En 2013, un particulier achète un climatiseur et conclut avec le vendeur un contrat de maintenance d’un an renouvelable par tacite reconduction. Deux ans plus tard, le vendeur informe son client qu’il ne renouvellera pas ce contrat car des containers-poubelles installés par la commune au pied de l’immeuble rendent désormais inaccessible la partie extérieure du climatiseur. Le client demande au vendeur le remboursement des frais de déplacement de l’unité extérieure et des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de maintenance.
Le juge de proximité de Marseille rejette les demandes : en application de l’article 1186 du Code civil issu de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, le contrat devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît ; si l’accès à la partie extérieure du climatiseur était possible lorsque le contrat d’entretien avait été conclu, la modification de la situation de l’immeuble rendait depuis l’entretien impossible ; la demande du client était donc sans objet.
Cassation de cette décision par la Haute Juridiction. En effet, le juge avait fait application du nouvel article 1186 à un contrat qui, conclu avant le 1er octobre 2016, demeurait soumis à la loi ancienne (Ord. du 10-2-2016 art. 9).
A noter : Stricte application de l’article 9 de l’ordonnance 2016-131 du 10 février. En vertu de ce texte, la réforme du droit des contrats est entrée en vigueur le 1er octobre 2016 et les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne, y compris – a ajouté la loi de ratification 2018-287 du 20 avril 2018 – pour leurs effets légaux et pour les dispositions d’ordre public.
La précision introduite par la loi de ratification est destinée à mettre un terme à la jurisprudence de la Cour de cassation qui a parfois admis l’application des textes issus de l’ordonnance à des contrats en cours lors de son entrée en vigueur (Rapport Sén. n° 22 relatif à la loi 2018-287 du 20-4-2018). Ainsi, après la publication de l’ordonnance, la première chambre civile de la Cour de cassation a procédé à un revirement de jurisprudence en matière de mandat, compte tenu de « l’évolution du droit des obligations résultant de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 », alors que les faits étaient bien antérieurs au 1er octobre 2016 (Cass. 1e civ. 20-9-2017 n° 16-12.906 FS-PB : RJDA 12/17 n° 789).
Par cette nouvelle décision, cette même chambre opte au contraire pour une délimitation stricte de l’application des nouveaux textes dans le temps. A notre avis, cette décision condamne aussi le raisonnement selon lequel une question qui était réglée avant la réforme par la seule jurisprudence (comme en l’espèce) peut donner lieu, en l’absence de loi ancienne, à une application immédiate des textes issus de l’ordonnance pour des faits antérieurs à leur entrée en vigueur.
Il reste que la cassation ici prononcée ne devrait pas avoir d’influence sur le fond du litige puisque, en vertu de la jurisprudence antérieure à la réforme, un contrat dont l’exécution est devenue impossible est caduc (notamment, Cass. 1e civ. 7-11-2006 n° 05-11.775 F-PB : Bull. civ. I n° 457 ; Cass. com. 4-10-2011 n° 10-10.548 F-D : RJDA 1/12 n° 63).
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial nos 10000 et 16000