Exécution du contrat
Le salarié privé d'une possibilité de promotion par suite d'une discrimination peut prétendre, en réparation du préjudice qui en est résulté dans le déroulement de sa carrière, à un reclassement dans le coefficient de rémunération qu'il aurait atteint en l'absence de discrimination. Il appartient alors au juge de rechercher à quel coefficient de rémunération le salarié serait parvenu sans la discrimination constatée (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-15.871 F-D).
Une cour d'appel ne peut pas refuser d'annuler l'avertissement notifié au salarié en raison des critiques adressées aux cadres de l'entreprise et au directeur général, sans constater que les courriels litigieux comportaient des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs (Cass. 24-11-2021 n° 20-18.143 F-D).
Paie
Si le statut social d'une personne est d'ordre public et s'impose de plein droit dès lors que sont réunies les conditions de son application, la décision administrative individuelle d'affiliation qui résulte de l'adhésion au régime général s'oppose à ce qu’une immatriculation au régime spécial de la fonction publique puisse mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l'affiliation antérieure. Une cour d’appel ne saurait donc condamner une Urssaf à rembourser à un centre hospitalier les cotisations versées au titre du régime général pour ses salariés ensuite titularisés dans la fonction publique hospitalière avec effet rétroactif (Cass. 2e civ. 25-11-2021 n° 16-15.908 F-B).
Rupture du contrat
La proposition d’une modification du contrat de travail pour motif économique, refusée par le salarié, ne dispense pas l’employeur de son obligation de reclassement et, par suite, de lui proposer éventuellement le même poste en exécution de cette obligation (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-12.616 F-D).
Ayant relevé que, dans le cadre d'une procédure de licenciement économique, l’employeur avait pris en compte, pour l’appréciation des qualités professionnelles, le taux d’atteinte des objectifs, alors que l’accord d’entreprise définissant les critères applicables dans l’entreprise à l’ordre des licenciements n’avait pas retenu cet élément pour apprécier les compétences des contrôleurs de gestion et de responsable qualité, la cour d’appel a pu en déduire que les critères d’ordre n’avaient pas été respectés et que le salarié était fondé à réclamer des dommages-intérêts à ce titre (Cass. soc. 24-11-2021 n° 19-21.712 F-D).
L'annulation par la juridiction administrative d'une décision ayant procédé à la validation de l'accord collectif déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi au motif de l'erreur de droit commise par l'administration en validant un accord qui ne revêtait pas le caractère majoritaire requis par le Code du travail n'est pas de nature à entraîner la nullité de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, mais donne lieu à l'application des dispositions de l'article L 1235-16 du même Code (Cass. soc. 24-11-2021 n° 18-26.753 F-D).
Une cour d'appel ne peut pas déclarer irrecevable la demande de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement en retenant que le salarié a saisi la juridiction prud’homale plus de 6 mois après avoir reçu son solde de tout compte sans avoir dénoncé auprès de l’employeur les sommes qui lui avaient été remises, alors qu'elle aurait dû au préalable inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office et tiré de l'effet libératoire du reçu (Cass. soc. 24-411-2021 n° 18-26.752 F-D).
Une cour d'appel ne peut pas condamner le salarié en arrêt maladie à payer à la société une somme à titre d'indemnité de préavis au motif que la prise d'acte produit les effets d'une démission, alors que le salarié qui se trouve, du fait de sa maladie, dans l'impossibilité physique d'exécuter un préavis n'est redevable d'aucune indemnité compensatrice de préavis envers l'employeur (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-13.502 F-D).
Représentation du personnel
Ayant constaté qu’elle était saisie d’une demande de communication par l’employeur d’éléments manquants de la base de données économiques et sociales, formée par le comité social et économique de l’UES, la cour d’appel a retenu à bon droit que, le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés étant seul compétent pour en connaître, elle ne pouvait, à ce titre, statuant en référé, constater l’existence d’un trouble manifestement illicite, peu important, lors de la saisine de la juridiction, l’absence d’engagement d’une procédure d’information consultation (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-13.904 F-B).
Lorsque le protocole d’accord préélectoral répond à la condition de signature à la double majorité, il ne peut être contesté devant le juge judiciaire qu’en ce qu’il contiendrait des stipulations contraires à l’ordre public, notamment en ce qu’elles méconnaîtraient les principes généraux du droit électoral. Toutefois un syndicat, qui, soit a signé un tel protocole, soit a présenté des candidats sans émettre de réserves, ne saurait, après proclamation des résultats des élections professionnelles, contester la validité du protocole d’accord préélectoral et demander l’annulation des élections, quand bien même invoquerait-il une méconnaissance par le protocole préélectoral de règles d’ordre public (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-20.962 F-B).
Dès lors que le pouvoir de représenter la personne morale a été donné avant l'expiration du délai légal de 15 jours de contestation de la régularité des élections, celui-ci peut être valablement produit jusqu'au jour où le juge statue (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-20.706 F-D).
Ayant relevé les éléments suivants, le tribunal a pu en déduire que des précautions suffisantes avaient été prises pour garantir la confidentialité des votes et des données transmises lors du vote électronique organisé dans l’entreprise (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-17.073 F-D) :
- les identifiants étaient générés par le système de vote de façon aléatoire, sans aucun élément permettant d'identifier l'électeur ;
- chaque ingénieur et cadre, qui avait disposé d'une adresse électronique unique, devait créer des mots de passe personnels, obligatoirement changés régulièrement, avec interdiction de les partager ;
- chaque vote était validé par un mot de passe, lequel n'était pas envoyé sur la messagerie en même temps que l'identifiant et, après s'être connecté sur le site avec son identifiant et avoir inséré sa date de naissance (donnée secrète), chaque ingénieur et cadre devait indiquer une adresse mail ou un numéro de téléphone pour obtenir le mot de passe ;
- la procédure de secours était détaillée par le protocole d'accord préélectoral, qui précisait que l'électeur pouvait demander une réédition de son identifiant et/ou une régénération de son mot de passe en appelant un numéro vert ou via un formulaire en ligne et, pour l'obtenir, il devait donner son nom, son prénom, sa date de naissance mais aussi son lieu de naissance (donnée secrète) ;
- en outre la régénération d'un mot de passe avait automatiquement pour effet de rendre inutilisable le mot de passe précédent et était enregistrée au sein du système de vote, avec mention du nom de l'électeur, de la date et l'heure de l'envoi ;
- si l’un des salariés avait pu se faire adresser le nouveau mot de passe d’un autre salarié de l’entreprise, c’est parce que ce dernier lui avait donné son lieu de naissance, en sorte que ce procédé, résultant d’une usurpation d’identité avec l’accord de l’intéressé, ne démontrait pas de faille dans le dispositif.
En cas de refus par un salarié protégé de la modification de son contrat ou du changement de ses conditions de travail, l'employeur doit poursuivre le contrat de travail aux conditions antérieures ou engager la procédure de licenciement en saisissant l'autorité administrative d'une demande d'autorisation de licenciement. Il appartient à l'employeur de maintenir tous les éléments de rémunération antérieurement perçus par le salarié aussi longtemps que l'inspecteur du travail n'a pas autorisé son licenciement. Ayant constaté que le changement de site d’affectation décidé par l’employeur avait été refusé par le salarié protégé et que l’inspecteur du travail n’avait pas autorisé son licenciement, la cour d'appel aurait dû déduire que l’absence de rémunération constituait un manquement grave rendant impossible la poursuite du contrat de travail et justifiant la prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-19.040 F-D).
Des faits de violence et d’intimidation commis dans l’entreprise par un salarié protégé caractérisent un abus dans l’exercice du mandat et un manquement aux obligations découlant du contrat de travail pouvant justifier le prononcé d’une sanction disciplinaire. La circonstance que ces faits sont survenus dans le cadre de l’exercice du mandat n’est pas de nature à justifier la carence de l’employeur qui, informé de la situation, n'a pris aucune mesure pour remédier à la situation (Cass. soc. 24-11-2021 n° 19-25.145 F-D).
Santé et sécurité
Lorsque la décision de la caisse de prolonger le délai pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie ne résulte pas de la nécessité de l'envoi d'un questionnaire ou de la réalisation d'une enquête, la caisse est seulement tenue d'informer les parties en temps utile du report de sa décision et de les informer, une fois l'examen de la déclaration achevé, de la faculté pour elles de consulter le dossier (Cass. 2e civ. 25-11-2021 n° 20-14.152 F-B).
En cas de saisine d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dont l'avis s'impose à la caisse, l'information du salarié, de ses ayants droit et de l'employeur sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief s'effectue avant la transmission du dossier audit comité régional. Cette information précise la date à laquelle s'effectuera cette transmission. Ayant constaté que le courrier de la caisse ne mentionnait pas la date à laquelle la transmission devait être effectuée, la cour d'appel ne pouvait pas débouter l'employeur qui contestait l'opposabilité de la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie (Cass. 2e civ. 25-11-2021 n° 20-15.574 F-B).
Travail indépendant
Pour la détermination des droits d’un assuré faisant l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actif, au titre de régimes d'assurance vieillesse à caractère essentiellement contributif, l’exclusion des années durant lesquelles des cotisations n’ont pas été intégralement payées, sans aucune prise en compte des paiements partiels, si elle contribue à l’équilibre financier de ces régimes, porte une atteinte excessive au droit fondamental garanti en considération du but qu’elle poursuit, et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence. Dès lors, l’application des articles L 644-1 du CSS et 2 du décret du 22 avril 1949 modifié relatif au régime d'assurance vieillesse complémentaire des médecins, d’une part, des articles L 645-2 du CSS et 2 du décret du 27 octobre 1972 modifié tendant à rendre obligatoire le régime des prestations supplémentaires de vieillesse des médecins conventionnés, d’autre part, en tant qu’ils prévoient, qu’en dehors des cas qu’ils visent, seul le paiement intégral de la cotisation annuelle due au titre de chacun de ces régimes ouvre droit à l’attribution de points de retraite, doit être écartée (Cass. 2e civ. 25-11-2021 n° 20-17.234 FS-BR).
Statuts particuliers
Lorsque l'employeur est assujetti à une convention collective applicable à l'entreprise, le VRP peut, dans les cas de rupture du contrat de travail ouvrant droit à l’indemnité de clientèle, prétendre à une indemnité qui sera égale à celle à laquelle il aurait eu droit si, bénéficiant de la convention, il avait été licencié, dès lors que la convention collective applicable n'exclut pas les VRP de son champ d'application. Dès lors, une cour d’appel ne pouvait pas décider que la relation de travail était soumise aux dispositions de la convention collective des VRP et dire que le salarié ne pouvait pas revendiquer un solde d’indemnité conventionnelle de licenciement sur le fondement de la convention collective de travail des cadres, techniciens et employés de la publicité française du 22 avril 1975 alors que celle-ci n’exclut pas les VRP de son champ d’application (Cass. soc. 24-11-2021 n°s 18-26.723 F-D, 18-26.727 F-D, 18-26.745 F-D, 18-26.752 F-D, 18-26.753 F-D, 20-22.168 F-D).
Contrôle - contentieux
Le délai de prescription de 12 mois prévu par l'article L 1235-7 du Code du travail, dans sa version applicable du 1er juillet 2013 au 24 septembre 2017, qui concerne les contestations, de la compétence du juge judiciaire, fondées sur une irrégularité de la procédure relative au plan de sauvegarde de l'emploi ou sur la nullité de la procédure de licenciement en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un tel plan, court pour les salariés à compter de la notification du licenciement (Cass. soc. 24-11-2021 n° 19-21.266 F-D).
L’interruption d'un délai est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l’instance, ou si sa demande est définitivement rejetée. Dès lors, est non avenue l'interruption du délai de contestation, par le salarié protégé, de son licenciement économique par la saisine de la juridiction administrative dès lors que, par un jugement définitif, celle-ci a rejeté la requête de l'intéressé aux fins d'annulation de la décision de l'inspecteur du travail ayant autorisé l'employeur à procéder à son licenciement (Cass. soc. 24-11-2021 n° 20-22.168 F-D).