Le nantissement d’un compte-titres par le titulaire du compte est réalisé, tant entre les parties qu’à l’égard de la société émettrice des titres et des tiers, par une déclaration de nantissement datée et signée par le titulaire, cette déclaration devant comporter un certain nombre de mentions (C. mon. fin. art. L 211-20 et D 211-10).
La Cour de cassation vient de juger qu'en l'absence de déclaration du titulaire du compte comportant ces mentions, le nantissement n'est pas réalisé et ne peut donc pas être opposé à l'établissement bancaire teneur du compte.
Cette précision, inédite, a été apportée dans l'affaire suivante : la convention réglant les conséquences financières d'un divorce prévoyait que la créance de l'ex-épouse sur son ex-conjoint serait garantie par un nantissement (à l'époque un « gage ») sur le plan d'épargne en actions (PEA) de ce dernier ; en l'absence de déclaration de gage remise à la banque tenant le PEA, celle-ci avait vendu les titres et versé le produit de la vente à d'autres créanciers de l'ex-mari.
Une cour d'appel avait néanmoins déclaré le gage opposable à la banque et l'avait condamnée à indemniser l'ex-épouse du préjudice résultant de ce versement en relevant que celle-ci avait signifié à la banque le jugement de divorce aux termes duquel l'ex-époux avait remis en gage le PEA à l'ex-épouse et que, si les formalités édictées pour l’établissement de la déclaration de gage n'avaient pas été respectées, elles n'étaient pas prescrites à peine de nullité. La cour ajoutait que l’acte de signification était suffisamment précis pour permettre à la banque de déterminer qu’il s’agissait bien d’un gage et d’identifier les titres gagés.
Cette décision a été censurée.
A noter : cette solution résulte de la lettre du texte, qui subordonne la « réalisation » du nantissement à l'établissement de la déclaration. Le défaut de déclaration rend donc la sûreté inopposable aux tiers.
Rappelons que la solution inverse prévalait sous l'ancien régime du gage de valeurs mobilières, l'absence de déclaration n'interdisant pas au juge de vérifier l'existence et la consistance du gage en se référant à l'acte de nantissement (Cass. com. 10-5-2006 n° 569 F-D : RJDA 10/06 n° 1040).
Si, comme l'énonce l'arrêt ci-dessus, la déclaration de nantissement est nécessaire à la réalisation de la sûreté, elle est suffisante : pas besoin, donc, de la notifier à la société émettrice des titres pour la lui rendre opposable (Cass. com. 20-6-2018 n° 17-12.559 F-PB : voir La Quotidienne du 31 juillet 2018).
Pour mémoire : depuis le 27 décembre 2018, les titres non cotés peuvent être inscrits dans un dispositif d'enregistrement électronique partagé, comme une blockchain. Dans ce cas, les titres eux-mêmes peuvent être nantis dans le dispositif et la déclaration de nantissement doit alors porter sur ces titres (C. mon. fin. art. D 211-10 modifié par décret 2018-1226 du 24-12-2018). Comme pour le nantissement de compte, l'absence de déclaration de nantissement de titres inscrits dans le dispositif rend la sûreté inopposable aux tiers.
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Sociétés commerciales n° 62620