1. Comme le comité d'entreprise, le comité social et économique dispose de ressources destinées :
- d'une part, à permettre son fonctionnement ;
- d'autre part, à financer les activités sociales et culturelles qu'il gère. Les modifications apportées au budget destiné à couvrir ces activités ne sont pas traitées ci-après.
Ces dotations ne concernent que le CSE des entreprises d'au moins 50 salariés, celui des petites entreprises n'ayant aucun budget propre, sauf accord ou usage plus favorable.
2. La loi impose à l'employeur d'allouer au CSE, dans les entreprises employant au moins 50 salariés, une subvention de fonctionnement, destinée à couvrir les dépenses du comité s'inscrivant dans le cadre de ses attributions économiques et professionnelles et dont le montant annuel minimal dépend de la masse salariale de l'entreprise.
L'ordonnance 2017-1386 a repris le régime applicable à la subvention de fonctionnement du comité d'entreprise, mais y a apporté plusieurs modifications importantes : augmentation du taux de la subvention pour les grandes entreprises, définition de son assiette de calcul, utilisation moins contrainte du reliquat budgétaire annuel.
Un taux de subvention relevé, mais seulement pour les grandes entreprises
3. L'employeur verse au CSE une subvention de fonctionnement d'un montant annuel équivalent à :
- 0,20 % de la masse salariale brute dans les entreprises de 50 à 2 000 salariés ;
- 0,22 % de la masse salariale brute dans les entreprises de plus de 2 000 salariés (C. trav. art. L 2315-61, al. 1 à 3).
A noter : le taux de la subvention de fonctionnement du comité d'entreprise était de 0,2 % pour toutes les entreprises. L'ordonnance 2017-1386 prévoit donc une augmentation, mais seulement pour les grandes.
Si le taux de la subvention est relevé dans les grandes entreprises, il faut souligner que, en contrepartie, le CSE va devoir assumer des dépenses que le comité d'entreprise n'assumait pas. En effet, il incombe au CSE de financer une partie du coût des expertises auxquelles il a recours, dans des cas où l'employeur supportait auparavant leur prise en charge intégrale.
4. Le montant visé ci-dessus s'ajoute à la subvention destinée aux activités sociales et culturelles, sauf si l'employeur fait déjà bénéficier le comité d'une somme ou de moyens en personnel équivalents à 0,22 % de la masse salariale brute (C. trav. art. L 2315-61, al. 4).
Du plan comptable général au Code de la sécurité sociale
5. La masse salariale brute servant d'assiette de calcul de la subvention de fonctionnement du comité d'entreprise n'était pas définie par le Code du travail. Elle l'avait donc été par une série d'arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation, lesquels avaient donné lieu à de vives critiques et à la résistance de certaines cours d'appel, qui considéraient que cette masse salariale devait s'entendre de celle déclarée à l'Urssaf. L'ordonnance 2017-1386 met fin à la controverse, en adoptant une définition très différente, sinon opposée à celle de la Cour de cassation.
6. La masse salariale brute servant d'assiette de calcul de la subvention de fonctionnement et au calcul de la contribution aux activités sociales et culturelles est constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l'article L 242-1 du Code de la sécurité sociale ou de l'article L 741-10 du Code rural et de la pêche maritime, à l'exception des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée (C. trav. art. L 2315-61, al. 7 et art. L 2312-83).
A notre avis : l’expression « d’indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail » prête à interprétation. Faut-il l’entendre au sens large, c’est-à-dire que ne seraient comprises dans l’assiette de la subvention de fonctionnement ni les indemnités de préavis ou compensatrices de préavis, ni les indemnités compensatrices de congés payés ?
Nous ne le pensons pas. Cette expression doit, pour nous, se comprendre par référence à l’alinéa 12 de l’article L 242-1 du CSS, aux termes duquel la part non imposable « des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail » - l’expression est la même – est exclue de l’assiette des cotisations de sécurité sociale, mais dans certaines limites et à condition que leur montant n’excède pas un certain seuil. Il s’agit en réalité d’exclure de l’assiette de la subvention de fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et culturelles du CSE la part de ces indemnités soumise à cotisations de sécurité sociale. En d’autres termes, ces indemnités ne seront pas prises en compte pour calculer les dotations du CSE, quel que soit leur régime social. Sont notamment concernées les indemnités de licenciement ou de cessation forcée des fonctions de mandataire social, ainsi que les indemnités de mise à la retraite.
7. Entrent donc dans l'assiette de calcul de la subvention de fonctionnement toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment : salaires ou gains, indemnités de congés payés, cotisations salariales, indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, avantages en nature, pourboires. La compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail est également considérée comme une rémunération, qu'elle prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou d'une hausse du taux de salaire horaire (CSS art. L 242-1, al. 1).
8. Les sommes effectivement distribuées aux salariés lors de l'année de référence en application d'un accord d'intéressement ou de participation sont également incluses dans la masse salariale brute (C. trav. art. L 2315-61, al. 8 ; C. trav. art. L 2312-83).
A notre avis : l'expression « sommes effectivement distribuées aux salariés » vise, selon nous, les sommes individuellement réparties entre les salariés après le calcul global de la participation ou de l'intéressement, même s'ils n'en ont pas immédiatement la jouissance, en raison de leur blocage. Des précisions sur ce point seraient toutefois les bienvenues.
Le texte vise « l'accord » de participation. Doit-on en conclure que, en l'absence d'accord, les sommes distribuées en application du régime dit « d'autorité » n'entrent pas dans l'assiette des dotations au CSE ? Dans la mesure où on voit mal pourquoi l'exécutif souhaiterait favoriser les entreprises ne concluant pas d'accord de participation, on peut en douter. Il s'agit plutôt, selon nous, d'une erreur, dont on espère qu'elle sera rectifiée dans l'ordonnance devant harmoniser l'état du droit et assurer la cohérence des textes prévue par l'article 6 de la loi d'habilitation 2017-1340 du 15-9-2017.
9. Rappelons que la Cour de cassation avait retenu comme assiette de la subvention de fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et culturelles la masse salariale brute correspondant au compte 641 du plan comptable général, à l'exception des sommes correspondant à la rémunération du mandat des dirigeants sociaux (Cass. soc. 3-11-2016 n° 15-19.771 FS-PB : RJS 1/17 n° 33), à des remboursements de frais et de celles qui, hormis les indemnités légales et conventionnelles de licenciement, de retraite et de préavis, sont dues à la rupture du contrat de travail (Cass. soc. 20-5-2014 n° 12-29.142 FS-PB : RJS 7/14 n° 577 ; Cass. soc. 9-7-2014 n° 13-17.470 : RJS 10/14 n° 702 ; Cass. soc. 22-3-2017 n° 15-19.973 FS-PB : RJS 6/17).
La Cour avait aussi jugé que la rémunération des salariés mis à disposition (hors salariés temporaires) devait être prise en compte (Cass. soc. 7-11-2007 n° 06-12.309 FS-PBR : RJS 1/08 n° 43 ; Cass. soc. 31-5-2016 n° 14-25.042 FS-PB : RJS 8-9/16 n° 571), même payée en tout ou partie par leur entreprise d'origine, sauf si l'employeur de l'entreprise d'accueil établit l'absence d'intégration étroite et permanente de ces salariés à la communauté de travail (Cass. soc. 9-7-2014 n° 13-17.470 FS-PB : RJS 10/14 n° 702).
Une utilisation de la subvention réservée au fonctionnement du comité, sauf exceptions
10. Le CSE décide librement de l'utilisation de la subvention, qui doit s'inscrire dans le cadre de son fonctionnement et de ses missions économiques (en ce sens, pour le comité d'entreprise, Cass. soc. 27-3-2012 n° 11-10.825 : RJS 6/12 n° 575) : personnel recruté pour faciliter l'exercice de ses attributions économiques et professionnelles, frais courants de fonctionnement (documentation, papeterie, frais d'abonnement ou de communications téléphoniques), frais de déplacement des membres (sauf ceux incombant à l'employeur, frais occasionnés par certains experts (expertises dites « libres » ou prises en charge partiellement par le comité), frais de tenue des comptes, etc.
Par transposition des règles retenues pour le comité d'entreprise, l'utilisation de la subvention de fonctionnement du comité social et économique suppose une délibération de cet organe, donnant lieu à un vote auquel l'employeur ne participe pas (Lettre min. 15-1-1986 ; CA Paris 16-6-1999 n° 99-4193 : RJS 10/99 n° 1262).
A noter : la règle imposant l’utilisation de la subvention de fonctionnement pour les besoins du fonctionnement et des attributions économiques du comité d’entreprise demeure d’actualité pour le comité social et économique, étant précisé qu’elle a été adoucie par la possibilité de transférer un excédent budgétaire « fonctionnement » sur le budget des activités sociales et culturelles en fin d’année et inversement : voir ci-dessous. Surtout, la prise en charge par le CSE des attributions en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail du CHSCT aura pour effet que ses frais de fonctionnement seront plus lourds que ceux supportés par le comité d’entreprise. En effet, l’employeur était tenu de prendre en charge les frais de fonctionnement du CHSCT, ainsi que ceux afférents aux expertises auxquelles celui-ci décidait d’avoir recours. Les frais de fonctionnement de la commission incomberont au CSE, ainsi que 20 % des frais d’expertise, à l’exception de celle en cas de risque grave constaté dans l’établissement.
11. Le CSE peut décider, par une délibération, de consacrer une partie de son budget de fonctionnement au financement de la formation des délégués syndicaux de l'entreprise. (C. trav. art. L 2315-61, al. 5). Ces dispositions reprennent purement et simplement celles de l'ancien article L 2325-43 du Code du travail relatif au comité d'entreprise. A noter que ce texte prévoyait aussi la prise en charge du financement de la formation des délégués du personnel, mais que cette disposition perd sa raison d'être avec la disparition de l'institution.
12. Le comité social et économique peut également décider, par une délibération, de transférer tout ou partie de l'excédent annuel du budget de fonctionnement au financement des activités sociales et culturelles (C. trav. art. L 2315-61, al. 5). S'agissant d'une délibération, l'employeur ne participe pas au vote.
Une faculté symétrique est prévue, permettant le transfert des reliquats budgétaires des activités sociales et culturelles vers le budget de fonctionnement du CSE. Les membres de la délégation du personnel du CSE peuvent décider, par une délibération, de transférer tout ou partie du montant de l'excédent annuel du budget destiné aux activités sociales et culturelles au budget de fonctionnement ou à des associations dans des conditions et limites fixées par décret en Conseil d'Etat (C. trav. art. L 2312-84). Outre le mot « délibération », l'expression « membres de la délégation du personnel » implique que l'employeur ne doit également pas prendre part au vote.
Cette possibilité constitue une innovation par rapport aux textes relatifs au comité d'entreprise. Jusqu'ici, le principe dit de « dualité budgétaire » interdisait tout transfert du budget de fonctionnement vers celui des activités sociales et culturelles et réciproquement.
Pascale PEREZ DE ARCE
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