En l’espèce, une assistante service clientèle dans une société spécialisée dans le commerce de gros avait saisi la juridiction prud’homale pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail et un rappel de salaire au titre du minimum conventionnel pour les années 2006 à 2013. Période au cours de laquelle deux conventions collectives s’étaient succédé.
Deux conventions collectives successivement applicables
Le litige portait sur la prise en compte du 13e mois pour apprécier le respect du minimum conventionnel, et plus précisément sur le montant à retenir dans la comparaison avec la rémunération versée.
Aux termes de l'article 3, alinéa 3, de l'annexe collaborateur de la convention collective nationale des entreprises de commerce, de location et de réparation de tracteurs, machines et matériels agricoles, de matériels de travaux publics, de bâtiment et de manutention, de matériels de motoculture de plaisance, de jardins et d'espaces verts du 30 octobre 1969, applicable jusqu’en 2012, lorsqu'un salarié est rémunéré par un fixe plus primes et/ou commissions, conformément à des conditions particulières écrites, son salaire mensuel global ne pourra être inférieur au salaire minimum garanti découlant de son coefficient hiérarchique ; le salaire mensuel devant servir de base pour le calcul de primes éventuelles ou indemnités sera le salaire moyen des 12 derniers mois.
Selon l'article 4.21.1 de la nouvelle convention collective nationale métropolitaine des entreprises de la maintenance, distribution et location de matériels agricoles, de travaux publics, de bâtiment, de manutention, de motoculture de plaisance et activités connexes, dite SDLM, du 23 avril 2012, toujours en vigueur, pour l'application du salaire minimum mensuel conventionnel garanti, il y a lieu de prendre en compte tous les éléments de rémunération quels qu'en soient l'origine, l'objet, les critères d'attribution, l'appellation et la périodicité des versements, sans autres exceptions que celles énoncées à l'article 4.21.2. En vertu de ce dernier texte, ne sont pas pris en compte dans la définition du salaire minimum mensuel conventionnel garanti les éléments de la rémunération qui ne sont pas la contrepartie directe du travail ainsi que les primes et gratifications dont l'attribution présente un caractère aléatoire.
Un seul principe : le 13e mois doit être pris en compte le mois de son versement
Pour apprécier le respect du minimum conventionnel mensuel, l’employeur avait procédé à un lissage du 13e mois sur l’année, considérant que la rédaction de la première convention collective le lui permettait. Pour la salariée, au contraire, en l'absence de disposition contraire dans chacune des conventions, le 13e mois ne devait être pris en compte que pour le mois où il avait été versé. Les juges du fond lui avaient donné gain de cause.
Confirmant l’arrêt d’appel, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle que si le 13e mois fait partie des éléments de rémunération à prendre en compte dans la comparaison avec le salaire minimum conventionnel, en l'absence de disposition conventionnelle contraire, son montant ne doit être pris en compte que pour le mois où il a été effectivement versé. Or, la cour d’appel avait constaté, s'agissant de la période d'octobre 2006 à décembre 2013, au cours de laquelle les deux conventions collectives s'étaient appliquées successivement, que la salariée avait perçu une rémunération inférieure au salaire minimum conventionnel auquel elle pouvait prétendre. Dès lors, elle était bien fondée à réclamer un rappel de salaire à ce titre.
A noter :
La chambre sociale a déjà retenu la même solution dans un litige où la convention collective SDLM du 23 avril 2012 était également en cause (Cass. soc. 14-11-2018 n° 17-22.539 FS-PB : RJS 1/19 n° 20). Plus généralement, l’arrêt du 12 janvier 2022 s’inscrit dans le droit fil de la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de prise en compte de primes annuelles pour apprécier le respect du minimum conventionnel (Cass. soc. 14-11-1991 n° 87-44.094 P : RJS 2/92 n° 151 ; Cass. soc. 17-2-1999 n° 96-45.671 D : RJS 4/99 n° 511).
Documents et liens associés
Cass. soc. 12-1-2022 n° 20-12.542 F-D, H. c/ Sté Rain Bird Europe