Les dispositions du statut des baux commerciaux concernant la révision du loyer sont applicables aux baux emphytéotiques à caractère commercial (C. com. art. L 145-3).
En 1928, le syndicat des copropriétaires de la Croisette à Cannes donne en location un terrain situé sur la presqu’île de la Croisette, pour une durée de 99 ans et moyennant un loyer annuel de 1 franc, à une société qui y édifie un casino d’été et un complexe de loisirs. Des années plus tard, le bailleur saisit le juge des loyers commerciaux pour obtenir la révision du loyer et sa fixation au montant annuel de 4 200 000 €. La société locataire fait valoir que le bail n’est pas un bail emphytéotique, mais un bail à construction de terrain nu et que l’action en révision devant le juge commercial est irrecevable.
L’argument du locataire est rejeté et le bail est qualifié de bail emphytéotique :
- le contrat, qui prévoyait seulement la faculté de faire édifier tous immeubles et notamment un casino, ne mettait à la charge de la société aucune obligation de construire et, d’autre part ;
- la clause stipulant que, « dans le cas où la ville de Cannes ne donnerait pas à la société les autorisations nécessaires à l’exploitation d’un casino, il est entendu que le présent bail n’aura aucun effet » n’était pas une clause résolutoire mais une condition concernant l’exploitation du casino et n’édictait aucune obligation de construire.
A noter : Le bail emphytéotique d’un immeuble est un contrat d’une durée comprise entre 18 et 99 ans, par lequel le bailleur confère au locataire un droit réel susceptible d’hypothèque (C. rur. art. L 451-1), alors que le bail à construction est un bail par lequel le locataire s’engage, à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état d’entretien pendant toute la durée du bail (CCH art. L 251-1, al. 1). Il en résulte que seul le locataire à construction se voit imposer une obligation essentielle de construction sur le terrain loué. Il a déjà été jugé que, en présence d’une simple faculté pour le locataire d’édifier toutes constructions à usage commercial ou industriel, sans aucune obligation de construire, il ne peut s’agir d’un bail à construction mais d’un bail emphytéotique (Cass. 3e civ. 11-6-1986 no 84-17.222 : Bull. civ. III no 93).
Au cas particulier, le bail prévoyait simplement une faculté de construction pour le locataire et envisageait le cas où cette faculté serait utilisée, mais il ne s’agissait nullement d’une obligation.
Sophie CLAUDE-FENDT