En principe, la remise gratuite de biens entraîne, pour l’entreprise habituellement récupératrice de TVA, un coût. En effet, dès lors que le bien n’est pas ou plus affecté à la réalisation d’une opération imposable, l’entreprise doit :
- soit reverser la TVA déduite sur l’acquisition du bien ;
- soit verser au Trésor un montant de TVA calculé sur le prix de revient du bien.
Ce coût de TVA pouvant dissuader les opérateurs de procéder à des dons, des mesures ont été prises afin de l’écarter dans certaines hypothèses.
A noter : d’autres mesures visant à inciter au don de denrées alimentaires ou d’invendus non alimentaires figuraient également dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et économie circulaire.
Neutralisation de l’impact TVA pour certains dons de biens
Par le passé, des mesures spécifiques avaient été adoptées par l’administration fiscale par voie de tolérance doctrinale pour traiter cette difficulté.
Depuis l’entrée en vigueur de l’article 36 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire, un mécanisme légal a été introduit à l’article 273 septies D du Code général des impôts (CGI) pour atteindre cet objectif.
L’administration fiscale en a précisé les modalités de mise en œuvre dans ses commentaires mis à jour le 26 août 2020[1]. On soulignera que si la lettre de l’article 273 septies D du CGI est assez restrictive quant au périmètre de la mesure, l’administration fiscale l’étend significativement, tant en ce qui concerne les biens visés que les organismes bénéficiaires des dons, pour retrouver le champ de ses anciennes tolérances. Finalement, la légalisation du mécanisme est surtout l’occasion de préciser le formalisme à suivre par les parties et ainsi de sécuriser l’absence de coût TVA pour les donateurs.
Les biens concernés sont ainsi :
- les invendus alimentaires et non alimentaires neufs ;
- les biens acquis ou fabriqués par l'assujetti en vue de leur donation ;
- les biens usagés ayant été utilisés pour les besoins de l'exploitation du donateur.
Les organismes bénéficiaires de tels dons sont les associations reconnues d’utilité publique (y compris les fondations) présentant un intérêt général de caractère humanitaire, éducatif, social ou charitable.
Il est également admis que ces règles s’appliquent aux dons effectués au profit :
- de "banques alimentaires" affiliées à la Fédération française des banques alimentaires ;
- d’associations et de fondations sans but lucratif dont la gestion est désintéressée, qui exportent les biens donnés dans le cadre de leurs activités humanitaires, éducatives, sociales ou charitables.
Dans tous les cas, une attestation doit être délivrée par l’organisme bénéficiaire ou un tiers dûment mandaté agissant en son nom et pour son compte, par don ou au titre d’une pluralité de dons effectués par un même donateur, perçus sur une période n’excédant pas une année civile.
L’article 84 B de l’annexe III au CGI prévoit les mentions devant figurer sur cette attestation qui doit être conservée par les parties.
Mesure spécifique à la crise sanitaire du Covid-19
Par ailleurs, rappelons que dans le cadre de la crise sanitaire du Covid-19, une mesure spécifique a été adoptée par l’administration fiscale[2]. Cette tolérance vise les dons, effectués à compter du 1er mars 2020 et jusqu'au trentième jour suivant la fin de la période de l’état d'urgence sanitaire :
- de matériels sanitaires (masques, gels et solutions hydroalcooliques, tenues de protection et respirateurs), qu’ils aient été fabriqués ou acquis par l’entreprise ;
- au profit des organismes bénéficiaires suivants : les établissements de santé, les établissements et services d’accueil de personnes âgées ou handicapées, les professionnels de santé, les services de l’Etat et les collectivités territoriales.
Malgré l’adoption de l’article 273 septies D du CGI et des commentaires de l’administration fiscale précités, cette mesure reste utile puisqu’elle étend la liste des organismes bénéficiaires.
La justification de ces dons est plus souple que dans le cadre du mécanisme légal. Le bénéficiaire du don est dispensé de délivrer l’attestation mentionnée ci-dessus, l’entreprise donatrice conserve à l’appui de sa comptabilité les informations nécessaires permettant d’identifier la date du don, son bénéficiaire, la nature et les quantités de biens donnés.
[1] BOI-TVA-DED-60-30 §70 et BOI-TVA-CHAMP-10-20-20 §130
[2] BOI-RES-000068
Par Amélie RETUREAU, associée et Emilie DUFOUR, avocate au sein du cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats
Pour en savoir plus sur cette question : voir Loi anti-gaspillage et économie circulaire et La lutte contre le gaspillage et la loi anti-gaspillage et économie circulaire - Principaux textes d’application parus en 2020