Une mère, administratrice légale sous contrôle judiciaire, ouvre un compte de dépôt au nom de son enfant mineur dans une banque. Elle dépose sur ce compte 20 000 € provenant de la succession du père du mineur. Sur une période de quatre ans, elle effectue plusieurs prélèvements sur ce compte à son profit pour un montant total de plus de 14 000 € (dont 4 200 € en une semaine). Le mineur est mis sous tutelle et le tuteur met alors en cause la responsabilité de la banque pour manquement à son obligation de vigilance et demande le remboursement des sommes prélevées par la mère.
Une cour d’appel fait droit à cette demande aux motifs que les prélèvements effectués par la mère par retraits et virement à hauteur de 4 200 € auraient dû, par leur répétition, leur importance et la période resserrée d’une semaine sur laquelle ils ont eu lieu, attirer l’attention de la banque et entraîner une vigilance particulière de sa part, s’agissant d’un compte ouvert au nom d’un mineur soumis à une administration légale sous contrôle judiciaire.
La Cour de cassation censure cette décision : l’administrateur sous contrôle judiciaire peut recevoir les capitaux échus au mineur et les retirer du compte de dépôt sur lequel il les a versés et la banque, dépositaire de fonds appartenant à un mineur, n’est pas garante de leur emploi.
A noter : confirmation de jurisprudence (Cass. 1e civ. 20-3-1989 n° 87-15.899 : D. 1989 p. 406 note J. Massip).
Rendue sous le régime de l'administration légale sous contrôle judiciaire, la solution est à notre avis transposable sous le régime de l’administration légale issu de l'ordonnance 2015-1288 du 15 octobre 2015, qui a fusionné l’administration légale pure et simple et l’administration légale sous contrôle judiciaire. En effet, bien qu’aucun texte ne le prévoie, le parent exerçant seul l’autorité parentale peut effectuer seul les actes d’administration car il ne doit agir avec l'autorisation du juge des tutelles que pour certains actes de disposition limitativement listés à l'article 387-1 du Code civil. En outre, si les dispositions de l’article 499 du Code civil ne sont pas applicables à la nouvelle administration légale en raison de la suppression du renvoi vers ce texte, il résulte du nouvel article 387-3 du Code civil que seuls sont garants de la gestion des biens du mineur par l’administrateur légal les tiers qui n'ont pas signalé au juge les actes ou omissions dont ils ont eu connaissance et qui compromettent manifestement et substantiellement les intérêts patrimoniaux du mineur ou une situation de nature à porter un préjudice grave à ceux-ci. En l’espèce, la cour d’appel avait retenu que la banque aurait dû être alertée par les retraits importants effectués sur une semaine ; la Cour de cassation n’a pas suivi ce raisonnement.
A notre avis, la responsabilité de la mère aurait pu être engagée par le tuteur sur le fondement de l'article 412 du Code civil (sur renvoi de l'ex-art. 386-7) pour avoir commis une faute dans la gestion des capitaux du mineur. Le nouveau régime de l'administration légale prévoit la même sanction (C. civ. art. 386).
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 1038