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Délais de paiement : le montant dû n'est pas limité à la contrepartie de la prestation principale

Les sommes que le débiteur s'est contractuellement engagé à rembourser au créancier au titre des coûts supportés par ce dernier liés à l'exécution du contrat sont soumises à la réglementation des délais de paiement.

CJUE 12-12-2024 aff. 725/23, M. sp. z.o. o. I. S. K. A. c/ R. W.


Par Laurianne CARREL
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©Getty Images

Dans les transactions commerciales entre professionnels, le créancier peut réclamer des intérêts pour retard de paiement sans qu’un rappel soit nécessaire dès lors que le créancier a rempli ses obligations et qu’il n’a pas reçu le « montant dû » à l’échéance, sauf si le débiteur n’est pas responsable du retard (Dir. 2011/7/UE du 16-2-2011 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales art. 3). Lorsque des intérêts de retard sont exigibles, le créancier peut obtenir du débiteur, comme minimum, le paiement d’un montant forfaitaire de 40 € (art. 6, 1) à titre d’indemnisation pour les frais de recouvrement exposés (considérant 19).

Le « montant dû » s’entend du montant principal qui aurait dû être payé dans le délai de paiement contractuel ou légal, y compris les taxes, droits et redevances ou charges applicables figurant sur la facture ou la demande de paiement équivalente (Dir. 2011/7/UE art. 2, 8).

Le propriétaire d’un local situé en Pologne résilie le bail commercial qui le liait à son locataire et agit contre ce dernier en paiement, d’une part, de factures correspondant à des loyers impayés et au remboursement de charges locatives et autres frais connexes avancés par le propriétaire (chauffage, électricité, charges communes liées à l’immeuble, taxes communales, etc.) et, d’autre part,  d’un montant forfaitaire de 40 € par facture non payée à l’échéance prévue.

Dans ce contexte, la CJUE est saisie par un juge polonais de la question suivante : le champ d’application de la directive sur les délais de paiement est-il limité aux paiements effectués « en rémunération de transactions commerciales », de sorte que la notion de « montant dû » ne viserait que le montant destiné à rémunérer la prestation propre du créancier, c’est-à-dire la fourniture d’une marchandise ou la prestation d’un service (en l’espèce, le loyer), et n’inclurait pas les paiements effectués à d’autres fins, tels que les remboursements de dépenses ou d’autres frais exposés par le créancier dans l’exécution du contrat, lorsque ces éléments sont séparés en vertu dudit contrat (telles les charges locatives) ? Dans l’affirmative, les intérêts de retard et l'indemnité forfaitaire ne seraient dus qu’en cas de loyers impayés à l’échéance.

Cette notion couvre-t-elle, au contraire, également les sommes que le débiteur s’est engagé par contrat à rembourser au créancier au titre des coûts supportés par ce dernier liés à l’exécution du contrat ?

La CJUE se prononce en faveur de cette dernière solution. Le « montant dû » n’est donc pas limité à la contrepartie de la prestation principale fournie par le créancier. Il en résulte que le débiteur peut être tenu de payer des intérêts de retard en cas de non-remboursement à l’échéance des charges locatives et frais connexes liés l’immeuble dont il est locataire s’il s’y est engagé par contrat, intérêts auxquels peut valablement s’ajouter un montant forfaitaire de 40 € par facture impayée à titre d’indemnisation des frais de recouvrement de ces sommes.

A noter :

1° La CJUE considère que le législateur européen a conféré une large portée à la notion de « montant dû » au titre des retards de paiement pour décourager le débiteur de procéder à un paiement tardif et protéger le créancier des conséquences préjudiciables en résultant. En effet, d’une part, le recours, par ce législateur, à l’expression « y compris » indique qu’il a entendu dresser une liste non exhaustive de plusieurs éléments susceptibles de relever de la notion de « montant dû », d’autre part, le fait que soient inclus dans cette liste notamment les « taxes, droits, redevances ou charges applicables » tend à démontrer qu’il a voulu viser également des montants distincts du montant principal versé en contrepartie de la prestation caractéristique de la relation contractuelle, mais qui sont néanmoins liés à celle-ci et que le débiteur s’est engagé à rembourser. 

2° Cette solution inédite est applicable à l'article L 441-10 du Code de commerce relatif aux délais de paiement entre entreprises, ce texte étant la transposition de la directive 2011/7/UE, à la lumière de laquelle il doit donc être interprété. 

Documents et liens associés : 

CJUE 12-12-2024 aff. 725/23

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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