A l'occasion d'une foire, un particulier conclut un contrat portant sur l'acquisition, l'installation et la mise en service de panneaux photovoltaïques. Invoquant des carences dans les mentions devant figurer dans le bon de commande, il agit contre le vendeur en annulation du contrat et en réparation de son préjudice.
La Cour de cassation fait droit à sa demande : il résulte de la combinaison de l'article L 111-1 du Code de la consommation, qui n'assortit pas expressément de la nullité du contrat le manquement aux obligations d'information précontractuelle qu'il énonce, et de l'article 1112-1 du Code civil, qu'un tel manquement du professionnel à l'égard du consommateur entraîne néanmoins l'annulation du contrat, dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants du Code civil (relatifs aux vices du consentement), si le défaut d'information porte sur des éléments essentiels du contrat.
En l'espèce, le vendeur n'avait pas satisfait aux obligations d'information précontractuelle prévues à l'article L 111-1 du Code de la consommation dès lors que ni les caractéristiques essentielles des produits achetés ni le délai de livraison et d'installation de ces produits n'avaient été précisément mentionnés sur le bon de commande. Le consentement de l'acheteur avait donc nécessairement été vicié pour procéder d'une erreur.
Par suite, le contrat de vente devait être annulé.
A noter :
Deux obligations générales d'information précontractuelle pèsent sur le professionnel :
la première est issue de l'article 1112-1 du Code civil, régissant le droit commun des contrats, qui prévoit que la partie qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière l'ignore ou fait confiance à son cocontractant ;
à cette obligation générale de droit commun se superpose une obligation générale d'information prévue par le Code de la consommation et uniquement applicable dans les relations entre professionnels et consommateurs. Cette obligation est régie par les articles L 111-1 à L 111-5 du Code de la consommation, dont les dispositions sont d'ordre public (C. consom. art. L 111-8). Elle recoupe pour partie l'obligation de droit commun. Elle a le mérite d'être écrite, plus précise et vise à protéger le consentement du consommateur en instaurant des pratiques contractuelles standardisées.
Ces obligations doivent être combinées avec les règles particulières propres à certains contextes ou activités, ici avec les règles d'informations prévues pour les contrats conclus dans les foires (C. consom. art. L 224-59 à L 224-62-1).
En l'espèce, la nullité du contrat était demandée sur le fondement des articles 1112-1 du Code civil et L 111-1 du Code de la consommation. Or, aucun de ces articles ne frappe expressément de nullité le contrat en cas de défaut d'information, l'article 1112-1 se contentant de prévoir que, outre la responsabilité de celui qui en est tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants du Code civil, soit celles relatives aux vices du consentement.
La Cour de cassation avait jugé à plusieurs reprises que la nullité ne résulte pas du seul manquement à l'obligation précontractuelle d'information du Code civil ou du Code de la consommation (Cass. 1e civ. 15-12-1998 n° 96-19.898 P : RJDA 8-9/99 n° 1021 ; Cass. com. 28-6-2005 n° 03-16.794 F-PB : RJDA 12/05 n° 1314 ; Cass. 1e civ. 28-5-2009 n° 08-16.263 F-D) mais qu'elle est subordonnée à la preuve d'un vice du consentement. Cette preuve incombe normalement à celui qui s'en prévaut et donc, en l'espèce, au consommateur (Cass. 1e civ. 28-10-2009 n° 08-19.303 F-D : RJDA 3/10 n° 231).
Elle s'était cependant déjà prononcée en sens contraire, retenant que l'absence d'une mention prescrite par une disposition d'ordre public du droit de la consommation (en l'espèce celles rendues obligatoires dans certains contrats de vente de meubles par le décret du 86-583 du 14-3-1986) entraînait la nullité du contrat en vertu de l'article 6 du Code civil, lequel interdit de déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l'ordre public (Cass. 1e civ. 7-12-2004 n° 01-11.823 : Bull. I n° 303).
Dans une affaire où le prix de la prestation n'avait pas été communiqué au consommateur, la Haute Juridiction avait par ailleurs jugé qu'il pouvait être déduit de cette violation par le professionnel de la disposition d'ordre public relative à l'information du consommateur que le consentement de ce dernier sur un élément essentiel du contrat avait nécessairement été vicié (Cass. 1e civ. 14-11-2018 n° 17-21.696 F-D).
L'arrêt commenté nous paraît s'inscrire dans la ligne de ce courant favorable au consommateur : se fondant sur le texte du Code civil et celui du Code de la consommation, la Cour de cassation juge ainsi que, en l'absence d'information du consommateur sur les éléments essentiels du contrat, le consentement de ce dernier avait forcément été vicié, pour procéder d'une erreur.
La solution est d'autant plus remarquable qu'un vice du consentement ne semblait pas avoir été expressément constaté par les juges d'appel (devant lesquels un tel vice ne semblait d'ailleurs pas explicitement allégué). Les juges du fond avaient cependant constaté qu'en l'état de l'information donnée au consommateur il était impossible pour celui-ci d'évaluer certaines des caractéristiques essentielles des produits.
Il n'en reste pas moins qu'il est difficile d'en évaluer la portée. Tout défaut d'information sur des éléments essentiels du contrat sera-t-il désormais sanctionné par la nullité ? Quels sont les éléments essentiels susceptibles de déclencher une telle sanction (la Cour vise les caractéristiques essentielles du bien ou service et le délai de livraison, mais il ne s'agit pas d'une liste exhaustive) ? Enfin, on peut imaginer que la solution, rendue par application des dispositions du Code civil et du Code de la consommation, sera réservée aux contrats conclus avec un consommateur, mais l'arrêt ne le dit pas expressément.