Après la clôture de la liquidation d’une société civile immobilière (SCI) et sa radiation du registre du commerce et des sociétés (RCS), l’administration fiscale notifie au liquidateur une proposition de rectification des revenus fonciers de la SCI. Le liquidateur en conteste la régularité devant le juge administratif. Il soutient que, faute pour le fisc d’avoir demandé la désignation d'un mandataire ad hoc, la société était dépourvue de représentant auquel la proposition de rectification aurait pu être valablement adressée.
Une cour d'appel écarte à tort cet argument, juge le Conseil d’Etat : si une société, même non commerciale, prend fin par la dissolution anticipée décidée par les associés, sa personnalité morale subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de cette dernière (C. civ. art. 1844-8). Jusqu'à l'enregistrement de la clôture de la liquidation au RCS, le liquidateur a qualité pour représenter la société. Après cette date, sauf décision des associés prolongeant le mandat du liquidateur, seul un mandataire ad hoc spécialement désigné par la juridiction judiciaire, à la demande de l'administration ou des anciens associés de la société, dispose de la qualité de représentant de cette société. C'est avec celui-ci que les opérations de contrôle doivent se dérouler et c'est à lui que toute nouvelle pièce de la procédure doit être adressée. Ces règles ne font pas obstacle, entre l’enregistrement de la clôture de la liquidation de la société au RCS et la désignation d'un mandataire ad hoc, à la poursuite des opérations de contrôle avec toute personne pouvant être regardée, dans les circonstances particulières de chaque espèce, comme mandataire, sauf pour la notification de nouvelles pièces de procédure.
Or, en l’espèce, aucun élément ne permettait d’établir que le liquidateur, également associé de la SCI, avait qualité de mandataire, ni que l'administration, à qui il revenait de s'assurer de la qualité du destinataire de la proposition de rectification pour représenter la société, avait effectué une telle diligence. Les juges du fond devaient procéder à cette vérification, ce qu'ils n'avaient pas fait.
A noter :
La Cour de cassation juge que, après la publication de la clôture de la liquidation d’une société dissoute, la personnalité morale de cette dernière subsiste tant que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés mais qu'elle ne peut être représentée que par un mandataire ad hoc désigné en justice (Cass. com. 26-1-1993 n° 91-11.285 P : RJDA 5/93 n° 403). Le Conseil d’Etat partage cette position et impose une telle désignation pour représenter la société (CE 2-6-2010 n° 322267 : RJF 8-9/10 n° 817). Toutefois, lorsque le contrôle débute avant la publication de la clôture de la liquidation, l'administration fiscale peut continuer ses investigations, entre cette date et celle de la nomination du mandataire ad hoc, avec une personne pouvant être regardée comme mandataire de la société mais elle ne peut pas lui notifier de nouvelles pièces (CE 3-10-2016 n° 389051 : RJDA 1/17 n° 20). C'est le cas d'une proposition de rectification.
A propos d'une société civile, le Conseil d'Etat a admis que l'assemblée générale, au moment de mettre fin au mandat du liquidateur, également associé, avait pu valablement lui donner pouvoir pour représenter l'indivision des anciens associés après la liquidation (CE 21-11-2011 n° 340776, 340777, 340778 et 340779 : RJF 2/12 n° 144). Dans l'espèce commentée, les juges d'appel avaient retenu que le liquidateur s'était comporté comme s'il avait été désigné pour représenter l'indivision des anciens associés. Mais pour pouvoir être destinataire d'une nouvelle pièce, il faut avoir été régulièrement désigné ; il ne suffit pas d'en avoir l'apparence.
Documents et liens associés :