Un fournisseur d'énergie confie la réalisation d'une centrale de production d'électricité photovoltaïque à une société. Celle-ci achète auprès d'un intermédiaire des panneaux photovoltaïques, composés de connecteurs fabriqués et fournis par un tiers. Après la mise en service de l'installation, des interruptions de production d'électricité interviennent, attribuées à des défauts des connecteurs.
Le fournisseur d'énergie agit alors en réparation de son préjudice contre l'entreprise principale, le vendeur intermédiaire et le fournisseur des connecteurs.
La cour d'appel de Versailles fait droit à sa demande et :
condamne le fournisseur des connecteurs à lui payer, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, une indemnité réparant son préjudice immatériel (notamment pertes d'exploitation) consécutif à la défectuosité des pièces ;
condamne l'entreprise principale à lui verser, sur le fondement de la garantie des vices cachés, une indemnité réparant son préjudice matériel au titre de la dépose et de la repose des panneaux photovoltaïques et des connecteurs, le vendeur intermédiaire étant condamné à la garantir de ces condamnations.
La cour d'appel rejette en revanche l'appel en garantie de ce vendeur intermédiaire contre le fournisseur des connecteurs, au motif que la responsabilité de ce dernier a été retenue sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux et que, ce fondement étant exclusif de tout autre, sa responsabilité ne pouvait pas être recherchée sur un autre fondement, notamment celui de la garantie des vices cachés.
La Cour de cassation censure la décision : la responsabilité du producteur d'un produit peut être recherchée, d'une part, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux au titre du dommage qui résulte d'une atteinte à la personne ou à un bien autre que le produit défectueux lui-même, d'autre part, sur le fondement de la garantie des vices cachés au titre notamment du dommage qui résulte d'une atteinte au produit qu'il a vendu. Le fait que le fournisseur ait été déclaré responsable à l'égard du maître de l'ouvrage sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux n'exclut donc pas qu'il puisse être condamné à garantir le vendeur intermédiaire sur le fondement de la garantie des vices cachés.
A noter :
Les articles 1245 et suivants du Code civil (ex-art. 1386-1, avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10-2-2016 réformant le droit des contrats) relatifs à la responsabilité du fait des produits défectueux mettent en place un régime de responsabilité sans faute en cas de dommage résultant du défaut de sécurité d’un produit.
Ces dispositions s'appliquent à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte à la personne ou à un bien autre que le produit défectueux lui-même (C. civ. art. 1245-1 ; ex-art. 1386-2). Elles ne portent pas atteinte aux droits dont la victime d’un dommage peut se prévaloir au titre du droit de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle ou au titre d’un régime spécial de responsabilité (C. civ. art. 1256-7). Interprétant ces dispositions, la Cour de cassation a précisé que le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux, lorsqu'il est applicable (Cass. 1e civ. 11-7-2018 n° 17-20.154 FS-PBI : RJDA 11/18 n° 872) :
- exclut l'application d'autres régimes de responsabilité de droit commun fondés sur le défaut d'un produit qui n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ;
- n'exclut pas l'application d'autres régimes de responsabilité de droit commun à condition que ceux-ci reposent sur des fondements différents, telles la garantie des vices cachés ou la faute.
Lorsque le dommage dont la réparation est demandée résulte d'une atteinte au produit lui-même, c'est le droit commun de la responsabilité contractuelle (C. civ. art. 1231-1 ; ex-art. 1147) ou de la garantie des vices cachés (C. civ. art. 1641) qui s'applique, pas le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux (Cass. 1e civ. 9-12-2020 no 19-21.390 FS-PI : RJDA 8-9/21 n° 619).
L'arrêt commenté reprend ces solutions en les synthétisant avec une grande clarté.
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