La liquidation judiciaire d'une société étendue à sa mère en raison de flux financiers inexpliqués
CA Paris 7-9-2021 n° 20/18226
Une procédure collective ouverte à l'égard d'une entreprise peut, on le sait, être étendue à une autre personne en cas de confusion de leurs patrimoines résultant de relations financières anormales entre elles (C. com. art. L 621-2, L 631-7 et L 641-1).
La cour d’appel de Paris a étendu la liquidation judiciaire d’une SARL exploitant un restaurant à l’associé unique de celle-ci, une société ayant le même siège social et le même gérant, estimant qu’il existait entre ces sociétés des flux financiers anormaux. Les relevés bancaires de la SARL avaient fait apparaître des paiements récurrents au profit de la société mère (virements permanents de 930 € et virements ponctuels plus importants, le total des paiements s'élevant à près de 23 000 € en deux ans). La SARL expliquait ces virements en produisant une convention de gestion de trésorerie entre elle et sa société mère, par laquelle chaque partie s'engageait à mettre à la disposition de l'autre ses excédents de trésorerie ; mais cette convention, communiquée très tardivement, n’avait pas date certaine et son existence à la date des paiements n’était corroborée par aucun élément ; en outre, elle avait été signée au nom de toutes les parties par le même gérant et contenait divers éléments non renseignés, tels le montant maximal des avances susceptibles d'être consenties et le taux de rémunération des fonds prêtés ; un récent contrôle fiscal de la SARL avait fait apparaître que celle-ci n’avait tenu aucune comptabilité.
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A noter :
La confusion de patrimoines entre des sociétés est caractérisée lorsqu’il existe entre elles des relations financières incompatibles avec des obligations réciproques normales (Cass. com. 27-9-2016 n° 14-29.278 F-PB : RJDA 12/16 n° 880).
Tel est le cas de deux sociétés ayant une gestion commune, dès lors que l’une d'elles avait réalisé des avances de fonds, sans contrepartie, au profit de la seconde et que les paiements aux tiers étaient effectués indifféremment par l’une ou l’autre en fonction de leur situation financière (Cass. com. 3-4-2001 n° 719 : RJDA 8-9/01 n° 874).
En revanche, la confusion de patrimoines a été écartée dans un cas où les versements entre sociétés du même groupe étaient effectués en application d’une convention de gestion de trésorerie, par laquelle elles mettaient leurs excédents de trésorerie à la disposition des autres sociétés au moyen d’avances en compte courant, dès lors que ces avances avaient pour contrepartie la facturation d’intérêts et n’excédaient pas les capacités financières des sociétés concernées (CA Versailles 2-4-2002 n° 00-3930 : RJDA 11/02 n° 1150).
Dans l'affaire commentée, les éléments de fait laissaient penser que la convention avait été établie pour les besoins de la cause, afin de justifier les paiements entre les sociétés concernées et d'éviter l’extension de la liquidation judiciaire.