Le dirigeant d'une société en liquidation judiciaire peut être condamné à supporter l'insuffisance d'actif de la société s'il a commis une ou plusieurs fautes de gestion y ayant contribué (C. com. art. L 651-2).
La cour d'appel de Paris a été appelée à rappeler que la faute de gestion doit avoir été commise avant l'ouverture de la liquidation judiciaire dans l'affaire suivante. Une SARL spécialisée dans le commerce d'œuvres d'art et de bijoux est placée en liquidation judiciaire après que son gérant et associé unique a déclaré la cessation des paiements. Reprochant notamment à ce dernier de ne pas avoir coopéré aux opérations de la procédure collective, le liquidateur le poursuit en responsabilité pour insuffisance d'actif.
La cour d'appel de Paris rejette la demande du liquidateur : le défaut de coopération avec les organes de la procédure collective étant nécessairement postérieur au jugement d'ouverture de cette procédure, il ne peut pas constituer une faute de gestion donnant lieu à responsabilité pour insuffisance d'actif.
La cour d'appel ajoute que le liquidateur, qui entendait en réalité stigmatiser les manquements du gérant dans la disparition des actifs de la société avant sa mise en liquidation judiciaire, ne démontrait aucune faute de gestion en ce sens. En effet, la cession du droit au bail opérée avant l'ouverture de la procédure par le gérant, dont il n'était pas établi qu'il en avait personnellement tiré profit, avait permis d'apurer une partie du passif de la société. Par ailleurs, le fait que le stock de la société avait, après cette cession, été entreposé dans les locaux d'une société tierce et vendu par elle pour non-paiement des factures de location de ces locaux par le gérant ne pouvait pas être imputé à ce dernier, qui s'était vivement opposé à cette vente.
A noter :
La responsabilité pour insuffisance d'actif des dirigeants ne peut concerner que leur gestion antérieure au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire (cf. Cass. com. 28-2-1995 n° 92-18.572 D : RJDA 5/95 n° 651 ; Cass. com. 14-3-2000 n° 97-17.753 P : RJDA 7-8/00 n° 788 ; Cass. com. 29-11-2016 n° 15-10.466 F-D : RJDA 2/17 n° 104). Elle peut être engagée à raison des fautes commises entre l'ouverture du redressement et celle de la liquidation judiciaire qui lui a succédé (Cass. com. 22-1-2020 n° 18-17.030 F-PB : RJDA 4/20 n° 231). L'arrêt commenté s'inscrit dans le droit-fil de cette jurisprudence.
L'absence de coopération avec les organes de la liquidation peut toutefois justifier le prononcé contre lui d'une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer, si le liquidateur prouve que cette absence est volontaire et qu'elle fait obstacle au bon déroulement de la procédure (C. com. art. L 653-5, 5° et L 653-8).