En octobre et novembre, les feuilles mortes se ramassent à la pelle, dit Jacques Prévert. Et confrontés à cette chute, nombre de nos concitoyens perdent le souvenir des jours heureux.
Plantons le décor : un homme s’installe dans un humble village de Meurthe-et-Moselle où il achète une maison. Huit ans plus tard, il ne supporte plus les arbres de la propriété mitoyenne qui projettent toute l’année graines, feuilles et branches sur sa maison et sa piscine, bouchant conduits d’évacuation d’eau pluviale et système de filtration. Il assigne sa voisine pour trouble anormal de voisinage afin qu’elle soit condamnée à arracher quatre bouleaux et deux érables ainsi qu’à lui verser 5 000 € de dommages et intérêts.
Le tribunal d’instance le déboute après avoir observé que les deux habitations se trouvent dans un village boisé et que la chute de feuilles mortes à l’automne sur une propriété voisine ne constitue pas un trouble anormal de voisinage. Notre homme fait appel et produit une facture de 180 €, correspondant au nettoyage d’un chéneau de sa maison. Il fournit également le rapport d’un expert en sylviculture constatant, pour l’année 2015, que le filtre de sa piscine a récupéré 6 cm2 de déchets végétaux par jour en juillet et 9 cm2 par jour en septembre. Ces débris végétaux étaient composés de feuilles et graines d’essences diverses provenant, pour certaines de son fonds (laurier, charme, prunier ou cornouiller), mais pour la plupart du fonds voisin (feuilles et graines de bouleaux et d’érables planes).
La cour d’appel de Nancy admet que les chutes de feuilles ou graines provenant d’une propriété voisine constituent « un trouble ». Toutefois, note-t-elle, les photos aériennes du site « géoportail » produites aux débats montrent que l’environnement de la maison est constitué d’autres maisons construites au milieu de jardins arborés. Dès lors, en décidant de s’installer dans ce petit village champêtre et forestier, le plaignant a choisi d’habiter dans un environnement constitué d’arbres, avec les avantages et les inconvénients qu’ils comportent, de sorte que les désagréments qu’il dénonce n’apparaissent pas, dans ce contexte, comme anormaux.
Conclusion : dans un environnement boisé, et à moins que les arbres du voisin ne surplombent leur propriété, ce dernier n’est pas tenu de courir après les feuilles de ses arbres pour les attraper avant qu’elles ne tombent chez eux !
Daniel FAUCHER, Editorialiste Solution Notaires
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Particuliers n° 71048