voies de fait sur sa personne et avait confié qu'il se refusait à porter son nom qu’il estimait déshonorant (Cass. 1e civ. 20-3-1978 n° 76-13415 : Bull. civ. I n° 114) ;
- la mésentente profonde entre l'adopté et l'adoptant, qui tient au moins pour partie à celui-ci, et la nécessité pour l'adopté de préserver la tranquillité et la sérénité de la famille qu'il a créée (CA Rennes 6e ch. 13-5-2002 n° 00-07022).
Dans l’affaire rapportée, les juges du fond avaient retenu comme motif grave l’insanité d’esprit de l’adoptant au moment de l’adoption. Or, comme le relève la Cour de cassation, l’adoption a été prononcée parce que le juge a estimé que les conditions légales étaient réunies, et notamment parce que l’adoptant avait donné son consentement éclairé. Il n’était logiquement pas possible de révoquer l’adoption pour une cause dont la légalité avait été vérifiée par le juge. Si l’intégrité de ce consentement devait être remise en cause, c’est par le biais d’un recours contre le jugement d’adoption qu’il fallait le faire. L’action en révocation, elle, ne peut se justifier que par un motif grave né après le jugement, comme dans les exemples précités.
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Droit de la famille n° 29885
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