Un frère et une sœur, à la suite du décès de leur mère, s’ils conviennent de la nécessité d’évaluer les biens immobiliers dépendant de la succession, s’opposent sur les montants avancés. Le premier remet en cause les estimations fournies par la seconde et sollicite, en référé, une expertise immobilière avant toute demande en partage judiciaire (CPC art. 145).
À juste titre selon la cour d’appel, qui constate l’intérêt légitime d’une telle mesure d’instruction. En effet, elle relève que :
les estimations commandées par le frère font état d’une description complète des biens qui ont été visités (caractéristiques principales, montant de la taxe foncière, critères valorisants ou dévalorisants comme les vis-à-vis, les huisseries en bois, le simple vitrage ou l’environnement). Celles réalisées par la sœur l’ont été sur un site internet ou par des agences immobilières qui ne mentionnent aucune visite des biens. En outre, ces estimations ne tiennent pas compte de l’état des biens ou de leur environnement, retenant le seul critère des mètres carrés. À tel point qu’une maison (avec dépendances et peupleraie) a été évaluée 200 000 € plus cher en comparaison avec les avis de valeur fournis par le frère. Pourtant, ces éléments sont essentiels dans l’évaluation d’un bien ;
l’existence d’un litige plausible entre eux est suffisamment démontrée par la production de messages échangés sur leurs divergences, ce qui remet en cause la possibilité d’aboutir à une liquidation amiable ;
les dispositions propres au partage judiciaire ne font pas obstacle à la saisine du juge des référés avant l’engagement d’une action en partage (C. civ. art. 841 s.).
A noter :
Le juge des référés peut ordonner une mesure d’instruction avant même l’engagement de l’action en partage sans contrevenir aux dispositions propres au partage judiciaire (CPC art. 145 ; Cass. 1e civ. 18-9-2008 n° 07-18.972 F-PB : AJ fam. 2008 p. 402 obs. F. Bicheron). En pratique, voilà un moyen à ne pas négliger en cas de blocage des parties sur la valorisation du patrimoine successoral, qui ne les engage pas définitivement vers un partage judiciaire.
L’arrêt est aussi un rappel de ce qu’il faut trouver dans une estimation : une valorisation résultant d’une visite sur place et tenant compte de plusieurs facteurs tels que la surface mais aussi l’état et l’environnement du bien. Notons que même en cas de concorde entre les héritiers, il est prudent d’exiger une estimation des immeubles de la succession réalisée dans ces mêmes conditions.