Au cours de leur vie commune, deux concubins souscrivent un prêt pour financer l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit de la maison qu’ils occupent. Celle-ci appartient à la concubine et à son époux, dont elle est séparée. C’est la concubine qui rembourse le crédit, y compris après sa séparation d’avec son concubin en octobre 2011. Mais en septembre 2013, elle cesse ses règlements et le prêteur se retourne contre l’ex-concubin coemprunteur. En juillet 2014, ce dernier assigne son ex-concubine et son époux pour obtenir, sur le fondement de l’enrichissement sans cause, le remboursement des sommes qu’il a réglées au titre de l’emprunt.
La cour d’appel de Montpellier fait droit à sa demande. Constatant qu’il s’est appauvri en assumant le paiement des échéances du prêt tandis que les époux se sont enrichis corrélativement par la revente d’électricité et l’amélioration de leur habitat, la cour d’appel condamne les époux à lui payer les mensualités du prêt qu’il a prises en charge, lesquelles représentent le montant de son appauvrissement.
La Cour de cassation casse l’arrêt. Selon l’article 1371 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, l’indemnité due au titre de l’enrichissement sans cause est égale à la plus faible des deux sommes représentatives l’une de l’appauvrissement et l’autre de l’enrichissement subsistant dans le patrimoine de l’enrichi à la date de l’exercice de l’action. La cour d’appel aurait donc dû rechercher quels étaient, au jour de l’introduction de l’instance, le montant de la plus-value immobilière apportée à la maison par l’installation photovoltaïque ainsi que celui des bénéfices tirés de la revente d’électricité, afin de fixer l’indemnité à la moins élevée des deux sommes représentatives de l’enrichissement et de l’appauvrissement. En se contentant de fixer l’indemnité au montant de l’appauvrissement, correspondant au règlement par l’ex-concubin des échéances du prêt, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
A noter :
Dans cette affaire, les faits étaient antérieurs à l’entrée en vigueur de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats. La décision est donc rendue sur le fondement de l’article 1371 du Code civil dans sa rédaction antérieure à ladite ordonnance. Elle confirme une solution affirmée à plusieurs reprises par la Cour de cassation : l’indemnité d’enrichissement sans cause est égale à la plus faible des deux sommes que représentent l’enrichissement du débiteur et l’appauvrissement du créancier (Cass. 1e civ. 24-9-2014 n° 13-23.913 F-D ; Cass. 1e civ. 24-5-2017 n° 13-10.237 F-D). Cette solution a été reprise par l’article 1303 du Code civil issu de l’ordonnance de 2016, lequel a consacré, sous la nouvelle appellation d’« enrichissement injustifié », la théorie de l’ « enrichissement sans cause » élaborée par les tribunaux pour permettre à une personne ayant procuré un avantage à une autre d’être indemnisée.
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