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Un cautionnement jugé disproportionné malgré les mentions de la fiche de patrimoine de la caution

Le patrimoine de la caution, mariée sous le régime de la communauté, était moindre que ce qu'indiquait la fiche de renseignements, des biens propres de son conjoint ayant été mentionnés. Face à cette anomalie apparente, la banque aurait dû faire des vérifications.

CA Versailles 10-3-2020 n° 19/01224


Une banque consent un prêt à une société qui exploite une auto-école. La gérante, mariée sous le régime de la communauté, se porte caution du remboursement de ce prêt à hauteur de 97 500 €. La société ayant été placée en liquidation judiciaire alors qu'une somme de 42 200 € restait due à la banque au titre du prêt, cette dernière en demande paiement à la caution. 

La cour d'appel de Versailles juge que la banque ne pouvait pas se prévaloir de ce cautionnement, qui était disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution pour les raisons suivantes.

La fiche de patrimoine remplie par la caution avant la signature de son engagement comportait les mentions suivantes : la caution était mariée et propriétaire de son logement, évalué à 240 000 €, ainsi que d'un appartement, estimé à 200 000 € ; elle était titulaire d'une assurance-vie de 50 000 € ; ses revenus annuels s'élevaient à 30 000 €, outre 6 000 € de revenus locatifs, et elle remboursait deux prêts à la consommation (capital restant dû supérieur à 50 000 €) et trois prêts immobiliers (capital restant dû supérieur à 250 000 €).

Sur cette fiche, ni la mention relative au régime matrimonial ni la case « BC » (biens de communauté) n'avaient été remplies. S'agissant d'une anomalie apparente, il appartenait à la banque de faire ajouter ces mentions par la caution et de vérifier la propriété des éléments de patrimoine déclarés. 

La caution démontrait que sa situation financière était moins favorable que ce qui avait été déclaré : son époux était propriétaire du contrat d'assurance-vie précité, qu'il avait donné en nantissement à la même banque en garantie d'un prêt antérieur et il avait acquis seul, avant leur mariage, l'appartement évalué à 200 000 €, au moyen d'un prêt de cette même banque. Il résultait de ces éléments que la banque, bénéficiaire du nantissement et établissement prêteur, savait que la caution n'était pas propriétaire de tous les biens déclarés.

Abstraction faite des biens propres du conjoint de la caution :

- les revenus à prendre en considération étaient de 27 520 € pour la caution et de 27 000 € pour son conjoint, outre 5 844 € de revenus de capitaux mobiliers ;

- le patrimoine net de la caution pouvait être évalué à 50 369 €.

Dans ces conditions, le cautionnement de 97 500 € était manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution.

La cour d'appel a par ailleurs condamné la banque à payer à la caution 3 000 € de dommages-intérêts et 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A noter : Lorsqu'une personne physique s'est portée caution à l'égard d'un créancier professionnel, ce dernier ne peut pas se prévaloir du cautionnement s'il était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution (C. consom. art. L 332-1 et L 343-4). Ces dispositions bénéficient au dirigeant personne physique (Cass. com. 22-6-2010 n° 09-67.814 : RJDA 11/10 n° 1106).

Le créancier n'est tenu de vérifier les biens et revenus déclarés par la caution qu'en présence d'anomalies apparentes (Cass. com. 14-12-2010 n° 09-69.807 F-PB : RJDA 4/11 n° 348 ; Cass. com. 24-1-2018 n° 16-15.118 F-D : RJDA 4/18 n° 361).

Lorsque le cautionnement a été souscrit par un époux commun en biens ayant obtenu le consentement de son conjoint, la disproportion s'apprécie au regard du seul époux caution et tant au regard de ses biens et revenus propres que de ceux de la communauté (Cass. com. 22-2-2017 n° 15-14.915 F-PB : RJDA 5/17 n° 370). C'est à cette analyse que la cour d'appel de Versailles s'est en l'espèce livrée, les biens propres du conjoint étant exclus. 

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 55100

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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