Une procédure collective ouverte à l’égard d’une entreprise peut être étendue à une autre personne en cas de confusion de leurs patrimoines résultant de relations financières anormales entre elles (C. com. art. L 621-2, L 631-7 et L 641-1).
L’associé gérant d’une SARL de construction procède, depuis les comptes bancaires de la société, à d’importants retraits en espèces et virements non justifiés à son profit. Il inscrit ces sommes sur son compte courant d’associé, qui devient débiteur à hauteur de 88 000 €. La société est par la suite placée en liquidation judiciaire et le liquidateur demande que la procédure collective soit étendue à l'associé gérant.
Une cour d’appel estime que la confusion de patrimoines n’était pas caractérisée car le solde débiteur du compte courant d'associé, sur lequel les sommes litigieuses avaient été inscrites, constituait pour la société une créance contre l’intéressé.
Censure de cette décision par la Cour de cassation (Cass. com. 13-9-2023 n° 21-21.693 F-D) : l’inscription de ces sommes sur le compte courant d’associé n’était pas de nature à exclure l’anormalité des virements et retraits effectués sans contrepartie au profit de l'associé gérant. La cour d’appel ne pouvait donc pas écarter la confusion des patrimoines pour ce seul motif.
A noter :
1° L’existence d’un compte courant débiteur peut être prise en compte pour caractériser la confusion des patrimoines d’une société et de son dirigeant. La confusion a été reconnue dans un cas où un gérant avait fait supporter des dépenses personnelles somptuaires à la société, laissé croître son compte courant débiteur et s’était octroyé une indemnité non autorisée alors que la société était en cessation des paiements (Cass. com. 7-11-2018 n° 17-21.284 F-D : RJDA 2/19 n° 103).
C’est le contraire qu’avait retenu la cour d’appel en l’espèce en jugeant que l’existence d’un compte courant débiteur, quoique pénalement réprimée, écartait par nature l’existence d’une confusion de patrimoines.
La décision commentée rappelle que, par l'inscription des sommes au compte courant, l’associé gérant se reconnaissait certes débiteur de la société, mais que ce fait ne pouvait pas à lui seul justifier les versements à son profit (par exemple, en caractérisant l’existence d’une contrepartie) et ne suffisait donc pas à exclure l’anormalité de ces versements.
2° Il est interdit aux gérants et associés personnes physiques de SARL de se faire consentir par elle des emprunts ou des découverts en compte courant (C. com. art. L 223-21, al. 1). De tels emprunts ou découverts sont frappés de nullité absolue (C. com. art. L 223-21, al. 1 ; Cass. com. 25-4-2006 n° 05-12.734 F-D : RJDA 8-9/07 n° 858). Des sanctions pénales peuvent en outre s’appliquer si les faits constituent un abus de bien social (C. com. art. L 241-3 ; pour un exemple, voir Cass. crim. 27-4-2000 n° 99-83.515 D : RJDA 11/00 n° 997).
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