Un studio acheté en 2007, donné à bail commercial à une société exploitant une résidence de vacances, est revendu en 2011 à un acquéreur qui exerce une activité de loueur en meublé. La vente est placée sous le régime de l’article 257 bis du CGI qui prévoit une dispense du paiement de la TVA lors de la vente d’un immeuble affecté à une activité de location avec reprise par l’acquéreur des baux soumis à TVA, sous réserve notamment que l’opération intervienne entre deux assujettis redevables de la taxe. L’acte de vente mentionne que le notaire a informé le vendeur assujetti et redevable de la TVA que la taxe antérieurement déduite peut être exigée en cas de revente du bien intervenant avant l’expiration du délai de régularisation de vingt ans ; il mentionne également la dispense de régularisation qui s’applique lorsque les conditions de l’article 257 bis du CGI sont réunies. L’acquéreur s’est engagé dans l’acte à reprendre les baux en cours et à poursuivre l’activité passible de la taxe jusqu’à l’expiration du délai de régularisation, sous peine de régularisation de la TVA initialement déduite le cas échéant.
À l’issue d’un contrôle fiscal du vendeur, l’administration remet en cause l’application de la dispense de TVA à cette opération : elle relève qu’au jour de la vente, l’activité de loueur en meublé de l’acquéreur était soumise au régime de la franchise en base (CGI art. 293 B) et que ce dernier n’a opté pour l’assujettissement à la TVA que lorsqu’il a été informé du contrôle fiscal subi par le vendeur. L’acquéreur ne pouvait de ce fait être qualifié de redevable de la TVA. Les conditions d’application de la dispense de taxe n’étant pas remplies, l’administration notifie au vendeur un redressement correspondant au reversement de la taxe initialement déduite soit les 15/20e de la TVA.
Le vendeur assigne à la fois l’acquéreur de l’immeuble et le notaire rédacteur de l’acte. Débouté devant le tribunal de grande instance, il obtient gain de cause partiellement devant la cour d’appel de Paris : celle-ci estime que l’acquéreur, profane en matière de TVA sur les investissements immobiliers, n’a commis aucune faute de nature à voir sa responsabilité engagée. En revanche, la cour juge que le notaire a manqué à son devoir d’information et de conseil en n’avertissant pas l’acquéreur qu'il lui fallait opter dans des délais contraints au paiement de la taxe sur les loyers. L’acquéreur ayant effectivement opté ultérieurement pour le paiement de la TVA, la cour en déduit qu’il aurait pu exercer l’option à temps si le notaire l’avait correctement informé lors de la signature de la vente. Le notaire est condamné à prendre en charge, à titre de dommages et intérêts, la totalité du redressement supporté par le vendeur.
En pratique, cet arrêt doit inciter les notaires à vérifier attentivement la situation des parties, y compris en matière de TVA, afin de déceler d’éventuelles anomalies qui ne donneraient pas plein effet à l’acte, et de mettre les parties en position d’y remédier.
Caroline BARDE