Un fournisseur d'accès à un service de communications électroniques est responsable de plein droit à l'égard de son client de la bonne exécution des obligations résultant du contrat et il ne peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité qu'en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable, soit à son client, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure (Loi 2004-575 du 21-6-2004 pour la confiance dans l'économie numérique, dite « LCEN », art. 15, I).
Par deux arrêts du même jour, la Cour de cassation apporte une précision inédite sur la portée de ces dispositions : celles-ci étant d'ordre public en ce qu'elles concernent les contrats conclus entre les fournisseurs d'accès à un service de communications électroniques et leurs clients, la liberté contractuelle ne permet pas d'y déroger.
1° Dans la première affaire, une association avait conclu un contrat cadre avec un opérateur de téléphonie pour l’ensemble des prestations téléphoniques et internet de ses établissements. Une clause du contrat stipulait que l’opérateur était soumis à une obligation générale de moyens et que sa responsabilité ne pourrait être engagée qu’en cas de faute prouvée. Invoquant des dysfonctionnements pendant plusieurs mois ayant perturbé son activité, l’association avait agi en responsabilité contre l’opérateur.
Une telle clause, juge la Cour de cassation, doit être réputée non écrite en ce qu’elle contrevient à l’article 15 de la LCEN.
2° Dans la seconde affaire, un contrat de service de communications électroniques souscrit par une agence de voyages auprès du même opérateur prévoyait une clause similaire selon laquelle celui-ci s’engageait auprès du client à faire ses meilleurs efforts pour fournir les services avec toute la compétence et le soin raisonnable dans le respect des normes professionnelles applicables.
La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel qui, pour écarter l'action en responsabilité engagée par l'agence de voyages contre l'opérateur en raison de dysfonctionnements, avait jugé que ce dernier est tenu d’une obligation de moyens au regard de ces stipulations contractuelles et qu’aucun manquement aux obligations nées du contrat n’était démontré. Il incombait aux juges d’appel de trancher le litige en faisant application, au besoin d’office, des dispositions d’ordre public de l’article 15 précité.
A noter :
L’article 15 de la LCEN instaure une responsabilité de plein droit à l’encontre d’un fournisseur d'accès à un service de communications électroniques. Ce dernier est donc soumis à une obligation de résultat et sa responsabilité peut être engagée sans que le client ne soit tenu de prouver qu’il a commis une faute dans l’exécution des prestations. Par les arrêts commentés, la Cour de cassation juge, pour la première fois à notre connaissance, que ce texte est d'ordre public. Dès lors qu'une loi intéresse l'ordre public, il ne peut pas y être dérogé par des conventions particulières (C. civ. art. 6).
S’agissant des contrats à distance conclus par un consommateur avec un professionnel, un régime de responsabilité identique est prévu (C. consom. art. L 221-15). A cet égard, la Cour de cassation a jugé que ces dispositions sont d’ordre public et qu’un professionnel ne peut pas conventionnellement exclure ni limiter, en dehors des prévisions de la loi, la réparation due au consommateur en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution d’un tel contrat (Cass. 1e civ. 13-11-2008 n° 07-14.856 F-PB : RJDA 10/09 n° 838).
Documents et liens annexes :
Cass. 1e civ. 13-3-2024 n° 22-12.345 FS-B
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