Après s’être approvisionné auprès d’un fournisseur pendant plusieurs années, un exploitant de points de vente de téléphones se voit refuser par ce dernier le retour de ses marchandises invendues. Le fournisseur soutient qu’il a modifié les conditions de reprise des invendus, qui avaient été fixées d’un commun accord par courriel, pour n’autoriser désormais les retours qu’au cas par cas. L’exploitant, qui n'a jamais accepté ces nouvelles conditions de reprise, agit contre son fournisseur en paiement de diverses sommes au titre des retours demandés.
Une cour d’appel accueille sa demande et condamne le fournisseur à appliquer les anciennes conditions de reprise.
La Cour de cassation censure la décision : dans les contrats à exécution successive dans lesquels aucun terme n’a été prévu, la résiliation unilatérale est offerte à toutes les parties, sauf en cas d'abus. En l’espèce, en modifiant les conditions de reprise des marchandises invendues, le fournisseur avait unilatéralement et tacitement résilié le précédent accord.
A noter :
Confirmation de jurisprudence. Les parties ne pouvant pas être liées indéfiniment, chaque partie peut résilier à tout moment une convention à durée indéterminée, sous réserve de ne pas abuser de ce droit (Cass. 1e civ. 11-6-1996 n° 95-17.339 P : RJDA 12/96 n° 1437 ; Cass. com. 8-2-2017 n° 14-28.232 FS-PBI : RJDA 5/17 n° 378).
La résiliation unilatérale peut être tacite, lorsque le comportement du contractant ne laisse pas de doute sur sa volonté de mettre fin au contrat. Il a notamment été jugé que celle-ci peut résulter d’une importante réduction de l'activité de l'une des parties (Cass. 1e civ. 3-7-1996 n° 94-16.845 P : RJDA 12/96 n° 1436). En l'espèce, il n’existait plus d’accord entre les parties du fait de la modification unilatérale des conditions de reprise par le fournisseur et celui-ci ne pouvait pas être condamné à continuer à appliquer ces anciennes conditions indéfiniment (la question de l’abus n’ayant vraisemblablement pas été soumise à la Cour de cassation).
Rendue sous l’empire du droit antérieur à l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, cette solution est transposable au droit actuel, l’article 1211 du Code civil disposant que chaque partie peut mettre fin à tout moment à un contrat à durée indéterminée, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable.
Documents et liens associés
Cass. com. 18-1-2023 n° 21-17.848 F-D, Sté Ascendeo France c/ Sté Oikko