Rappel des règles
Le principe.
Sauf dispositions conventionnelles plus favorables, le temps d’habillage et de déshabillage n’est pas du temps de travail effectif (Cass. soc. 28-10-2009 n° 08-41.953) . La loi prévoit toutefois que lorsque la tenue de travail est imposée par la loi, des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail, et doit être revêtue sur le lieu de travail, les temps d’habillage et de déshabillage doivent faire l’objet de contreparties en temps ou en argent (C. trav. art. L 3121-3) .
L’application.
Pour les juges, ces 2 conditions sont cumulatives (Cass. ass. plén. 18-11-2011 n° 10-16.491) , et lorsqu’elles sont réunies, la CC ou accord collectif, ou à défaut le contrat de travail, doivent soit prévoir la contrepartie des temps d’habillage/déshabillage, soit leur assimilation à du temps de travail effectif (C. trav. art. L 3121-7 et L 3121-8) .
Appréciation des conditions
Les faits.
Dans cette affaire, des maçons, aides-maçons, conducteurs de tractopelle, conducteurs d’engin et chauffeur réclament un rappel au titre de la contrepartie au temps nécessaire aux opérations d’habillage et de déshabillage. Les textes en présence étaient les suivants :
le contrat de travail des salariés, préconisant d’utiliser des vêtements et équipements de sécurité et protection nécessaires à l’exécution de certaines tâches dans les meilleures conditions de sécurité ;
le règlement intérieur, d’ailleurs invoqué par l’employeur, indiquant que « chaque salarié doit notamment utiliser ou faire utiliser les accessoires et dispositifs de protection individuels ou collectifs fournis par l’entreprise nécessaires à l’exécution des tâches qui lui sont confiées ou qu’il a la responsabilité de faire exécuter, tels que tous les équipements de protection individuelle, par exemple casque, chaussures, signalisations à haute visibilité... ».
Le litige.
Les juges d’appel avaient débouté les salariés de leur demande de contrepartie au temps d’habillage/déshabillage, estimant qu’ils ne démontraient pas :
que le port de la tenue de travail était imposé par des dispositions législatives ou réglementaires, par des clauses conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail, et que l’habillage et le déshabillage devaient être réalisés dans l’entreprise ou sur le lieu de travail ;
qu’ils exécutaient des tâches salissantes justifiant l’obligation de revêtir des tenues de travail adaptées dans l’entreprise ou sur le lieu de travail : pour eux, les travaux d’enrobés de bitume et de goudron dans le domaine de la construction et l’entretien des routes ne faisant pas partie de la liste des travaux salissants prévus réglementairement (arrêté du 23-7-1947) , leur poste ne les mettait pas en contact direct et permanent avec des produits salissants et insalubres les obligeant à se changer dans l’entreprise ou sur le lieu de travail.
La solution.
Pour la Cour de cassation, la cour d’appel ne pouvait débouter les salariés de leur demande, alors même (Cass. soc. 10-5-2023 n° 21-20.349) :
qu’elle avait relevé que le port des accessoires ou dispositifs de protection individuels ou collectifs fournis par l’entreprise nécessaires à l’exécution des tâches confiées aux salariés s’imposait à ces derniers, tant en application du règlement intérieur que des dispositions de leur contrat de travail ;
que l’employeur soutenait lui-même que la seule obligation pesant sur les salariés était de revêtir ces équipements ;
qu’il n’était pas contesté que ces équipements étaient mis à la disposition des salariés par leur employeur pour des raisons d’hygiène et de sécurité et devaient être revêtus et ôtés dans l’entreprise.
Conseil.
Ainsi, les conditions cumulatives de port obligatoire d’une tenue et d’habillage et déshabillage sur le lieu de travail peuvent découler des obligations prévues en matière de protection, d’hygiène et de sécurité par le contrat de travail et/ou le règlement intérieur.