La caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution (C. civ. art. 2314).
Une société demande à une banque un prêt destiné à financer l’acquisition d’actions d’une autre société. La banque obtient le cautionnement du gérant de la société et, six jours après, elle accorde le prêt demandé, également garanti par le nantissement des actions acquises. Deux ans plus tard, la société cède une partie de ces actions et la banque vire le prix de cette cession sur le compte de la société, renonçant ainsi au nantissement dont elle bénéficiait en garantie du prêt.
Poursuivie en exécution de son engagement, la caution fait valoir qu'elle est libérée, sur le fondement de l'article 2314 du Code civil, car elle a été privée de la possibilité de se voir subrogée dans les droits de la banque, qui n'avait pas mis en œuvre le nantissement lors de la vente des actions.
Une cour d’appel fait droit à la demande de décharge de la caution, retenant que cette dernière, gérant de la société bénéficiaire du prêt cautionné, connaissait parfaitement l'existence du nantissement pris en garantie et qui avait été formalisé dans l'acte de prêt conclu six jours après son engagement de caution et dont les conditions étaient nécessairement arrêtées et connues à la date du cautionnement souscrit.
Arrêt cassé par la Haute Juridiction : la caution n'est libérée, lorsque la subrogation aux droits, privilèges et hypothèques du créancier ne peut plus s'opérer en sa faveur, que si ces garanties existaient antérieurement à son engagement ou étaient entrées dans les prévisions des parties. La cour d’appel, qui avait constaté que le nantissement des actions avait été consenti à la banque après le cautionnement, aurait dû rechercher si la banque s'était engagée à l'obtenir ou si la caution avait légitimement pu croire qu'elle le prendrait.
A noter : Confirmation de jurisprudence.
La caution ne peut invoquer le bénéfice de l'article 2314 (ex-art. 2037) du Code civil que si la sûreté perdue existait au moment du cautionnement ou si le créancier s'était engagé à la constituer ou encore si des circonstances particulières pouvaient laisser la caution légitimement penser que le créancier la constituerait (notamment, Cass. 1e civ. 29-2-2000 n° 97-20.090 P-B : RJDA 5/00 n°599 ; Cass. com. 8-10-2003 n° 00-12.418 F-D : RJDA 3/04 n° 367).
Jugé que la seule référence à la nature d'un prêt est insusceptible, en l'absence d'une mention figurant dans l'acte de cautionnement, ou dans un acte antérieur ou concomitant afférent à l'opération de crédit, de caractériser la croyance légitime dans le fait que le créancier prendrait d'autres garanties (Cass. 1e civ. 29-2-2000 n° 97-20.090 P-B précité).
L’arrêt ci dessus, qui refuse de se fonder sur la simple connaissance par la caution de l’existence du nantissement formalisé quelques jours après la signature du cautionnement, se situe dans le droit-fil de cette jurisprudence.
Sophie CLAUDE-FENDT
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 55817