Des parents donnent à leur fille par acte sous signature privée des titres de société. L’acte est enregistré par les donateurs. La donataire cède les actions reçues moins d’un mois plus tard. L’administration fiscale entend taxer la plus-value de cession et redresse les donateurs. Ils sont déchargés des impositions réclamées par le tribunal administratif de Grenoble.
Deux ans plus tard, le fisc réclame à la donataire les droits de mutation à titre gratuit dus à raison de la donation dont elle a bénéficié au motif que le jugement du tribunal administratif de Grenoble emportait reconnaissance judiciaire de don manuel. L’administration invoque les dispositions de l’article 757 du CGI qui prévoit que « les actes renfermant soit la déclaration par le donataire ou ses représentants, soit la reconnaissance judiciaire d'un don manuel, sont sujets aux droits de mutation à titre gratuit ».
La donataire fait valoir que le jugement du tribunal administratif ne constituait pas une « reconnaissance judiciaire » au sens des dispositions précitées. Le tribunal de grande instance de Paris la déboute.
En appel, elle soutient que la reconnaissance ne peut résulter que d'un jugement rendu par une juridiction judiciaire à l'exclusion des jugements rendus par les juridictions de l'ordre administratif.
Le jugement de première instance est confirmé. Le champ d'application de l'article 757 n'est nullement limité aux jugements émanant des juridictions de l'ordre judiciaire, dès lors que la reconnaissance du don manuel figure dans les motifs ou le dispositif d'un jugement, rendu le cas échéant par une juridiction administrative, que la reconnaissance n’est pas équivoque et qu'elle emporte constatation certaine de la transmission à titre de libéralité.
A noter : les décisions en matière de reconnaissance judiciaire sont rares. La présente affaire confirme que pour la juridiction judiciaire la « reconnaissance judiciaire » s’entend au sens large. Ici, « judiciaire » équivaut à « juridictionnel ».
La Cour de cassation ne s’est à notre connaissance jamais prononcé sur la question.
Caroline DANCOISNE
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Patrimoine n° 26980