Exécution du contrat
Sauf ruine du fonds, la résiliation du contrat de location-gérance par le liquidateur judiciaire entraîne, dès la date de notification de la résiliation, le retour du fonds dans le patrimoine de son propriétaire, lequel doit assumer toutes les obligations du contrat de travail. Une cour d’appel ne peut donc pas, pour débouter les salariés de leurs demandes salariales et indemnitaires, retenir que la date d'entrée en jouissance du fonds de commerce, et donc la date effective de reprise des salariés, avaient été différées du fait des opérations d'inventaire (Cass. soc. 3-4-2024 n° 22-10.261 FS-B).
Paie
Ne constitue pas une mesure discriminatoire l'attribution à certains salariés non-grévistes d'une prime exceptionnelle correspondant à un surcroît de travail ou à la réalisation de tâches en dehors de celles prévues par leur contrat de travail. Dès lors, le juge ne peut pas condamner l'employeur à verser une telle prime à tous les salariés non-grévistes sans rechercher, comme il y était invité, si cette prime n'avait pas été versée à certains salariés parmi les non-grévistes, ayant accepté une modification temporaire de leur contrat de travail en raison de l'exécution par eux de tâches ne relevant pas de leurs fonctions, de sorte qu'elles constituaient un surcroît de travail (Cass. soc. 3-4-20245 n° 22-23.321 F-D).
Rupture du contrat
L'employeur, à condition de respecter les règles de procédure applicables à chaque cause de licenciement, peut invoquer dans la lettre de licenciement des motifs différents de rupture inhérents à la personne du salarié, dès lors qu'il procèdent de faits distincts. Dès lors, la cour d'appel, ayant constaté que la lettre de licenciement reprochait à la salariée, en plus d'un manquement qualifié de fautif et prescrit, des griefs correspondant à des manquements professionnels relevant d'une insuffisance professionnelle, devait rechercher si ces derniers ne constituaient pas une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cass. soc. 3-4-2024 n° 19-10.747 F-D).
Sont renvoyées à la Cour de justice de l'Union européenne les questions suivantes : L'article 1er, §1, second alinéa, de la directive 98/59/CE concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux licenciements collectifs doit-il être interprété en ce sens que les licenciements pour motif économique fondés sur le refus par les salariés de l'application à leur contrat de travail des stipulations d'un accord collectif de mobilité doivent être considérés comme constituant une cessation du contrat de travail intervenue à l'initiative de l'employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs, de telle sorte qu'il doit en être tenu compte pour le calcul du nombre total de licenciements intervenus ? En cas de réponse positive à cette première question, lorsque le nombre de licenciements envisagés dépasse le nombre de licenciements prévus à l'article 1 a) de la directive précitée, l'article 2, paragraphes 2 à 4, de la même directive doit-il être interprété en ce sens que l'information et la consultation du comité d'entreprise avant la conclusion d'un accord collectif relatif à la mobilité interne avec des organisations syndicales représentatives dispensent l'employeur d'informer et de consulter les représentants du personnel ? (Cass. soc. 3-4-2024 n° 22-21.562 FS-D).
Représentation du personnel
S'il appartient au comité social et économique (CSE) de définir ses actions en matière d'activités sociales et culturelles, l'ouverture du droit de l'ensemble des salariés et des stagiaires au sein de l'entreprise à bénéficier des activités sociales et culturelles ne saurait être subordonnée à une condition d'ancienneté. En conséquence, une cour d’appel ne peut pas rejeter les demandes d’un syndicat tendant à dire illicite et à annuler un article du règlement d’un CSE instituant un délai de carence de 6 mis avant de permettre aux nouveaux embauchés de bénéficier des activités sociales et culturelles (Cass. soc. 3-4-2024 n° 22-16.812 FS-B).
Ayant constaté qu'après l'annulation de l'autorisation de licenciement d'un salarié protégé par le ministre du travail, le courrier par lequel le syndicat demandait la réintégration de l'intéressé, rédigé à la première personne du pluriel, mentionnait la volonté de l'accompagner et relevé qu'aucun mandat n'était joint à ce courrier, peu important qu'un mandat n'ayant pas date certaine ait été produit en cours de procédure, lors de la seconde communication de pièces, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a pu décider qu'aucune demande de réintégration n'avait été valablement formée dans les délais légaux (Cass. soc. 3-4-2024 n° 22-13.478 F-D).
L'indemnité due, en application de l'article L 2422-4 du Code du travail, au salarié protégé, licencié sur le fondement d'une décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ensuite annulée, a, de par la loi, le caractère d'un complément de salaire. Il en résulte que cette indemnité ouvre droit au paiement des congés payés afférents (Cass. soc. 3-4-2024 n° 22-13.478 F-D).
Négociation collective
Un accord collectif négocié et signé aux conditions de droit commun peut définir, dans les entreprises comportant des établissements distincts, les niveaux auxquels la négociation obligatoire visée à l'article L 2242-1 du Code du travail (négociation sur la rémunération, le temps de travail, le partage de la valeur ajoutée et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail) est conduite (Cass. soc. 3-4-2024 n° 22-15.784 FS-B).
Est valide un avenant de révision conclu par les organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de l'accord révisé à la date de conclusion de l'avenant de révision et n'ayant pas fait l'objet d'opposition dans les conditions prévues à l'article L 2232-6 du Code du travail. Les partenaires sociaux sont en droit de conclure, dans les conditions fixées par l'article L 2261-7 du même Code, un avenant de révision d'un accord collectif de branche à durée indéterminée mettant fin à cet accord, dès lors que cette extinction prend effet à compter de l'entrée en vigueur d'un autre accord collectif dont le champ d'application couvre dans son intégralité le champ professionnel et géographique de l'accord abrogé par l'avenant de révision (Cass. soc. 3-4-2024 n° 23-14.521 F-D).
Contrôle - contentieux
Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un tel harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement (Cass. soc. 3-4-2024 n° 23-11.767 F-D).
La saisine de la commission de conciliation compétente pour connaître des différends individuels ou collectifs pouvant s'élever entre Pôle emploi (France Travail) et ses salariés ne fait pas obstacle à celle du juge prud'homal et n'a pas d'effet interruptif du délai de prescription prévue à l'article L 1471-1 du Code du travail (Cass. soc. 3-4-2024 n° 22-23.870 F-D).