Dans le cadre d’un démarchage à domicile, un homme conclut en juillet 2007 un contrat de réservation portant sur un appartement et un parking. Le 8 avril 2008, il signe l’acte authentique de vente en l’état futur d’achèvement, l’immeuble étant livré fin 2009. Mais il conteste par la suite les conditions de conclusion de ces contrats, faisant notamment valoir qu’il n’a pas bénéficié du droit de rétractation/réflexion ouvert à l’acquéreur non professionnel d’un immeuble à usage d’habitation (CCH art. L 271-1). Par lettre recommandée du 17 février 2015 adressée au vendeur, il déclare se rétracter.
Saisie de l’affaire, la cour d’appel donne gain de cause à l’acheteur. Elle prononce tout d’abord la nullité du contrat de réservation en raison de différents manquements aux règles sur le démarchage à domicile. Elle estime ensuite que ce contrat, distinct et autonome du contrat de vente, étant nul, l’acheteur se trouvait dans le cas d’un achat en l’état futur d’achèvement non précédé d’un contrat préliminaire. Il aurait donc dû disposer d’un délai de réflexion [7 jours à l’époque des faits, 10 aujourd’hui] avant de signer la vente (CCH art. L 271-1, al. 5). L’acheteur n’ayant pas bénéficié d’un tel délai, il a pu valablement renoncer à acquérir par la suite et la vente doit être annulée.
La Cour de cassation confirme.
A noter : Récemment, la Cour de cassation a jugé que le contrat préliminaire étant facultatif, sa nullité est sans incidence sur la validité de l’acte de vente (Cass. 3e civ. 27-4-2017 n° 16-15.519 FS-PB : BPIM 3/17 inf. 213). Sans remettre en cause le caractère autonome du contrat de réservation, l’arrêt commenté indique lui que la nullité de ce dernier peut indirectement rejaillir sur la vente par le biais du droit de rétractation/réflexion. En cas de conclusion d’un contrat préliminaire, l’acheteur dispose en effet du droit de rétractation dans les conditions évoquées (CCH art. L 271-1, al. 1). Si ce contrat est annulé, on se retrouve dans la situation d’une vente non précédée d’un contrat préliminaire, vente pour laquelle un droit de réflexion doit être notifié à l’acheteur (CCH art. L 271-1, al. 5). En l’absence de notification, l’acheteur conservait, relève la cour d’appel, la faculté de se rétracter dans les 5 ans à compter du jour où il avait eu connaissance des faits lui permettant de l’exercer. Sa lettre du 17 février 2015 valant renonciation à acquérir, la vente est annulée.
Dans son pourvoi, le vendeur invoquait la jurisprudence selon laquelle la signature sans réserve de l’acte authentique de vente par l’acheteur vaut renonciation à se prévaloir de l’irrégularité de la notification du droit de rétractation au stade de l’avant-contrat (Cass. 3e civ. 7-4-2016 n° 15-13.064 FS-PB : BPIM 3/16 inf. 179). Le vendeur soutenait ainsi que l’acheteur avait signé l’acte de vente sans émettre de réserve quant à l’irrégularité de la présentation de la faculté de renonciation au sein du contrat préliminaire. L’argument n’a pas été retenu. La solution rendue aujourd’hui remet-elle en cause celle de 2016 ? Cela n’est pas certain car ici la notification est censée n’être jamais intervenue – et n'être pas « simplement » irrégulière – du fait de la nullité du contrat de réservation.
En pratique : l’arrêt commenté emporte des conséquences non négligeables, qui dépassent le cadre de la Vefa. Les notaires amenés à instrumenter une vente à la suite d’un avant-contrat présentant un risque de nullité devront redoubler de vigilance et s’assurer, lorsqu’il est applicable, de conférer à l’acquéreur le droit de réflexion de 10 jours avant la signature de l’acte.
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Vente immobilière n° 45522