Règles de procédure et de motivation du licenciement
Plusieurs des mesures prévues en matière de rupture du contrat de travail s’appliqueraient aux licenciements notifiés après la publication de l’ordonnance. En cas de litige, les instances introduites avant cette date se verraient appliquer les règles antérieures, y compris en appel et en cassation.
Selon le projet d'ordonnance, l’employeur pourrait recourir à un modèle-type de lettre de notification du licenciement en cas de licenciement pour motif personnel ou économique.
La motivation de la lettre de licenciement pourrait être complétée après sa notification, soit à l’initiative de l’employeur, soit à la demande du salarié. Un décret fixerait les conditions d’application de cette procédure.
Si le salarié n’a pas formé une telle demande, et qu’il conteste la légitimité de son licenciement, ce dernier ne pourrait pas être jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison d’une insuffisance de motivation. L’intéressé ne pourrait prétendre, à ce titre, qu’à une indemnité pour irrégularité de procédure égale à un mois de salaire maximum.
Le non-respect de la procédure d’entretien préalable au licenciement pour motif personnel ou économique ou d’une procédure conventionnelle de consultation préalable à la rupture constituerait une irrégularité justifiant l’octroi d’une indemnité égale à un mois de salaire maximum.
La même sanction s’appliquerait en cas de méconnaissance du délai de transmission au salarié de son contrat à durée déterminée ou de son contrat de travail temporaire.
Règles spécifiques aux licenciements économiques
Comme prévu par la loi habilitant le Gouvernement à réformer le Code du travail par ordonnances, le périmètre d’appréciation de la cause économique de licenciement serait restreint au territoire national lorsque l’entreprise appartient à un groupe international, hors fraude. Les notions de groupe et de secteur d’activité dans lesquels s’apprécient ces difficultés seraient précisées : le Code du travail intégrerait, sur ce point, les solutions dégagées par la Cour de cassation. Ces dispositions s’appliqueraient aux procédures de licenciement économiques engagées après la publication de l’ordonnance.
A noter : bien qu’habilité par le Parlement à relever les seuils, en termes d'effectifs de l'entreprise et de nombre de licenciements, à partir desquels l'employeur doit établir et mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), le Gouvernement semble finalement y avoir renoncé. Aucune mesure en ce sens ne figure en effet dans le texte du projet d’ordonnance.
Les modalités d’application de l’obligation de reclassement préalable au licenciement économique seraient précisées par décret. Mais le projet d’ordonnance prévoit l’abrogation de l’article L 1233-4-1 du Code du travail, qui précise actuellement les obligations pesant sur l’employeur en la matière lorsque l’entreprise appartient à un groupe international.
Le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements pourrait être fixé aux zones d’emploi – et non à l’entreprise dans son ensemble – en cas de licenciement économique de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours, c’est-à-dire sans plan de sauvegarde de l’emploi.
L’ordonnance adapterait les dispositions du Code du travail relatives aux procédures de consultation des représentants du personnel sur les licenciements collectifs pour motif économique. Les textes renverraient non plus au comité d’entreprise et aux délégués du personnel, mais au comité social et économique (issu des ordonnances). Ce dernier devrait être informé, le cas échéant, des conséquences du projet en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail.
En cas de licenciement économique de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours, cette instance devrait rendre son avis dans le délai d’un mois à compter de la première réunion.
Plans de départs volontaires
Il est prévu d’encadrer les plans de départs volontaires, aujourd’hui inconnus du Code du travail, en vue de sécuriser cette pratique. Le nouveau régime, applicable au lendemain de la publication de l’ordonnance, emprunterait à la fois à la rupture conventionnelle et aux licenciements économiques prononcés dans le cadre d’un accord portant plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).
Un plan de départs volontaires, excluant tout licenciement, devrait être déterminé par voie d’accord collectif majoritaire fixant notamment le nombre maximal de départs, les conditions à remplir par les salariés pour pouvoir en bénéficier et les modalités et conditions d’information du comité social et économique (issu des ordonnances) sur le sujet. L’accord devrait être soumis à l’administration pour validation. Une fois l’accord validé, l’acceptation par l’employeur de la candidature d’un salarié au départ volontaire emporterait rupture du contrat de travail d’un commun accord des parties (soumise à l’autorisation de l’inspection du travail pour les salariés protégés). Dans certains cas, l’entreprise pourrait être tenue de contribuer à des actions de revitalisation du bassin d’emploi.
Le régime social et fiscal de l’indemnité versée à un salarié ayant accepté une telle rupture amiable, dont le montant devrait être fixé par ledit accord sans pouvoir être inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement, serait aligné sur le régime applicable aux indemnités allouées dans le cadre d’un PSE. L’intéressé aurait droit à l’assurance chômage.
Indemnité légale de licenciement
L'indemnité légale de licenciement serait accordée au salarié justifiant d’au moins 8 mois d’ancienneté, au lieu d’un an actuellement. Cette mesure s’appliquerait aux licenciements notifiés à compter de la publication de l’ordonnance.
A noter : un décret publié en même temps que les ordonnances pourrait également augmenter le montant de l’indemnité légale de licenciement. Une hausse de 25 % du montant actuel de l’indemnité serait à l’étude.
Contestation de la rupture du contrat de travail
Le délai imparti au salarié pour contester la rupture de son contrat de travail serait unifié et ramené à 12 mois (sauf contentieux spécifiques – notamment en cas de licenciement avec plan de sauvegarde de l’emploi – ou délais plus courts). Ces dispositions s’appliqueraient aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de l’ordonnance.
Licenciements sans cause réelle et sérieuse ou nuls
Les nouvelles modalités de réparation des licenciements abusifs ou nuls s’appliqueraient aux ruptures notifiées après publication de l’ordonnance. Les instances introduites avant cette date se verraient appliquer les règles antérieures, y compris en appel et en cassation.
En cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, la sanction encourue par l’employeur serait déterminée en fonction d’un barème modulé en fonction de l’ancienneté du salarié et de la taille de l’entreprise.
L’indemnité minimale serait de 3 mois de salaire brut pour les salariés comptant au moins 2 ans d’ancienneté dans une entreprise d’au moins 11 salariés, contre 6 mois actuellement. Le montant de l’indemnité minimale serait inférieur dans les entreprises de moins de 11 salariés (entre 0,5 et 2,5 mois de salaire brut).
L’indemnité maximale serait fixée à 20 mois de salaire brut, pour les salariés justifiant d’au moins 30 ans d’ancienneté.
Précision importante : le juge pourrait – mais ce serait facultatif – déduire de la somme allouée en application du barème l’indemnité de licenciement versée au salarié. Le barème s’appliquerait également en cas de prise d’acte de la rupture du contrat ou de résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur.
Si le licenciement est jugé nul – violation d’une liberté fondamentale ou d’une protection spécifique, harcèlement ou discrimination, notamment – l’indemnité serait fixée par le juge à un minimum de 6 mois de salaire brut, sans préjudice des indemnités de rupture perçues par l’intéressé.
Certaines réparations spécifiques prévues par le Code du travail seraient modifiées, dans un sens défavorable au salarié :
- violation de la priorité de réembauche en cas de licenciement économique : au moins 1 mois de salaire (au lieu de 2) ;
- nullité du licenciement économique en cas d’absence ou d’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi, ou d’absence de décision de validation ou d’homologation de ce plan : minimum 6 mois de salaire (au lieu de 12) ;
- défaut de réintégration du salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, ou manquement à l’obligation de reclassement lorsque ce salarié est physiquement inapte : au moins 6 mois de salaire (au lieu de 12).