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Qualité de dirigeant de fait d'une personne physique ni salariée ni mandataire de la société

Une personne physique qui n'était ni salariée ni mandataire d'une société en a été reconnue dirigeant de fait car toutes les décisions importantes étaient prises sur son avis et elle donnait des instructions sur des sujets essentiels touchant au fonctionnement social.

Cass. com. 2-6-2021 n° 20-13.735 F-D


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©iStock

Après la mise en liquidation judiciaire d’une société, une interdiction de gérer de quatre ans est prononcée contre un associé indirect de la société à hauteur de 70 %, en sa qualité de dirigeant de fait. Pour échapper à toute condamnation, celui-ci conteste cette qualité, soutenant qu’il n’est ni salarié ni mandataire de la société.

La Cour de cassation rejette ces arguments. La qualité de dirigeant de fait de l’intéressé résultait des constatations et appréciations suivantes :

  • il ressortait des messages envoyés grâce à l'adresse électronique dont il disposait au sein de la société que l'intéressé y tenait le « rôle moteur », la gérante de droit lui demandant son avis sur toutes les décisions importantes et agissant comme sa simple exécutante ;

  • par exemple, il s'entretenait d'instances judiciaires en cours avec les avocats et donnait des instructions quant à la cession d'un terrain, la gérante de droit n'intervenant que pour transmettre des documents, voire n'étant même pas informée des sujets importants ;

  • il donnait des consignes pour effectuer des virements et pour organiser un voyage en vue de signer des actes de cession, ses différentes interventions auprès des salariés et prestataires extérieurs le faisant apparaître comme ayant un rôle de décideur.

A noter :

Les dirigeants de droit ou de fait d'une société en redressement ou en liquidation judiciaire peuvent être condamnés à une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer s'ils ont commis l'un des faits énumérés aux articles L 653-4 à L 653-6 du Code de commerce (sur renvoi de l'art L 653-8 pour l'interdiction de gérer).

En l'espèce, l'intéressé avait été condamné pour tenue d'une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière (C. com. art. L 653-5, 6°) et augmentation frauduleuse du passif (art. L 653-4, 5°).

Rappelons que la qualification de dirigeant de fait se caractérise par l'exercice en toute liberté et indépendance, seul ou en groupe, de façon continue et régulière, d'activités positives de gestion et de direction engageant la société (Cass. com. 25-1-1994 n° 91-20.007 D : RJDA 4/94 n° 402 ; Cass. com. 12-7-2005 n° 03-14.045 FP-PBIR : RJDA 2/06 n° 169 ; Cass. com. 10-1-2012 n° 10-28.067 F-D : RJDA 4/12 n° 427, 1e esp.).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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Qualité de dirigeant de fait : illustrations

Le dirigeant de fait a les mêmes obligations et encourt les mêmes responsabilités que le dirigeant de droit. En l’absence de définition légale, la Cour de cassation a précisé les contours de la notion. Retrouvez ci-dessous une série d’illustrations extraites du Mémento Sociétés Commerciales.


quoti-20210728-dirigeant-fait-enrichissement.jpg

©iStock

La qualification de dirigeant de fait se caractérise par l'exercice en toute liberté et indépendance, seul ou en groupe, de façon continue et régulière, d'activités positives de gestion et de direction engageant la société (Cass. com. 25-1-1994 n° 200 :  RJDA 4/94 n° 402 som. ; Cass. com. 12-7-2005 n° 1238 :  RJDA 2/06 n° 169 ; Cass. com. 10-1-2012 n° 10-28.067 :  RJDA 4/12 n° 427, 1e esp.). C’est au demandeur qu’il appartient de prouver qu’une personne n’ayant pas la qualité de dirigeant de droit peut être considéré comme dirigeant de fait.  

Jugé qu'avaient la qualité de dirigeant de fait :

-  le directeur d'une société qui disposait d'une grande autonomie de gestion assurant sur place la totale direction de l'entreprise, était responsable du changement du personnel d'encadrement et avait fait personnellement le choix de reconduire les prix de vente antérieurement pratiqués alors qu'ils étaient inférieurs au prix de revient (Cass. com. 16-4-1996 : D. 1996 IR p. 138) ;

-  le directeur commercial d'une SA qui, après avoir mis fin à son mandat de président du conseil d'administration parce qu'il venait de faire l'objet d'une mesure d'interdiction de gérer, avait signé tous les contrats représentant l'essentiel de l'activité de la société et avait pris la qualité de président-directeur général dans six de ces actes (Cass. com. 13-2-2007 n° 05-12.261 :  RJDA 6/07 n° 615) ;

-  l'associé majoritaire qui, entretenant des liens étroits avec la société, a placé la gérance sous son contrôle en cosignant tous les règlements et transactions bancaires de la société (CA Paris 24-1-2017 n° 16/03136 :  RJDA 7/17 n° 462) ;

-  l'associé, responsable technique salarié, qui disposait de la signature bancaire de la société, était perçu comme le gérant par les clients dont il était le seul interlocuteur et avait vendu deux véhicules de la société sans mandat du gérant de droit qui ne pouvait se déplacer fréquemment en raison de son éloignement géographique (Cass. com. 10-2-2015 n° 13-17.589 :  RJDA 5/15 n° 344) ;

-  un franchiseur qui, au lieu de se borner à vérifier chez la société distributrice la bonne exécution des obligations mises à la charge de cette dernière, s'était immiscé dans la gestion de cette société et agissait à l'égard du personnel et des tiers en déclarant être le « patron » de l'affaire (CA Rouen 23-5-1978 : JCP 1979 II n° 19235 note Notté ; pour un autre exemple d'application de la gestion de fait à un franchiseur qui s'était immiscé dans la gestion du franchisé, voir CA Rouen 14-3-1992 : RJDA 8-9/92 n° 816) ;

-  la société holding d'un groupe qui avait eu une influence prédominante sur les décisions de la société, membre de ce groupe, mise en liquidation judiciaire (Cass. com. 23-11-1999 n° 1860 :  RJDA 3/00 n° 270 ; pour un autre exemple, voir Cass. com. 13-11-2002 n° 1845 :  RJDA 4/03 n° 386, 1e esp.) ;

-  une société étrangère qui exerçait un contrôle rigoureux sur les activités d'un groupe de sociétés françaises, donnait des directives concernant la gestion des stocks et la tenue de la comptabilité de ces sociétés et avait la maîtrise de leurs fonds en banque (CA Aix 15-12-1978 : Bull. Aix 4/1978 p. 89) ;

-  une société qui avait conclu avec une autre société exploitant un hôtel un contrat d'assistance technique relatif à la conception, à l'équipement, à l'architecture et à la décoration de l'hôtel et qui s'était réservé le domaine de l'embauche et des licenciements, la mise en place de l'organisation administrative et financière de l'hôtel, la définition de la politique des prix, la négociation des contrats et la politique commerciale, s'assurant ainsi sans partage la direction de l'établissement (Cass. com. 19-12-1995 : RJDA 3/96 n° 431) ;

-  un établissement financier qui s'était immiscé dans la gestion d'une autre société auprès de laquelle il avait délégué de façon quasi permanente un gestionnaire qui avait fait preuve d'une telle autorité qu'il paraissait avoir souvent pris seul des décisions importantes qu'il n'avait eu aucun mal à imposer aux dirigeants sociaux (CA Paris 3-3-1978 : Gaz. Pal. 1978 som. p. 394) ;

-  le président du conseil de surveillance d'une société mère qui s'était présenté au liquidateur comme le « manager » d'une filiale de celle-ci et qui avait résolu le bail commercial dont elle bénéficiait, entraînant l'arrêt de son activité économique (CA Paris 22-3-2016 n° 15/14846 :  RJDA 7/16 n° 536).

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Jugé que n’avait pas la qualité de dirigeant de fait :

-  l'associé d'une société qui, s'étant porté caution hypothécaire de celle-ci auprès d'une banque, a exigé, en contrepartie, de contresigner toutes les opérations de débit et de crédit faites par la société avec cette banque (CA Lyon 5-7-1979 : Bull. Joly 1980 p. 690 ; voir aussi CA Paris 15-12-1995 : RJDA 3/96 n° 432) ;

-  l'associé minoritaire et directeur commercial d'une société qui a négocié seul le sort de celle-ci lors de son rachat par une autre société, se présentant auprès des partenaires de cette dernière comme le représentant de la société, et s'est porté caution à hauteur de 15 000 € d'un prêt affecté à la constitution du capital de la société (Cass. com. 24-4-2007 n° 04-10.050 :  RJDA 8-9/07 n° 841) ;

-  l'actionnaire d'une société qui a participé, en tant qu'invité, aux réunions du conseil de surveillance, lequel était investi par les statuts du pouvoir d'autoriser certaines opérations importantes (Cass. com. 20-4-2017 n° 15-19.750 F-D :  RJDA 8-9/17 n° 574) ;

-  l'épouse d'un associé d'une SARL ayant pour objet la restauration et l'hôtellerie qui l'aidait uniquement dans les tâches d'exécution en occupant notamment un poste de serveuse, n'avait à aucun moment assuré la direction générale de l'entreprise, la politique de celle-ci ou la conduite de sa gestion et ne détenait pas la signature sociale (CA Paris 3-3-2006 n° 05-9103 :  RJDA 8-9/06 n° 904) ;

-  une banque qui a payé certaines dettes d'une société mise en liquidation judiciaire, dès lors que, par ces règlements, elle s'est bornée à prendre une mesure conservatoire comme un créancier soucieux de sauvegarder sa créance (Cass. com. 3-7-2007 n° 06-10.803 :  RJDA 10/07 n° 969, 1e esp.) ;

-  le constructeur de véhicules automobiles qui a donné des ordres à un concessionnaire en matière d'achat de véhicules, fixé des directives au comptable ou encore assuré une présence quasi hebdomadaire dans la concession, dès lors que ces agissements s'inscrivent exactement dans le cadre des relations prévues entre le concédant et le concessionnaire par le contrat de concession (Cass. com. 26-10-1999 n° 1721 :  RJDA 11/99 n° 1213) ;

-  le fournisseur exclusif qui impose ses procédures au distributeur, dispose du pouvoir de contrôler sa comptabilité, lui accorde un soutien financier non prévu par le contrat de distribution et le prive d'autonomie pour l'aménagement des locaux, les campagnes publicitaires et la politique de prix (Cass. com. 23-9-2014 n° 12-35.120 :  RJDA 1/15 n° 17) ;

-  le franchiseur qui, dans le cadre du règlement de factures impayées, a imposé à son franchisé l'abandon pendant quatre mois de 70 % de ses recettes à son bénéfice et les a gérées à son seul profit (Cass. com. 27-5-2003 n° 859 :  RJDA 10/03 n° 960, 3e esp. et, sur renvoi, CA Toulouse 4-5-2005 n° 03-2479 :  RJDA 6/06 n° 650, 1e esp.) ;

-  les membres du conseil de surveillance d'une SA du seul fait qu'ils disposaient du pouvoir de révoquer le président du directoire et que, en l'exerçant, ils pouvaient ruiner la confiance des créanciers (Cass. com. 12-7-2005 n° 1238 :  RJDA 2/06 n° 169) ;

-  le directeur salarié qui a recueilli l'approbation du dirigeant de droit pour la conclusion de divers contrats au nom de la société (CA Paris 28-10-2014 n° 13-22472 :  RJDA 2/15 n° 97), qui n'a pas outrepassé la délégation de pouvoir consentie par le dirigeant de droit (CA Paris 31-3-2015 n° 14-05368 :  RJDA 7/15 n° 493) ou qui n'a pas excédé ses fonctions de directeur commercial (Cass. com. 24-1-2018 n° 16-23.649 F-D :  RJDA 4/18 n° 344) ;

-  le responsable de l'établissement secondaire d'une société qui faisait fonctionner celui-ci dans tous ses aspects en vertu de mandats donnés par le dirigeant de droit de la société mais n'a pas géré l'ensemble de la société (Cass. com. 13-2-2007 n° 05-20.126 :  RJDA 7/07 n° 729) ;

-  la société mère qui a simplement supervisé les dirigeants de sa filiale, approuvé les investissements supérieurs à un certain montant sans discuter de leur opportunité et mis en place des unités organisationnelles transversales sans vocation de direction (Cass. com. 19-11-2013 n° 12-28.367 :  RJDA 3/14 n° 221) ;

-  la société mère dont les décisions de restructuration des sociétés du groupe ont abouti à la cessation d'activité d'une sous-filiale, les dirigeants de droit de celle-ci étant restés maîtres de sa gestion (Cass. com. 11-10-2016 n° 14-26.901 F-D :  RJDA 1/17 n° 18) ;

- le constructeur automobile agissant dans le cadre d’un protocole d’accord conclu avec un fournisseur, portant sur les prix d’achats et les commandes à passer auprès de ce fournisseur, et prévoyant certains engagements au profit du constructeur (notamment, informations sur les gains de productivité du fournisseur, transparence financière garantie par ce dernier, ainsi que des engagements concernant sa reprise) dès lors que ces agissements n’ont consisté qu’en des contrôles ou exigences révélant un rapport de subordination économique. (Cass. com. 19-5-2021 n° 19-25.286 F-D : BRDA 13/21 Inf. 6).

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