La dernière loi de simplification du droit des sociétés (Loi 2019-744 du 19-7-2019) n'est pas exempte de maladresses, ainsi que nous l'avons relevé en matière de fusion de sociétés civiles (BRDA 17/19 inf. 22 n° 6) ou d'adoption d'une clause d'exclusion dans les statuts de société par actions simplifiée (BRDA 17/19 inf. 29). Faisant le point sur ces maladresses, des auteurs en ont identifié une autre (A. Couret et C. Barillon, La loi Soilihi et les maladresses du législateur : D. 2019 p. 1717, point de vue), relative à l'interdiction de l'augmentation des engagements des associés sans leur consentement.
Cette loi a complété l'article L 223-30 du Code de commerce concernant le régime des décisions collectives extraordinaires de SARL (règles de majorité pour l'essentiel) par un alinéa aux termes duquel « les décisions prises en violation des dispositions du présent article peuvent être annulées à la demande de tout intéressé » (BRDA 17/19 inf. 31 n° 5). Cette nullité facultative, donc laissée à l'appréciation du juge, sanctionne ainsi l'inobservation de l'article L 223-30, al. 5, qui interdit à la majorité des associés de contraindre un associé (par hypothèse un minoritaire) à augmenter son engagement.
Comme on le sait, l'article 1836, al. 2 du Code civil pose comme principe général que les engagements d'un associé ne peuvent être augmentés sans son consentement. Or, la Cour de cassation considère que ce texte est une « disposition d'ordre public, sanctionnée par une nullité absolue » (Cass. com. 13-11-2003 n° 00-20.646 FS-P : RJDA 5/04 n° 583), ce qui prive à notre avis le juge de la faculté d'apprécier s'il convient ou non de prononcer cette sanction : le juge qui constate que l'engagement d'un associé a été augmenté sans son consentement ne peut que faire droit à la demande d'annulation de cet engagement.
La loi de simplification déroge donc à ce régime de nullité obligatoire pour les décisions collectives de SARL augmentant les engagements d'un associé à la majorité, le juge étant alors libre d'annuler ou non la décision. Cette différence de régime, entre nullité facultative dans les SARL et nullité obligatoire dans les autres sociétés, nous paraît difficilement justifiable et on espère que le législateur mettra fin à cette incohérence à l'occasion du vote d'une prochaine loi de simplification...
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Sociétés commerciales nos 7210 ou 32873