L’article 4 de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail facilite la mise en oeuvre par l’employeur de son obligation de motivation de la lettre de licenciement en lui permettant de recourir à des modèles de lettres, que le licenciement soit fondé sur un motif personnel ou économique (voir La Quotidienne du 17 octobre 2017).
Six modèles proposés selon le motif
Six modèles ont été fixés par un décret du 29 décembre 2017, selon la nature du motif envisagé :
- motif personnel disciplinaire ;
- inaptitude d’origine professionnelle ou non ;
- motif personnel non disciplinaire ;
- motif économique individuel ;
- motif économique pour les petits licenciements collectifs (moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours ou au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours dans une entreprise de moins de 50 salariés) ;
- motif économique pour les grands licenciements avec plan de sauvegarde de l’emploi (au moins 10 licenciements sur une même période de 30 jours dans une entreprise de plus de 50 salariés).
Après des rappels de procédure en préambule, les différents modèles établis aux annexes 1 à 6 du décret précisent les mentions devant figurer dans la lettre de licenciement à adresser au salarié. Parmi ces mentions, figure notamment celle relative aux délais de 15 jours dont disposent le salarié pour demander des précisions sur les motifs de son licenciement et l’employeur pour apporter ces précisions.
A noter : la mention dans la lettre de licenciement de la possibilité pour le salarié de demander à son employeur, après la notification de son licenciement, de préciser le motif indiqué dans la lettre de licenciement nous semble nécessaire compte tenu de son incidence sur les droits à réparation du salarié, même si l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 ne l’a pas rendue obligatoire.
Des imprécisions dans certains modèles
Quelques imprécisions sont toutefois à signaler dans le contenu de certains modèles de lettres proposés par le décret.
- Le modèle de lettre de licenciement pour motif non disciplinaire n’envisage que les hypothèses de licenciements pour absences répétées justifiées ou absence prolongée justifiée, insuffisance professionnelle ou trouble objectif caractérisé.
D’autres faits peuvent cependant être invoqués à l’appui d’un licenciement pour motif personnel non disciplinaire. Tel est le cas, par exemple, de la mésentente entre salariés dès lors qu’elle repose sur des faits objectifs (Cass. soc. 22-9-2010 n° 09-40.415 F-D).
- Les modèles de lettres de licenciements économiques individuel et collectif concernant moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours rappellent que la lettre de licenciement ne peut être adressée au salarié moins de 7 jours ouvrables à compter de la date prévue de l’entretien préalable de licenciement auquel le salarié a été convoqué et que ce délai est porté à 15 jours ouvrables pour le licenciement individuel d’un membre du personnel d’encadrement mentionné à l’article L 1441-13, 2o du Code du travail.
Toutefois, l’allongement du délai à 15 jours pour le personnel d’encadrement ne vaut que pour les licenciements économiques individuels (C. trav. art. L 1233-15, al. 3). En outre, les délais de 7 et 15 jours ne sont pas applicables en cas de redressement ou de liquidation judiciaire (C. trav. art. L 1233-59).
- Le modèle de lettre de licenciement économique pour les petits licenciements collectifs indique que la lettre de licenciement ne peut être adressée avant l’expiration d’un délai de 30 jours courant à compter de la notification du projet de licenciement à l’autorité administrative, lorsque le licenciement concerne plus de 10 salariés dans une même période de 30 jours dans une entreprise de moins de 50 salariés. Pour autant, comme précisé dans le titre même du modèle de lettre, ce délai de 30 jours est à respecter lorsque le licenciement concerne au moins 10 salariés, et pas seulement plus de 10 salariés.
Par ailleurs, on notera que ce délai est prolongé si l’administration fait des observations à l’employeur et que la réponse de celui-ci intervient après le délai d’envoi des lettres de licenciement. Ce délai est alors reporté jusqu’à la date d’envoi de la réponse (C. trav. art. L 1233-56, al. 3).
- Pour des grands licenciements collectifs avec plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), la mise en oeuvre d’un PSE s’impose dans les entreprises d’au moins 50 salariés lorsque le projet de licenciement concerne au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours (C. trav. art. L 1233-61) et pas seulement dans celles de plus de 50 salariés, comme l’indique le titre du modèle.
- Enfin, dans les trois modèles de lettres de licenciement pour motif économique, deux options sont possibles selon que l’entreprise comprend moins ou plus de 1 000 salariés. Dans le premier cas, l’employeur doit proposer au salarié dont il envisage le licenciement un contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Dans le second cas, il doit lui proposer un congé de reclassement. Or, selon l’article L 1233-71 du Code du travail, l’obligation pour l’employeur de proposer un congé de reclassement au salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique s’impose dans les entreprises d’au moins 1 000 salariés.
En outre, l’article précité n’est pas applicable aux entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire (C. trav. art. L 1233-75). Celles-ci n’ont alors que l’obligation de proposer à leurs salariés un CSP, comme dans les entreprises comprenant moins de 1 000 salariés.
Les trois modèles de lettres de licenciement pour motif économique comprennent un paragraphe relatif à l’impossibilité de reclassement. Toutefois, contrairement aux autres mentions, qui sont obligatoires, la mention de l’impossibilité de reclassement ne l’est pas selon la jurisprudence (Cass. soc. 3-4-2013 n° 12-11.829 F-D : RJS 6/13 n° 437).
Des modèles facultatifs adaptés à chaque situation
L’employeur peut, s’il le souhaite, utiliser les modèles de lettres proposés par le décret pour notifier un licenciement.
Dans ce cas, il doit utiliser le modèle correspondant à la nature juridique du licenciement envisagé et l’adapter aux spécificités propres à la situation du salarié ainsi qu’aux régimes conventionnels et contractuels qui lui sont applicables. A ce titre, chaque modèle de lettre rappelle, en préambule, que son application est sans incidence sur l’application des stipulations conventionnelles ou contractuelles plus favorables applicables au contrat de travail du salarié licencié.
Valérie DUBOIS
Pour en savoir plus sur la procédure de licenciement : voir Mémento Social nos 47450 s. (motif personnel) et 47900 s. (motif économique)