Par un acte intitulé « garantie à première demande », le gérant d’une société s’engage envers un fournisseur de la société à lui payer tout montant dans la limite de 60 000 €.
Une cour d’appel refuse de requalifier l'engagement en cautionnement et juge que la garantie consentie était indépendante des liens entre la société, débiteur principal, et le fournisseur : le garant s’était engagé irrévocablement et inconditionnellement à payer au fournisseur, à première demande de celui-ci, indépendamment des liens existant entre lui et la société et sans faire valoir d'exception ou d'objection résultant desdits liens contractuels ou d'une quelconque contestation y afférente, toute somme jusqu'à concurrence de 60 000 € ; en garantissant le paiement de sommes dues au titre de factures à échoir émises à l'égard de la société, le garant avait accepté de garantir des sommes dont le fournisseur n'aurait pas pu exiger le paiement par la société, dès lors qu'elles n'étaient pas échues.
L’arrêt est censuré par la Cour de cassation.
Aux termes de l'article 2321, al. 1 du Code civil, la garantie autonome est l'engagement par lequel le garant s'oblige, en considération d'une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme soit à première demande, soit suivant les modalités convenues. Il en résulte que le garant s'oblige à payer la dette d'un tiers de manière autonome au regard du contrat de base et que son obligation a un objet distinct de celle du débiteur principal.
En l’espèce, l’acte litigieux prévoyait qu'en cas de dénonciation le garant resterait tenu des sommes dues par le débiteur garanti au bénéficiaire, résultant de factures échues ou à échoir, à la date de prise d'effet de la dénonciation, de sorte que l’engagement du garant avait pour objet de garantir au fournisseur le paiement, non pas d’une somme déterminée, mais de celles que pourrait lui devoir la société au moment de l'appel de la garantie. En conséquence, il constituait un cautionnement.
A noter :
Application classique de la distinction entre la garantie autonome et le cautionnement.
Le critère de cette distinction réside dans l’objet de l’obligation qui doit être, s’agissant d’une garantie autonome, indépendant du contrat de base tandis que le cautionnement porte sur l’obligation du débiteur principal (notamment, Cass. com. 16-6-2004 no 01-15.394 F-D : RJDA 12/04 no 1378 ; Cass. 3e civ. 23-6-2004 n° 02-21.251 FS-PB : RJDA 1/05 no 75 ; Cass. 1e civ. 12-12-2018 n° 17-12.477 F-D : RJDA 3/19 n° 223). Peu importe le nom que les parties ont donné à la garantie, que la garantie soit dite « irrévocable » et exécutable à tout moment à la demande du créancier ou encore qu’elle prive le garant de la possibilité d’invoquer la nullité ou l’inexécution du contrat garanti. Cependant, la simple référence au contrat de base dans l'acte d'engagement du garant ne porte pas nécessairement atteinte au caractère autonome de la garantie (Cass. com. 18-5-1999 n° 95-21.539 P : RJDA 7/99 n° 847 ; Cass. com. 30-1-2001 n° 98-22.060 FS-P : RJDA 5/01 n° 642 ; Cass. com. 2-10-2012 n° 11-23.401 F-D).
Par ailleurs, le fait que le montant de la garantie ne soit pas déterminé à l’avance, seule une somme maximale étant prévue, comme au cas particulier, plaide en faveur d’un cautionnement (Cass. com. 20-4-2017 n° 15-18.203 F-D : RJDA 10/17 n° 666 ; Cass. com. 24-3-2021 n°19-14.082 F-D : RJDA 7/21 n° 520).